Gratis
Félicité Herzog
Gallimard
Roman Thriller
256 p., 18,50 €
ISBN: 9782070149902
Paru en août 2015
Où?
Le roman se déroule principalement à Londres, puis à Jersey, mais entraîne le lecteur à Salzbourg, Palma de Majorque, Davos, Moscou, Vienne, Venise, Paris.
Quand?
L’action se situe sur une période allant de 1948, année de naissance d’Adrian Celsius à 2030, marquant le suicide de Jack Souris et le découverte des écrits d’Ali Tarac.
Ce qu’en dit l’éditeur
Au début des années quatre-vingt-dix, Ali Tarac interrompt brutalement de brillantes études à Paris pour tenter l’aventure. Une intuition fulgurante et une série de rencontres à Londres – Hart, un limier de la finance, Léna, sa future femme, et Celsius, un milliardaire philanthrope et mélancolique – vont faire de lui un champion de la nouvelle économie et de sa start-up un empire mondial.
En 2001, le jeune prodige perd tout. Ruiné, déchu, calomnié, il choisit de disparaître et se réfugie sur l’île de Jersey. C’est là, dans le plus grand secret, qu’il conçoit et bâtit la Transition, une «solution» à la condition humaine, produit croisé d’Internet et d’Orwell, qui révolutionnera la société du XXIe siècle.
Ce que j’en pense
***
Après avoir tué le père dans son premier roman, Un héros, Félicité Herzog change complètement de registre dans ce nouvel opus en nous parlant d’un milieu qu’elle connaît très bien, mais qui n’est guère abordé en France : celui de l’entreprise.
En imaginant le parcours d’un golden boy, elle nous montre combien cet univers est aujourd’hui régi par des règles qui sont bien loin de ce qu’il est convenu d’appeler «l’économie réelle» et que leur terrain de chasse est mondialisé.
A vingt ans, Ali Tarac, sent que le moment est venu pour lui de réaliser son grand projet. Il décide de mettre fin à ses études – brillantes – et s’envole pour Londres pour y peaufiner son projet et trouver les sociétés de susceptibles de l’épauler.
Adrian Celsius, qui a développé au fil des ans Lighthouse, une entreprise de capital-risque, va lui mettre le pied à l’étrier. Car au-delà de la société qu’il entend développer, c’est l’homme et sa détermination farouche qui lui plaisent.
En lançant Gratis, une société qui entend offrir la téléphonie gratuite pour tous et financée par des messages publicitaires interrompant la conversation, il ne tarde pas à connaître une ascension fulgurante, même si ces bénéfices sont encore très loin. Mais l’homme sait s’entourer et créer un réseau très efficace : « Déterminé à transformer le rêve qu’était mon projet en une réalité qui me semblait certains jours par trop fuyante, je conçus et recrutai la fameuse force commerciale de Gratis, qui identifiait ses clients, anticipait leurs envies, exacerbait leurs doutes, ne les lâchait plus et n’avait rien à envier aux méthodes d’une redoutable police de la pensée. »
En quelques années, sa société est valorisée à 1,2 milliard de livres sterling, sans gagner un seul centime. La start-up est devenue une blue chip. Ali peut fêter son succès. Il épouse la belle Léna, rencontrée quelques années plus tôt à Saint-Pétersbourg, et vise désormais l’Amérique. Seulement voilà, les attentats du 11 septembre vont freiner cette politique d’expansion. En détruisant les tours jumelles, les deux avions ont aussi fait exploser la bulle spéculative. Gratis s’effondre et Ali doit quitter l’entreprise sous les invectives et Léna va demander le divorce. Ali, pour qui « la vie n’était qu’un immense champ d’action à l’instant T.», doit tout reconstruire.
Dans la seconde partie du livre, on assiste à sa renaissance avec le lancement de New Birth, une société qui ne propose rien moins que d’offrir à tous une nouvelle vie. Fruit à la fois de sa première expérience douloureuse et d’une intuition qu’il imagine partagée, il propose de concevoir « La vie terrestre comme un service, un produit livrable, répétable à l’infini jusqu’à la disparition ultime. »
Si cette seconde partie est un peu moins réussie que la première, elle permet toutefois de comprendre à nouveau combien les règles de l’économie sont fragiles, parce que répondant plus à de la psychologie qu’à des théorèmes.
Le succès n’est au rendez-vous que tant que tout les acteurs y croient et qu’aucun grain de sable ne vient enrayer la belle mécanique. Un grain de sable qui sera incarné ici par la jeune Noémie, petite fille du fondateur de Lighthouse. Pour elle, la «transition» proposée par le société est tout le contraire d’un gage de liberté.
Et si « les fêlures des êtres supérieurs sont indécelables aux yeux du monde extérieur » elle va tout de même parvenir à trouver la faille, annonciatrice de la chute prochaine. D’un univers impitoyable, on est passé à un avenir terrifiant. D’une bulle spéculative à une explosion des valeurs et même de la démocratie.
Et si Félicité Herzog ne nous lançait pas ainsi un appel à la vigilance ?
Autres critiques
Babelio
Télérama
Le Point
Blog Le Littéraire
Extrait
« Les fondateurs de Lighthouse avaient créé un outil fabuleux. Tout en prenant leur tasse de thé, des biscuits au beurre et en surveillant d’un œil, prétendument désinvolte, la liste des futurs chevaliers de la reine, ils avaient théorisé un nouveau modèle de financement qui permettait de prêter et de posséder sans contraintes, sans remboursement et sans bilan. Le principe en était simple. À coup d’endettement négocié avec des banques cherchant à prêter de l’argent de moins en moins cher, ils misaient sur les plus belles affaires industrielles et se finançaient en faisant porter le chapeau à un autre qui, à son tour, répétait l’opération. Puis, ils croisaient les doigts sur la croissance exponentielle du marché, et sortaient, dès que possible, de cette situation potentiellement périlleuse en se délestant des titres en Bourse. Armés des conseils les plus avertis et les mieux introduits, ils avaient conquis le pouvoir. Le train-train bancaire des années quatre-vingt n’était plus. Une révolution sans révolutionnaires avait eu lieu. » (p. 20)
A propos de l’auteur
Félicité Herzog, née en 1968 à Boulogne-Billancourt, est une écrivaine française. Elle est la fille de Maurice Herzog et Marie-Pierre de Cossé-Brissac, fille du douzième duc de Brissac, héritière des aciéries du Creusot. Elle a trois garçons, avec Serge Weinberg. Elle a travaillé à Londres dans un fonds d’investissement, pour devenir, en 2002, chargée de la politique de développement de Publicis; à ce moment, elle a été désignée comme l’un des «50 jeunes loups du capitalisme français» par L’Expansion.
En janvier 2007, elle est nommée directrice du développement d’Areva. Elle initie et conçoit le programme « Bridge the Gap », un projet de transformation « global » destiné à pallier les écarts de ressources autant dans les capacités d’ingénierie que dans les moyens de production industrielle d’Areva.
En juillet 2009, Félicité Herzog devient directrice générale adjointe de Technicatome, une filiale d’Areva, spécialisée dans les réacteurs de recherche. Elle quitte le groupe en 2013. Après avoir été associée d’Ondra Partners, elle est Présidente de la société Apremont conseils depuis janvier 2015. (Source : Le Livre de Poche / Wikipédia / Internet)
Commandez le livre en ligne
Amazon