Le Bureau des Jardins et des Étangs

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En deux mots
Après le décès par noyade de son mari, fournisseur officiel de carpes pour les étangs de l’empereur, sa veuve décide d’honorer une commande et part avec seize carpes. Un beau périple initiatique commence.

Ma note
etoileetoileetoileetoile (j’ai adoré)

Le Bureau des Jardins et des Étangs
Didier Decoin
Éditions Stock
Roman
396 p., 20,50 €
EAN : 9782234074750
Paru en janvier 2017

Où?
Le roman se déroule principalement à l’ouest de l’île de Honshu, dans la région de San’in au Japon. De Shimae on va cheminer vers Heankyō, Hongu et Tsugizakura

Quand?
L’action se situe au XIIe siècle.

Ce qu’en dit l’éditeur
Empire du Japon, époque Heian, XIIe siècle. Être le meilleur pêcheur de carpes, fournisseur des étangs sacrés de la cité impériale, n’empêche pas Katsuro de se noyer. C’est alors à sa jeune veuve, Miyuki, de le remplacer pour porter jusqu’à la capitale les carpes arrachées aux remous de la rivière Kusagawa.
Chaussée de sandales de paille, courbée sous la palanche à laquelle sont suspendus ses viviers à poissons, riche seulement de quelques poignées de riz, Miyuki entreprend un périple de plusieurs centaines de kilomètres à travers forêts et montagnes, passant de temple en maison de rendez-vous, affrontant les orages et les séismes, les attaques de brigands et les trahisons de ses compagnons de route, la cruauté des maquerelles et la fureur des kappa, monstres aquatiques qui jaillissent de l’eau pour dévorer les entrailles des voyageurs. Mais la mémoire des heures éblouissantes vécues avec l’homme qu’elle a tant aimé, et dont elle est certaine qu’il chemine à ses côtés, donnera à Miyuki le pouvoir de surmonter les tribulations les plus insolites, et de rendre tout son prestige au vieux maître du Bureau des Jardins et des Étangs.

Ce que j’en pense
Après Le Maître, le très taoïste roman de Patrick Rambaud, Monsieur Origami, le très artistique et poétique roman de Jean-Marc Ceci, voici Le Bureau du Jardin et des Étangs, le très romantique et parfumé roman japonais de Didier Decoin. Ce délicieux conte initiatique nous fait cheminer dans le Japon du XIIe siècle, dans le sillage de Miyuki qui vient de perdre son mari. Ce dernier était un pêcheur, chargé de fournir les poissons pour les étangs de la cité impériale. «Katsuro ne posait pas de questions. Il était le meilleur pêcheur de carpes de la Kusagawa».
Pour le village tout entier il est essentiel de continuer les livraisons afin de préserver un statut privilégié et pour Miyuki il est tout aussi important de poursuivre l’œuvre de son mari, même si la route jusqu’à la capitale n’est pas aisée à suivre. D’autant qu’elle devra faire la route chargée d’un lourd fardeau. Huit des plus vigoureuses carpes pêchées par Katsuro sont placées dans chacun des deux récipients qu’elle porte, amarrées à une perche.
Le courage et la détermination de Miyuki nous pourront toutefois éviter la perte de la quasi-totalité du précieux bagage. Ce sont à la fois les difficiles conditions topographiques, climatiques et les rencontres qu’elle va faire qui vont entraîner cette hécatombe. Dès lors, faut-il poursuivre la route ? La réponse viendra d’un sage homme qui croisera sa route, lui apportant par la même occasion la preuve qu’il n’y a pas que des personnages mal intentionnés sur sa route : « Il y a toujours du sens à continuer d’agir comme on doit dit Togawa Shinobu, même si l’on croit que cela ne sert plus à rien. Mon désir est de vous aider à prendre conscience de cette vérité. »
Okono Mitsutada, patron d’une barque de pêche, va lui proposer de la renflouer, moyennant un petit service. Elle s’offrira en tant que Yŭjo à un riche client et sera couverte de cadeaux. Miyuki accepte cette proposition non sans crainte, elle qui n’a jamais connu d’autre homme que son mari («quand il est mort nous étions encore en train de nous étonner l’un l’autre») et avait jusque-là refusé de jouer les «empileuses de riz».
Cette expérience va non seulement la transformer, mais révéler à son client le parfum étrange de sa concubine. C’est cet aspect qui va, au-delà des malheureuses carpes, plaire au directeur du Bureau des Jardins et des Étangs. Car en sa qualité de responsable de l’acclimatation des arbres aromatiques, il est le gardien du livre des mille odeurs et entend bien participer aux côtés de l’empereur au concours de compositeur de parfum. Le thème choisi est cette fois l’image d’une demoiselle des brumes franchissant un pont en dos d’âne.
Laissons au lecteur le soin d’imaginer quel rôle jouera Miyuki durant cette épreuve. Toujours est-il qu’elle pourra reprendre le chemin du retour vers son village – toujours autant parsemé d’embûches – enrichie d’expériences nouvelles. Il paraît que « les dieux avaient créé le néant pour persuader les hommes de le combler». Une jeune femme qui semblait traverser «la vie en sautillant d’une ignorance à l’autre» va nous apporter une preuve étincelante qu’il y a bien des manières de conjurer le sort. Et Didier Decoin va, une nouvelle fois, nous enchanter. En nous entraînant, après La pendue de Londres, sur un terrain aussi inattendu qu’éblouissant.

Autres critiques
Babelio
Télérama (Nathalie Crom)
Europe 1 (Le livre du jour – Nicolas Carreau)
La Croix (Jean-Claude Raspiengeas)
RTL (Laissez-vous tenter – Bernard Lehut)
Blog À l’ombre du noyer

Télématin (Olivia de Lamberterie)

Extrait
« Les dieux avaient créé le néant pour persuader les hommes de le combler. Ce n’était pas la présence qui régulait le monde, qui le comblait: c’était le vide, l’absence, le désempli, la disparition. Tout était rien. Le malentendu venait de ce que, depuis le début, on croyait que, vivre, c’était avoir prise sur quelque chose, or il n’en était rien, l’univers était aussi désincarné, subtil et impalpable, que le sillage d’une demoiselle d’entre deux brumes dans le rêve d’un empereur.
Un monde flottant. »

A propos de l’auteur
Né en 1945, Didier Decoin est écrivain et scénariste. Il a vingt ans lorsqu’il publie son premier livre. Celui-ci sera suivi d’une vingtaine de titres, dont Abraham de Brooklyn (prix des Libraires), et John l’Enfer pour lequel, en 1977, il reçoit le prix Goncourt. (Source : Éditions Stock)

Site Wikipédia de l’auteur 

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Le cri du corps mourant

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En deux mots
Une bande de cinq enfants part à la recherche de leur ami qui vient d’être enlevé par un réseau international de truands. Pendant que la police piétine, les gamins font merveille.

Ma note
etoileetoile(bon livre, mais qui ne m’a pas totalement convaincu)

Le cri du corps mourant
Marcel Audiard
Éditions du Cherche-Midi
Thriller
400 p., 17,50 €
EAN : 9782749154145
Paru en février 2017

Où?
Le roman se déroule principalement dans le XVIIIe arrondissement à Paris et dans les environs, à Chatou, Montesson, Saint-Germain-en-Laye, Sartrouville et le Vésinet. La suisse y joue aussi un rôle non négligeable. Les villes de Zurich, Brienz et Interlaken y sont notamment mentionnées.

Quand?
L’action se passe de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
Le Club des Cinq en Bibliothèque noire.
François, dix ans, est kidnappé. Sa sœur Puce, quatorze ans, flanquée de quatre camarades de classe, mène l’enquête en parallèle de la police.
Les ados : collégiens trublions et fouineurs qu’on ne souhaite pas à son pire ennemi. Petit problème avec l’autorité.
Les flics : brouillons et goguenards. Gros problèmes d’autorité.
Les truands : fins de race. Nostalgiques du milieu d’antan. Les zéros sont fatigués et les putes ne sont plus ce qu’elles étaient.
Paris 18e, quatrième personnage de l’histoire. Pérégrinations à flanc de Montmartre.
De l’Audiard troisième génération en Marcel et grand braquet.

Ce que j’en pense
Quand on s’appelle Audiard, qu’on est le petit-fils du grand dialoguiste Michel Audiard et le neveu du réalisateur Jacques Audiard et qu’on choisit de se lancer dans le roman, il faut avoir bien du courage. Car si votre patronyme peut vous ouvrir des portes, il peut aussi être très lourd à porter. Surtout si l’on choisit de tremper sa plume dans un genre proche de celui de ses glorieux aînés. On espère alors des dialogues aussi géniaux que dans les Tontons-flingueurs, une dimension sociale aussi élaborée que dans Dheepan.
Seulement voilà, si dès le titre, l’auteur revendique cette parenté (Le Cri du corps mourant est un clin d’œil au Cri du cormoran le soir au-dessus des jonques réalisé par Michel Audiard), force est de constater que malgré de belles trouvailles, le roman n’est pas à la hauteur de cette ambition.
Cela dit, on s’amuse à suivre cette joyeuse bande d’enfants à la recherche de leur frère et ami qui a subitement disparu du pavé parisien. On se délecte de leur gouaille et de leurs métaphores improbables. On en viendrait presque à oublier le scénario un peu bancal de cette histoire à laquelle il manque une sortie en apothéose.
Mais il est temps de vous présenter la famille Volponi (vous souvenez-vous des frères Volfoni dans les Tontons-flingueurs ?), à commencer par Odile, la mère qui «donnait aussi l’impression d’avoir passé ses dernières vacances à Dachau.» Sa fille n’est guère plus épaisse : «A quatorze ans, Puce donnait l’impression d’en faire onze à peine, du fait d’une constitution squelettique, diaphane. Chez elle, pas de place pour le gras.» La fratrie est constituée de deux frères. «Son frangin François, également de père inconstant, avait dix ans et passait son temps à tester les structures scolaires : il avait déjà acquis suffisamment de connaissances pour rédiger le premier guide à usage des cancres du primaire parisien.» C’est ce dernier qui va être kidnappé par… son père Raoul!
Mais bien vite le lecteur va se rendre compte que ce dernier, alcoolisé plus que de raison – son état habituel – s’est laissé entraîner dans une drôle de combine. Une équipe internationale de truands a fait d’une ancienne clinique du Vésinet un refuge pour leurs enlèvements. Mais si François n’est pas seul à goûter aux joies de la séquestration, il va montrer une belle énergie à pourrir la vie de ses gardiens et même réussir à leur fausser compagnie, tout en laissant à Gertrud, sa garde-chiourme un petit souvenir sanglant.
Alors que la police est avisée, Puce décide de mener elle aussi l’enquête avec ses amis. « Puce s’était entourée d’une cour restreinte de quatre zigues : Louis, Mourad, Blanche et Castille. Facétieux, les parents de Blanche étaient malgaches. Nettement moins facétieux, les parents de Mourad étaient kabyles. Mous, l’aîné de Mourad, était tombé deux ans plus tôt pour trafic de came. Se retrouver à Fleury pour de l’herbe, c’était bien naturel. Les parents de Castille n’étaient pas espagnols, mais parisiens « de souche », particularisme qu’ils revendiquaient dès qu’ils étaient en société. C’est-à-dire, tout le temps. » Le Club des cinq ne va pas tarder à retrouver la trace de François, grillant la politesse à Maarek, Bursky, le commissaire Dubley et l’inspecteur Hamdoni, des enquêteurs qui finiront, après moult tâtonnements, à suivre la trace des ravisseurs.
On passera sur les quelques épisodes annexes, les enlèvements de Emma Stolzberger, celui du Baron Hauptin, sur le cadavre en décomposition découvert dans l’appartement du frère, pour retrouver tous les protagonistes à l’heure du dénouement… qui va quelque peu nous laisser sur notre faim. Il y avait pourtant là de quoi nous offrir un beau feu d’artifice : les flics, les voyous et une bande de gamins intrépides. Peut-être que le prochain opus viendra concrétiser les jolies formules de ce roman aussi noir que cocasse.

Autres critiques
Babelio
Le Point (Julie Malaure)

Page des Libraires (Léa Brissy)
Blog Auprès des livres
Blog Echappée-Littéraire

Présentation vidéo par l’auteur (cherche midi editeur)
Pour vous mettre dans l’ambiance…

Extrait
« Raoul était devenu un point se confondant avec l’horizon depuis de longues années. Depuis que l’alcool était devenu sa compagne numéro un. Fort d’un alcoolisme mondain déjà copieux, Raoul avait passé la surmultipliée quatre ou cinq ans plus tôt, suite à ce qu’il appelait pudiquement un « revers de fortune ». La pudeur, pourtant, n’était pas forcément ce qui le définissait le mieux. On ne l’avait jamais vu hésiter à se balader à poil devant les gamins, aviné et encore chaud d’un des deux exercices hebdomadaires auxquels madame n’avait pas encore mis un terme.
L’alcool restait l’explication officielle pour justifier à fiston le départ de papa. François partageait désormais avec Puce le statut peu enviable d’abandonné de la première heure : son père avait disparu le lendemain de cette fertile nuit d’amour. Un vrai salaud, selon les termes choisis de madame. Comme s’il en existait des faux. »

A propos de l’auteur
Marcel Audiard naît à Paris en 1970. Son père meurt en 1975 dans un accident de voiture, une semaine avant l’anniversaire de ses 26 ans. Bac scientifique en poche, l’auteur intègre médecine. Marié, il est père de trois enfants. Après vingt-cinq ans de médecine, c’est sur un pari perdu qu’il décide d’écrire un roman. Si un verrou familial tacite l’a toujours tenu à bonne distance du cinéma, il ne lui a jamais été interdit de dire n’importe quoi. Ni de l’écrire. (Source : Éditions du Cherche-Midi)

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