La première nuit

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En deux mots:
Trois hommes se retrouvent pour dresser le bilan de leurs vies respectives. Milan retrouve Émilien, son père, et Théo, son fils, pour un huis-clos explosif.

Ma note:
★★★ (bien aimé)

Ma chronique:

Pour le meilleur et pour le père

Unité de lieu et unité de temps : le drame réunissant fils, père et grand-père peut commencer. Sans oublier les coups de théâtre!

Ghislain Loustalot, grand reporter à Paris Match, a choisi un scénario proche du théâtre pour son premier roman. Tout se déroule l’espace d’une nuit dans un studio où vont se réunir Milan, son père Émilien et son fils Théo. Une rencontre aussi imprévue qu’inopportune. Car chacun des protagonistes a des choses à reprocher aux autres, sans doute pour effacer les reproches qu’ils pourraient s’adresser personnellement. Si Milan se retrouve seul, c’est qu’il a une maladie qui ne s’opère pas, il est «totalement inapte au bonheur». Catherine, son épouse, ne le supporte plus et décide le quitter : «Tu vas avoir quarante-cinq ans, tu es encore beau, tu as un métier qui te passionne, des enfants que tu adores et tu gâches tout.»
À ce jeu de massacre participe aussi Émilien qui a oublié qu’un jour, alors que son fils était hospitalisé, il lui avait promis de revenir le lendemain et n’était pas revenu durant «quarante jours de larmes et de cris». Un traumatisme qui aura marqué Milan à vie et qui l’a conduit a renier ce père, à couper les ponts. Pourtant c’est bien lui qui sonne à sa porte muni d’un sac. Il vient de quitter son épouse qui «a fait une crise» et cherche refuge auprès de son fils avec lequel il aimerait «parler un peu».
Si Milan le laisse entrer, c’es tpeu-être parce qu’il culpabilise. Car il se rend compte qu’en quittant sa femme il a aussi quitté ses enfants Théodore, Victoire et Maximilienne. Finis ses beaux rêves de dialogue et de complicité. À moins qu’il ne puisse renouer avec Théo qui s’est lui aussi invité chez son père.
Mais dès les premiers échanges, on se rend compte que les rancunes, les reproches, les griefs de toute sorte prennent largement le pas sur tout dialogue constructif. Aussi, quand tout s’effondre, quand la tension devient forte, il reste l’alcool pour se calmer. Mais il serait illusoire de croire qu’avec quelques verres de whisky les choses vont s’arranger…
Au fur et à mesure que la soirée s’avance, que le taux d’alcoolémie augmente, que les bouteilles de vin prennent le relais des alcools forts, des souvenirs ressurgissent, des vérités jusque là soigneusement enfouies se font jour.
Avec un art consommé du rythme narratif, Ghislain Loustalot fait se frotter et se piquer trois égos. Et s’il suffit d’une étincelle pour mettre le feu, il suffit aussi quelquefois d’un éclair de lucidité, d’une parole sincère pour éteindre l’incendie. Et nous offrir trois histoires pour le prix d’une. Car chacun des protagonistes finira par repartir avec la sienne. Sauf qu’elle sera bien différente de ce qu’il s’imaginait avant ce huis-clos explosif.

La première nuit
Ghislain Loustalot
Éditions JC Lattès
Roman
250 p., 18 €
EAN : 9782709661423
Paru le 10 janvier 2018

Ce qu’en dit l’éditeur
À quarante-cinq ans, Milan est toujours séduisant mais aussi alcoolique, taiseux et destructeur. Son ex-femme a obtenu la garde de leurs trois enfants et sa compagne, Catherine, vient de le quitter.
En ce dimanche soir de découragement dans son appartement blanc immaculé, deux visites surprises vont rebattre les cartes: celle de Théo, son fils, et d’Émilien, son père, tous les deux à la recherche d’un refuge pour la nuit.
La réunion familiale prend alors des allures de poker menteur où se posent les questions dont on craint les réponses, où chacun règle ses comptes et où trois générations d’hommes vont s’affronter, se détruire, et peut-être se sauver.
Une nuit d’alcool, de violences et de larmes, de secrets gardés, d’humour noir et de rancœurs crachées au visage.

Les critiques
Babelio
Publik’Art (Bénédicte de Loriol)
Blog Songe d’une nuit d’été 
Blog La Dory qui lit 
Blog Psych3deslivres 
Romanthé blog littéraire décalé
Blog Le Notebook de Gwen

Les premières pages du livre 
« Il neige dans la bouche grande ouverte de Milan mais rien à voir avec les frais souvenirs de l’enfance, petits gants glacés, courses et glissades. Il neige dans sa bouche mais les flocons tombent de ses dents qui se désagrègent, assèchent sa langue et son palais. Toutes ses dents s’effritent au point qu’il les mâche et cette pâte farineuse a un goût de déjà-vu qui l’horrifie. Il voudrait retrouver cette sensation de la neige qui caresse son visage pour la première fois, il y a longtemps, mais il mastique des grumeaux sur ses gencives déjà cicatrisées. Il se retourne, respire la puanteur de sa sueur alcoolisée sur l’oreiller, s’y abandonne. À présent, la neige attaque ses yeux. Chaque paillette étincelante entache sa vision. Il force le regard, les devine tous en haut, amis, amours, enfants, remplissant son dernier rectangle sombre. Alors c’est maintenant ? Et c’est ainsi ? Il pleure sur sa propre mort. La boucle est bouclée. Il retombe au stade primal d’une vie qui n’aura été ni douce ni légère, s’abandonne comme au jour oublié de sa naissance mais quelqu’un l’agrippe et il scrute pour savoir quelle main pourrait l’emporter plus loin encore de ce monde qui tournera sans lui. Il tente de hurler mais il geint. On le secoue encore et le monde redevient ce qu’il était. Sombre d’abord et puis de moins en moins. Il s’extrait du cauchemar parce qu’il la voit de ses yeux vrillés d’émail. Il passe la langue sur ses dents : il n’est ni édenté ni mort, mais il devine que là, tout de suite, il va le regretter, parce qu’il se souvient.
Ils sont rentrés au petit matin. Ils ont dormi dos à dos dans le canapé-lit. Il a voulu la prendre dans ses bras, lui faire l’amour, elle l’a repoussé avec ses pieds. Que s’était-il passé avant ? Que se passe-t-il depuis toujours ? Tant de choses mauvaises. Rien d’autre. Il repasse la langue sur ses dents. Catherine le secoue et il mesure qu’il va devoir affronter la réalité. Tout ce qu’il détruit.
— Ça suffit Milan. Arrête de faire semblant, réveille-toi maintenant.
Il la dévisage dans la pénombre du studio. Elle a mis son manteau bleu ciel, léger comme l’air. Elle a les cheveux mouillés et bouclés de la douche. Elle est belle. Il est trempé de sueur et il a soif.
— Milan, tu m’entends, j’ai bien réfléchi, c’est fini, je m’en vais.
Il ferme les yeux, comme s’il pouvait se sauver, oublier ce qu’il vient de comprendre et que cela le condamne, mais il n’y parvient pas. Il sait que les secondes gagnées n’y feront rien. On ne peut tout repousser indéfiniment. Tout a une fin. Il se lève en se demandant à quel moment elle a réfléchi et pourquoi les femmes réfléchissent toujours seules pendant que les hommes sont encore endormis. Il remarque des traces de vomi blanchâtres sur son épaule. Et un peu de sang. Il titube, replie le canapé sans faire le lit, jette les coussins rouge vif à leur place, tapote vaguement l’ensemble, il s’en fout, il se dégoûte de sa cruauté envers elle qui paie pour tout et pour toutes les autres alors qu’elle ignore même le sens du mot méchanceté. Il replace la table basse transparente devant le canapé. Elle s’assoit sans lâcher sa valise. Il ramasse l’énorme cendrier de verre rouge, le pose le plus doucement possible sur la table basse au lieu de le fracasser contre le mur. Elle a fait sa valise. Elle se tourne vers lui, se fige. Il passe encore la langue sur ses dents, affronte comme il peut son regard doux et sombre.
Milan part dans la cuisine. Un café, capsule noire, serré. Il étanche sa soif au robinet. L’eau est tiède. Il allume une première cigarette avant que le café n’ait fini de couler. La peur lui tord le ventre. Il scrute les quatre pendules au mur, au-dessus de l’évier. Los Angeles, New York, inutiles… Paris : 6 h 30. Tokyo aucun intérêt. Il se retourne, appuie sur l’interrupteur du volet électrique de la cuisine. Le soleil qui tape encore sur les fenêtres de l’immeuble d’en face, lui écarquille les yeux. 18 h 30 donc. Il est en caleçon rose et en T-shirt kaki sur lequel est écrit : « I don’t discriminate, I hate everybody. » Il a envie de vomir. Elle va partir. Il va la perdre.
Il avale son café brûlant, écrase sa cigarette dans la tasse, revient au salon, ne remonte le volet de la baie vitrée qu’à moitié, passe devant Catherine qui fixe le mur d’en face baigné de soleil à moitié. Il ouvre un placard intégré au mur de l’entrée, attrape une chemise blanche suspendue, arrache un jean propre. »

À propos de l’auteur
Ghislain Loustalot, 58 ans, a été rédacteur en chef à VSD puis directeur de la rédaction des magazines Dépêche Mode et Première. Il est actuellement grand reporter à Paris Match. Auteur de Mon grand-père a fait l’Amérique aux éditions Lattès (1994), La première nuit est son premier roman. (Source : Éditions JC Lattès)

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Celui qui disait non

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coup_de_coeur

En deux mots:
Il faut regarder avec attention la couverture de ce livre, car l’auteur retrace le destin de l’ouvrier qui, en 1936, refuse de faire le salut hitlérien sur un quai de Hambourg. Il s’appelait August Landmesser.

Ma note:
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique:

L’histoire d’un héros ordinaire

Il aura fallu un concours de circonstances assez exceptionnel pour retrouver le nom d’un homme sur une photo et donner ainsi à Adeline Baldacchino le sujet de son premier roman.

Les réseaux sociaux ont indéniablement quelques avantages. Quand, par exemple, une photo est partagée des milliers de fois, et qu’elle finit par intriguer et intéresser. On se souvient d’Isabelle Monnin avec Les Gens dans l’enveloppe, qui était partie à la recherche des personnes figurant sur un jeu de photos achetées dans une brocante et qui avait fini par les trouver.
Cette fois, il s’agit du cliché reproduit en couverture du livre et qui montre des dizaines de personnes faisant le salut nazi, sauf un.
En 2012, Marie Simon a raconté dans L’Express comment, grâce à un message posté au Japon sur Facebook pour illustrer la volonté de dire non – en l’occurrence à une catastrophe nucléaire – le monde entier avait pu faire la connaissance d’Auguste Landmesser. Quelques vingt années auparavant, c’est sa fille Irene qui avait reconnu son père sur la phto publiée par un quotidien allemand. « Depuis quelques années déjà, elle rassemble des documents sur le destin de ses proches. Elle en a même fait un livre, publié en 1996, dans lequel elle raconte l’histoire de sa famille « déchirée par l’Allemagne nazie ».»
C’est ce livre que la narratrice a dans ses bagages, lorsqu’elle débarque à Hambourg en avril 2017, « un long fichier, un seul, qui rassemble l’essentiel de ce que l’on sait d’August et d’Irma, de leurs filles, Ingrid et Irene, de la grand-mère Friederike, du grand-père Arthur et de quelques autres. Des documents d’archives, aussi secs que le sont tous les papiers officiels. Tout est là. Ou presque. Car ce n’est que le squelette de tout. Ce qui est arrivé. Ce qui fut consigné. Les dates, les lieux, les noms : une chronologie. La vérité crue, brutale et nette, sans artifices ni sentiments. Deux cent cinquante pages d’actes et de fac-similés, quelques lettres, un sommaire qui ressemble à celui d’une dissertation d’histoire. » Un document qui doit ressembler au livre que vient de publier Colombe Schneck, Les Guerres de mon père, livrant lui aussi quelques documents bruts qui sont le fruit de ses recherches. Mais le projet d’Adeline Baldacchino n’est pas celui d’une historienne, mais d’une romancière qui entend traquer la chair. « Ce que nous disent les regards, ce que nous dérobent les actes administratifs. La pulpe du réel. C’est elle que je ne retrouverai qu’au prix de l’invention. Tout sera vrai, tout est déjà vrai puisque tout est arrivé. Je sais les tribunaux, les prisons, les camps. Je sais la dernière balle et même le plan détaillé de la chambre à gaz de Bernburg. Je sais qui est devenu quoi, je sais qui a emprunté quelle impasse de l’Histoire. Je sais les dates, les lieux. Je sais le bruit de cymbales du dénouement. Le flot des larmes et les jambes qui flanchent en lisant. Le reste, je le devinerai. Donc, je l’écrirai. »
Un choix juste, un choix vrai. De ceux qui donnent cette indicible épaisseur au récit, qui permet de faire se fusionner les sentiments, les époques, les émotions. Car si la narratrice est à Hambourg, c’est aussi pour essayer de faire le deuil de son père, oarti neuf mois plus tôt. « Je crois que j’écris aussi pour te crier que je t’aime et n’ai jamais su te le dire assez. Je ne connais pas d’autre moyen de te le prouver que d’écrire un livre et d’y glisser ton nom. »
Nous voici donc en octobre 1934, au moment où August rencontre Irma. « C’était l’automne à Hambourg. Des feuilles mortes voletaient dans les rues trop larges pour les âmes solitaires. Elle était allée s’asseoir au jardin botanique, Planten und Blomen, près du petit canal aménagé qui le traversait, sous un saule pleureur dont elle avait fait un ami. (…) Ce jour-là, sa robe était blanc et noir. Elle avait emprunté à sa mère un petit châle de laine. Le livre venait de retomber sur ses genoux. Je crois bien qu’elle s’était assoupie, vaguement ivre dans l’odeur d’écorce et de colchiques. August cherchait un endroit pour faire la sieste. C’était l’automne, certes, mais l’une des dernières belles journées de l’année. Il avait repéré l’arbre et son ombre prometteuse. Il venait de pénétrer sous le rideau protecteur de sa ramure, quand il était tombé en arrêt, n’osant plus ni continuer ni se retirer.
August ne sait rien alors du début de la longue marche des communistes en Chine du Nord. Rien du vol du premier bombardier soviétique à grande vitesse, le Tupolev SB1. Rien de l’appel de Maurice Thorez à fonder le Front populaire en France. Tout cela se passe en octobre 1934. Tout cela, mais encore ce bruissement de feuilles sous un saule au bord du canal, une femme avec un livre ouvert au bout de ses doigts qui attirent la lumière. Elle pourrait lire, mais elle dort. Et c’est parce qu’elle sommeille qu’il peut regarder longtemps les commissures de ses lèvres, l’angle de son nez, la forme de ses sourcils, la blancheur de son front, les racines de sa chevelure noire et souple. Il peut détailler tout cela. Ses paumes ouvertes, abandonnées, il sait qu’il va les saisir et les retenir, qu’elles vont le caresser et l’épouser. Ce jour-là, August, grand bonhomme un peu gauche qui adhère au parti nazi depuis trois ans, a complètement oublié la politique. Il sait que son désir est charnel, mais aussi pur et puissant que la sève du saule. C’est quand il hésite à la réveiller, se demandant s’il doit s’asseoir là, lui aussi, et la contempler sans fin, qu’une rafale un peu brusque expédie une bouffée odorante dans les narines d’Irma. Crocus et camélias, des fleurs aux noms qui claqueraient dans la mémoire. Ou bien la feuille à peine détachée, jaune encore et rougissante, qui lui effleure la pommette. Elle s’éveille, Irma, et il est là. »
Une longue citation pour dire qu’il n’est guère nécessaire d’en dire plus. Vous découvrirez combien ce bel amour va se transformer en un défi fou. Car Irma est juive et que des lois absurdes «pour la protection du sang» interdisent non seulement leur union, mais aussi toute descendance. Sur ce quai de Hambourg, au moment de cette photo désormais célèbre, August disait non à Hitler, mais il disait surtout oui à Irma. Longtemps, il pensera que la force de leur amour aura raison de la stupidité des hommes. Que cet amour protégera aussi les deux filles qui vont naître. Et quand il se rendra compte que le pays est subitement devenu fou, il sera trop tard. En 1937, on peut arrêter un membre du parti nazi pour «souillure raciale» et l’envoyer en camp de travail et à la mort. Et on ne va pas tarder à expérimenter la solution finale sur ses propres ressortissants. Irma sera de l’un des premiers contingents pour Ravensbrück.
Ce premier roman est un hommage, mais aussi un cri. Qui résonne d’autant plus fort en nous qu’il est soutenu par une plume magnifique : «Les écrivains n’ont qu’une passion : ressusciter les morts en les racontant, retenir les vivants en les répertoriant. Ce goût de pâquerette sur les cendres. Quand les mots s’écoulent de l’âme comme du sang frais, c’est bon signe. Et je saigne. »

Celui qui disait non
Adeline Baldacchino
Éditions Fayard
Roman
200 p., 17 €
EAN : 9782213705941
Paru le 10 janvier 2018

Où?
Le roman se déroule en Allemagne, principalement à Hambourg, mais aussi dans sur les routes allant vers le Danemark et celles conduisant aux camps de la mort de Ravensbrück, Dachau, Bergen-Belsen, Buchenwald et Auschwitz.

Quand?
L’action se situe dans les années 1930-1940 ainsi qu’en 2017.

Ce qu’en dit l’éditeur
Celui qui disait non s’appelle August Landmesser. Le 13 juin 1936, le jeune ouvrier qui fut pourtant brièvement membre du parti nazi refuse de lever le bras pour faire le salut hitlérien sur le quai de Hambourg où le chancelier vient baptiser un navire-école. Ce qu’il ne sait pas alors, c’est qu’il est pris en photo : cette image ne resurgira qu’en 1991 et sera reconnue par ses deux filles survivantes.
Ce livre se présente comme un roman vrai, librement inspiré de faits réels. Il reconstitue le parcours d’un homme ordinaire que rien ne vouait à devenir une icône de l’insoumission. Il raconte surtout l’histoire d’amour avec Irma Eckler qui transforma son destin. Frappé de plein fouet par les lois de Nuremberg qui interdisent en 1935 les mariages mixtes, le couple ne pourra ni s’unir ni s’aimer. Arrêté en 1937 pour « souillure raciale », envoyé en 1938 dans les camps de travail de l’Emsland, finalement enrôlé pour servir de chair à canon sur le front de l’Est en 1944, August connaîtra à peine ses filles.
De son côté, Irma Eckler, déportée de prison en forteresse, de camp en clinique d’euthanasie, fera partie du premier contingent des gazées de Ravensbrück. Leur petite Irene, sans accent et sans espoir, subira les pires sévices lors de la nuit de cristal. Miraculée de l’Histoire, elle traversera la Seconde Guerre mondiale grâce à une improbable conjuration des justes.
La narratrice, elle-même perdue dans les méandres de la mémoire et lancée dans une quête du père trop tôt disparu, part à la poursuite de ces deux amants magnifiques. Pour comprendre comment la politique rattrape toujours ceux qui croyaient pouvoir lui échapper. Pour nier la cendre et raviver la braise. Pour raconter l’irracontable – jusqu’au dernier seuil, celui où les mésanges chantent encore tandis que des femmes nues entrent dans la mort.

68 premières fois
Blog motspourmots.fr (Nicole Grundlinger)
Blog du petit carré jaune (Sabine Faulmeyer)

Les autres critiques:
Babelio
La Revue civique (Marc Knobel)
Froggy’s Delight (Jean-Louis Zuccolini)
Blog Encres vagabondes (Nadine Dutier)
Blog Les mots de Gwen 


Adeline Baldachino présente Celui qui disait non © Production Librairie Mollat

Les premières pages du livre 
« Avant d’arriver sur ce port, il t’était arrivé quelques bricoles, August. Et d’abord la bricole de ta vie, la seule qui vaille la peine de naître : la bricole du grand amour. Il faut croire que ça rend courageux, et je le crois dur comme fer, comme croix de fer nazie, comme le fer d’un éperon de cavalier de la Wehrmacht – ou serait-ce de l’Apocalypse ? La bricole du grand amour t’avait un peu ouvert les yeux, sinon tu aurais fini comme les autres. Au bord d’une fosse, à fusiller des Juifs.
Oui mais voilà, tu l’avais trop aimée, ton Irma, tu la voulais nue dans les herbes au bord de l’Elbe, tu la voulais épanouie sous tes mains rudes qui soulevaient sa jupe en riant, tu la voulais pleine de tes enfants, tu la voulais comme on veut les fruits qu’on nous interdit, le rouge de ses lèvres couleur de cerise mûre et sa voix qui coulait au creux de ton oreille, tu te gorgeais d’elle, tu te désaltérais dans ses creux, tu n’aurais plus jamais soif, enfin tu le croyais, ça te suffisait de le croire. Et pourtant on voulait t’envoyer là-bas, au bord des fosses, pour tuer des Irma par milliers.
Avant d’arriver sur ce port, il t’était arrivé quelques bricoles, August, rien de très important aux yeux de la grande Histoire, mais c’est dans la petite que se nichent les vraies raisons de vivre ou de mourir, de résister ou de céder, de saluer Hitler ou de ne pas.

16 avril 2017
Prologue, Hafen Hamburg
Le navire à roue à aubes Louisiana Star, tout de blanc et de bleu vêtu, donnerait presque des airs de Mississippi au gros fleuve gris. Une autre embarcation, plus rapide, affiche en lettres d’or sur fond bleu marine le nom d’Aladdin : sans doute une publicité pour quelque comédie musicale. Sur la rive d’en face, j’aperçois des immeubles dont la fonction reste difficile à définir – entrepôts, vastes citernes, un ou deux théâtres. Sous ma fenêtre, c’est un défilé permanent de bus jaunes et rouges des Stadtrundfahrt qui embarquent les visiteurs pressés ou paresseux par douzaines.
Vers la gauche, si l’on tend un peu le cou, se détache sur le fond moiré du ciel la silhouette d’un grand trois-mâts, le Cap San Diego. Hier soir, de la musique brésilienne s’en échappait par toutes les écoutilles. On le visite comme un immense joujou, les jeunes mariés le louent pour le transformer en bercail de luxe et les entreprises pour y organiser des soirées corporate de teambuilding.
Plus loin encore, je distingue le profil de la nouvelle salle de concerts, l’Elbphilharmonie, ses voiles de métal et de verre posées sur un bloc de brique rouge, tout en courbes confondantes qui viennent de révolutionner le paysage portuaire. Quelque chose me dit qu’August et Irma auraient pris peur devant elles comme s’il s’était agi d’un vaisseau spatial tombé d’une lointaine planète.
J’appareille vers le passé en observant le futur. Le temps me joue déjà des tours. Qui demeure sensible aux correspondances et aux coïncidences, aux résonances et aux traces, aux replis de la mémoire et de l’Histoire, ne peut que se perdre en ses labyrinthes. Je voudrais une errance heureuse. Mais il en est des voyages comme des livres : certains sont nés de la joie et d’autres servent à tenter de l’atteindre quand elle vous échappe. Je suis partie pour cesser de fuir. Je ne suis pas partie, je suis allée. Vers August et vers Irma. Vers mon père aussi, sans doute. Parce qu’ils ne sont plus là. Parce que je ne les trouverai pas. Et que, à force de ne pas les trouver, il me faudra bien apprendre à les réinventer.
Si je ferme les yeux, je vois cette photographie. Je ne cesserai plus de la voir. Je la porte, comme une greffe à l’âme, une sorte de fétiche lové dans les replis nébuleux de la mémoire. »

Extraits
« Celui qui disait non se demande ce qui reste quand on a tout perdu. Le formule-t-il ainsi ? Agenouillé derrière un rocher, l’épaule collée contre la pierre, son arme appuyée sur le bras, il fixe le rayon de soleil qui vient de transpercer la couverture nuageuse. Le serpent jaune effleure un buisson, promène sa lumière entre les baies rouges de l’arbuste qu’il semble fouiller.
On aurait presque envie de tendre la main pour l’attraper, pour palper cette promesse de chaleur et de réconfort, mais il sait que ce serait la mort certaine. Les partisans sont à quelques centaines de mètres, dissimulés derrière d’autres éboulis. Un coup de feu éclate à sa droite. En face, ils ripostent. Il se serre un peu plus contre son rocher. Quelque part, une balle ricoche et détache quelques éclats de calcaire d’un bloc tout près de lui. Le souffle l’a fait sursauter.
Sa mémoire est aussi érodée que le lit de la rivière en contrebas. L’odeur de poudre lui chatouille les narines. Il se dit je suis vivant pourtant mais combien d’heures encore, combien de secondes avant que je ressemble à ce caillou, les ronces l’enlacent, et qui m’embrassera, moi, qui me fermera les yeux, qui dira mon nom à mes filles, qui leur racontera l’odeur de la peau d’Irma le jour de ses vingt-trois ans sur la plage de Blankenese, qui se souviendra? »

« Et j’avais vu Dachau, Bergen-Belsen et Buchenwald, vu Auschwitz et pleuré dans la lumière du crépuscule, quand j’essayais encore de comprendre comment il était encore permis d’écrire de la poésie, comment il fallait justement en écrire parce que prier, non, ce n’était plus possible – qui voulez-vous prier : celui qui ne répondit jamais quand on le suppliait dans les chambres à gaz? »

« J’écris, sidérée d’écrire encore, comme si je ne savais pas que l’écriture ne sauvait de rien. J’écris ces lignes, alors que mon père s’est endormi il y a neuf mois tout juste – c’était un 16 juillet. Même s’il est des sommeils dont on ne s’éveille plus. J’écris, dans un semi-brouillard d’automatisme où je confonds les époques et les tendresses. Je me mets à aimer August comme s’il était encore temps de te raconter une histoire avant que tu ne glisses dans la nuit. Regarde, je commence à confondre ceux que j’interpelle. Est-ce à toi, papa, ou à lui, August, que je dis tu? »

« Irma, trempée de la belle sueur des amantes, se souvient. De sa rencontre avec August en octobre 1934. Et je veux me souvenir pour elle. Il n’y a rien de plus difficile à raconter pourtant que la naissance d’un amour.
Ingrid est née le 29 octobre de la même année. Un an tout juste après leur rencontre. »

« Nombre de ses camarades, peut-être des amis d’enfance, en tous cas les adolescents qu’il dut croiser au parti nazi dans les années 1930, rejoindront le service actif, notamment le 101e bataillon de police de réserve allemande, au sujet duquel l’historien Christopher Browning écrirait un jour un livre indispensable pour comprendre comment l’on devient un tueur. En seize mois, moins de cinq cents hommes qui étaient de simples ouvriers, dockers, membres de la classe moyenne de Hambourg, ni particulièrement militants ni fanatiquement racistes au départ, allaient assassiner trente-huit mille Juifs et en transporter quarante-cinq mille autres vers les chambres à gaz. Faire ramper des vieillards vers leur tombe. Tirer sur des bébés lancés en l’air pour déconcentrer la mère qu’un autre assassin visait pendant ce temps. Patauger dans le sang et la cervelle. Fêter des massacres sans nom. Boire plus que de raison pour ne plus comprendre ce qu’ils fêtaient. Tout cela, qui n’a rien de métaphorique ou d’imaginaire. Tout cela, décrit et documenté, implacablement, par les historiens. Tout cela, qu’on croit tellement savoir qu’on finit par en oublier la réalité même. »

« En raison d’une violation particulièrement grave et sérieuse de la loi pour la protection du sang, August Landmesser, 28 ans, était appelé cet après-midi devant la cour criminelle de Hambourg. Pendant des années, Landmesser a eu une relation avec une Juive dont ila eu deux enfants. Leur relation ayant continué après la promulgation des lois de Nuremberg, Landmesser a été arrêté à l’été 1937, mais acquitté après dix mois de détention provisoire pour des raisons subjectives. À cette occasion, il lui a été fermement rappelé que toute relation avec une Juive était interdite et il lui a été clairement exprimé que, en cas de répétition de la faute, il devrait s’attendre à une condamnation à plusieurs années de prison. Néanmoins, Landmesser a recommencé à entretenir des relations avec cette femme […]. Le verdict a été de deux ans et demi de servitude pénale pour souillure de la race. » Extrait d’un journal allemand, mercredi 26 octobre 1938

À propos de l’auteur
Adeline Baldacchino mène une double vie de poète et de magistrat. En plus de nombreux recueils de poésie, elle a notamment publié en 2013 une biographie primée et très remarquée de l’écrivain, journaliste et résistant Max-Pol Fouchet et en 2015 un texte d’analyse critique sur l’ENA. Celui qui disait non est son premier roman. (Source: Éditions Fayard)

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Les guerres de mon père

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En deux mots:
C’est à une véritable enquête que se livre Colombe Schneck dans ce roman consacré à son père. Témoignages et archives mettent à jour des vérités occultées durant un quart de siècle.

Ma note:
★★★ (bien aimé)

Ma chronique:

La gloire de mon père

Colombe Schneck est partie sur la trace d’un père qui avait pris soin d’occulter son passé. Pour lui rendre hommage et pour l’Histoire.

« Il m’a fallu vingt-cinq ans pour être capable d’affronter ce qu’il cachait. Il avait honte et nous avions honte, il était coupable et nous étions coupables, il manquait quelque chose, je ne savais pas quoi, ma seule certitude d’enfance était que son amour était aussi indéfectible qu’irremplaçable.
J’ai cherché de manière absurde, partout, son amour et son passé.
Conversations oubliées, notes perdues, dossiers administratifs, archives publiques. »
La confession qui ouvre le nouveau livre de Colombe Schneck nous livre aussi le mode d’emploi de la romancière. Ce n’est en effet pas uniquement avec ses souvenirs et les témoignages de la famille et des proches, mais aussi en généalogiste et en archiviste qu’elle est partie à la recherche du véritable visage d’un homme qui offrait à sa progéniture « un amour sans limites. Seules semblaient compter pour lui la beauté et la bonté. Il était prêt à nous laisser sans armes, dans l’illusion. Il suffisait de fermer les yeux. Nous étions des exilés sans mémoire s’accrochant aux joies du présent. » À l’image de cette photo de vacances sur le bandeau de couverture où Colombe trône sur ses épaules. Une joie de vivre et une insouciance qui ne sont pas feintes, mais qui sont nées d’un passé qu’il cherchait à oublier, à occulter.
La vérité, c’est qu’il « avait survécu aux destructions et aux rafles, aux morts injustes et à la torture, aux terreurs, à l’humiliation et à la peur, à la honte, à l’exil, à la perte encore; il avait été confronté, enfant, adolescent, jeune homme, à la violence et l’inhumanité. Face aux guerres, il avait construit un état de résistance, refusant l’amertume et la désolation, la plainte et la tristesse, la nostalgie. Il venait de pays qui ont disparu et dont il subsiste si peu de traces. Il était facile de nous faire croire qu’ »avant n’existe pas »».
Voilà donc la généalogiste remontant l’arbre généalogique – qu’elle a eu la bonne idée de reproduire au début du livre – pour essayer de mieux comprendre qui sont les personnages rencontrés au fil de cette enquête.

SCHNECK_arbre_genealogique
À la première génération, celle de ses parents, on imagine ce que le romanesque d’une histoire proche du Jules et Jim de Henri-Pierre Roché a pu être accompagné de frustrations et de non-dits, même si l’arrangement entre les deux amis se partageant la même femme semblait avoir eu l’assentiment de la grand-mère parternelle et de son second mari. Voici donc Pierre présentant son épouse Hélène à son ami Gilbert. Ce dernier, le père de Colombe, tombe immédiatement amoureux d’elle et finira par l’épouser. Le couple aura trois enfants, Antoine, Colombe et Marine.
Avant de revenir à Gilbert, qui est le personnage central de ce livre, remontant une génération de plus,celle des grands-parents. Cette fois, on se rapproche du Romain Gary de La Promesse de l’aube avec Majer, L’increvable Monsieur Schneck, et Paula: « Paula Hercovitz, la mère de Gilbert, ma grand-mère paternelle, est née à Bistriţa le 14 juillet 1909, une petite ville de la Transylvanie hongroise. Le père de Paula, comme 138 juifs de Bistriţa, s’engage en 1914 dans l’armée hongroise, il est tué en 1915. À sept ans, Paula est orpheline de père. Par le traité du Trianon, la Transylvanie devient roumaine. À l’âge de dix ans, Paula la petite Hongroise change de nationalité, de langue. Elle parle allemand, yiddish et hongrois, elle doit apprendre le roumain et une nouvelle forme d’antisémitisme, le modèle hongrois est plus feutré, presque invisible, l’antisémitisme roumain est lui violent, visible, physique. En 1922, la famille Hercovitz fuit vers la France. Qui est-on, quand on apprend dès l’enfance que rien ne reste? Qu’il faut toujours être prêt à tout perdre, même sa langue maternelle? Rien, même les murs d’une maison, une liste de camarades de classe, des habitudes, des goûts, rien ne tient. À Strasbourg, Paula devenue Paulette a suivi un cours de secrétariat ainsi qu’une école ménagère tandis que Majer, devenu Max devient voyageur de commerce pour un grossiste en porcelaine et cristal.
C’est dans cette France qui n’a pas encore pris la juste mesure des périls qui montent que naît Gilbert. Le petit garçon va très vite comprendre que le principe d’incertitude est durablement ancré dans la famille et, lié à ce dernier, le besoin de fuir, de chercher un abri ailleurs. Un atavisme qui lui suivra du reste jusqu’en Algérie.
C’est alors à l’archiviste de prendre le relais, de rechercher dans les administrations les documents et les noms des acteurs qui sont alors intervenus pour aider ou au contraire pour nuire à la famille. Si certains lecteurs seront rebutés par la transcription brute de ces dossiers, lettres et fichiers, on sent combien le devoir de mémoire l’emporte ici sur le souci d’écriture. Et ce qu’elle trouve est édifiant, met quelquefois du baume au cœur sur des blessures encore vives ou ravive le chagrin et la colère. Faisons ici le choix de citer les Justes, ces personnes qui ont rendu possible la survie de Gilbert et, par voie de conséquence, rendu possible la naissance de l’auteur. Merci à Charles Schmitt, directeur de l’école communale de Nontron, merci à Marguerite Eberentz, du réseau de Résistance de la préfecture de Périgueux et merci aux anonymes habitants de Trélissac.
Grâce à eux, Colombe peut rendre hommage à son père et, se faisant, ajouter à son travail d’archiviste et de généalogiste, celui d’historienne.

Les guerres de mon père
Colombe Schneck
Éditions Stock
Roman
306 p., 20,50 €
EAN : 9782234081833
Paru le 3 janvier 2018

Ce qu’en dit l’éditeur
« Quand j’évoque mon père devant ses proches, bientôt trente ans après sa mort, ils sourient toujours, un sourire reconnaissant pour sa générosité. Il répétait, il ne faut laisser que des bons souvenirs. Il disait aussi, on ne parle pas des choses qui fâchent. À le voir vivre, on ne pouvait rien deviner des guerres qu’il avait traversées. J’ai découvert ce qu’il cachait, la violence, l’exil, les destructions et la honte, j’ai compris que sa manière d’être était un état de survie et de résistance.
Quand je regarde cette photo en couverture de ce livre, moi à l’âge de deux ans sur les épaules de mon père, je vois l’arrogance de mon regard d’enfant, son amour était immortel. Sa mort à la sortie de l’adolescence m’a laissée dans un état
de grande solitude. En écrivant, en enquêtant dans les archives, pour comprendre
ce que mon père fuyait, je me suis avouée, pour la première fois, que nous n’étions pas coupables de nos errances en tout genre et que, peut-être, je pouvais accepter d’être aimée. »

Les critiques
Babelio
Télérama 
La Croix (Jeanne Ferney)
RTL (émission Laissez-vous tenter – Bernard Lehut)
Le Temps (Salomé Kiner)
La Vie (Anne Berthod)
Blog Tu vas t’abîmer les yeux
Blog Les lectures d’Antigone 
Blog T Livres T Arts 


Colombe Schneck présente son ouvrage Les guerres de mon père © Production Librairie Mollat

Les premières pages du livre 
« En souvenir de Gilbert Schneck et de Pierre Pachet
Si vous l’aviez connu, vous n’auriez rien pu deviner, son regard était toujours doux, souriant. À ses côtés, on se sentait aimé. Mon père voulait savoir ce qu’il pouvait faire pour vous. Comment vous aider. Quel était votre désir.
Guettant la moindre grimace, le plus infime souffle de contrariété auquel il répondait :
– Cœur qui soupire n’a pas ce qu’il désire.
Alors, il partait en quête de ce qui pourrait vous soulager.
Le passé n’existait pas, seul le présent comptait.
Il répétait:
– Il ne faut offrir que de bons souvenirs.
Ou encore:
– Ne parlons pas de choses qui fâchent.
Il avait survécu aux destructions et aux rafles, aux morts injustes et à la torture, aux terreurs, à l’humiliation et à la peur, à la honte, à l’exil, à la perte encore; il avait été confronté, enfant, adolescent, jeune homme, à la violence et l’inhumanité.
Face aux guerres, il avait construit un état de résistance, refusant l’amertume et la désolation, la plainte et la tristesse, la nostalgie. Il venait de pays qui ont disparu et dont il subsiste si peu de traces. Il était facile de nous faire croire qu’« avant n’existe pas ».
Mon père nous offrait un pull-over en laine vieux rose, des lieder de Schubert chantés par Kathleen Ferrier, un paysage vert de Dordogne, un amour sans limites. Seules semblaient compter pour lui la beauté et la bonté. Il était prêt à nous laisser sans armes, dans l’illusion. Il suffisait de fermer les yeux.
Nous étions des exilés sans mémoire s’accrochant aux joies du présent.
Il est mort il y a si longtemps. Il m’a fallu vingt-cinq ans pour être capable d’affronter ce qu’il cachait. Il avait honte et nous avions honte, il était coupable et nous étions coupables, il manquait quelque chose, je ne savais pas quoi, ma seule certitude d’enfance était que son amour était aussi indéfectible qu’irremplaçable.
J’ai cherché de manière absurde, partout, son amour et son passé.
Conversations oubliées, notes perdues, dossiers administratifs, archives publiques.
En France, l’administration conserve tout et je me suis longtemps demandé la raison de cette obsession conservatrice. J’ai fini par la comprendre et l’admirer.
Alors que nos souvenirs sont des mensonges, nos passés au mieux flous, quand ils ne sont pas transformés, les archives offrent de minuscules assises. Je ne sais rien et cela est si facile, il suffit de prendre le métro, de tendre sa carte d’identité, de remplir une demande et un dossier, alors apparaissent un nom, une date, une lettre, des photos, une clarté.
Grâce à ces archives, je me suis avoué, pour la première fois, que ni mon père ni moi n’étions coupables de nos errances en tout genre, et que, peut-être, je pouvais accepter d’être aimée. »

Extraits
« Majer Schneck, mon grand-père, est né à Sanok en 1902.
Sanok est alors une ville du royaume de Galicie appartenant à l’Empire austro-hongrois, devenue polonaise par le traité de Brest-Litovsk en 1918, après avoir failli être rattachée à l’Ukraine. Elle est aujourd’hui située au sud-est de la Pologne, non loin de la frontière avec la Slovaquie.
Ses parents sont commerçants, sa mère est hongroise, son père, polonais.
Majer est un garçon long et mince, inquiet, blond, aux yeux bleus, agile, qui dès l’âge de douze ans accompagne son père en Bohême, en Moravie, en Bessarabie, pour acheter porcelaines et verres, qu’ils revendront dans le magasin de Sanok.
Il possède un talent, la séduction. »

« Les parents de Gilbert, avant de se nommer Max et Paulette, avaient pour prénoms Majer et Paula. Ils avaient émigré de pays qui n’existent plus, la Transylvanie hongroise, la Galicie polonaise, la Bessarabie russe. Ils n’avaient pas fait d’études, mais ils parlaient à eux deux sept langues couramment, l’allemand, le hongrois, le russe, le roumain, le yiddish, le polonais et le français. L’allemand était la langue de l’administration, le hongrois, celle de l’école, le roumain, pour ma grand-mère, la langue de l’occupant, le russe, la langue du commerce, le yiddish, la langue de la cuisine et de l’amour, et le français, celle dans laquelle ils avaient élevé leur fils. »

« Il l’avait rencontrée en premier, à la fin des années 60, l’avait présentée à mon père qui en était tombé très amoureux. Le problème est que Gilbert était marié à la belle Hélène, qu’il était le père d’un petit garçon et qu’une fille venait de naître (moi).
Comment faire avec l’amour?
Pierre a bien voulu me raconter une histoire que je connaissais déjà, leur arrangement à tous les trois. Lui, sa sœur Hélène (ma mère), son ami Gilbert (mon père).
Ils s’étaient retrouvés en Tunisie, à Sidi Bou Saïd, en 1960 pour le négocier.
Pierre et Gilbert étaient en permission. Ils finissaient leur service militaire en Algérie. Mon père dans le Constantinois comme médecin. Pierre à la troupe. Hélène venait rendre visite à Gilbert dont elle était tombée amoureuse, dans une colonie de vacances des Étudiants juifs de France à Saint-Cast, six ans auparavant, se jurant qu’elle l’aurait un jour, qu’il finirait par se lasser de toutes les autres et qu’il l’aimerait, elle.
L’amour était un combat, pensait-elle.
Lui était amoureux de plusieurs filles en même temps, refusant de choisir. Il était enthousiaste, admiratif davantage que leur beauté, leur rondeur, c’était leur vitalité, la manière dont chacune s’en était sortie. Elles avaient toutes été des enfants cachées pendant la guerre, toutes connu la peur, la solitude face à la peur, la perte, le silence après la perte. Entre lui et elles, cela n’était jamais évoqué, trop dangereux, mais ils partageaient cette compréhension que le passé était incurable, rien ne le corrigerait, il valait mieux l’oublier, et puisqu’ils étaient en vie, il y avait une obligation de vivre, d’être présent au monde. »

« Le grand appartement, vestibule aux murs émeraude, salle à manger rose, salon argenté, couloir bleu nuit, cuisine vert d’eau, salle de bain pourpre, salle de bain orangée, chambre bleu roi, bleu gris,bleu mauve, bleu ennui, n’offrent plus aucun abri, chaque pièce, tiroir, meuble, est plein de ce qui n’est pas dit, de tous ces morts sans tombe. »

À propos de l’auteur
Écrivain, Colombe Schneck a notamment publié, chez Stock, L’Increvable Monsieur Schneck (2006), Val de Grâce (2008), Une femme célèbre (2010) et, aux Éditions Grasset, La Réparation, traduit dans plusieurs pays. (Source : Éditions Stock)

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L’attrape-souci

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En deux mots:
Lucien se rend avec sa mère dans une grande librairie de Buenos Aires. C’est là qu’elle disparaît soudainement, laissant son enfant de onze ans livré à lui-même. Sa quête commence…

Ma note:
★★★ (bien aimé)

Ma chronique:

L’enfant perdu

À 11 ans, Lucien se retrouve livré à lui-même dans les rues de Buenos Aires. Pour ses débuts, Catherine Faye nous propose un roman d’apprentissage aussi exotique que prenant.

Lucien à onze ans. Venant de Paris, il débarque à Buenos Aires et commence à prendre ses marques dans sa nouvelle vie argentine. Après quelques jours, sa mère l’emmène se promener au centre-ville. Ensemble, ils entrent dans une grande librairie. Des livres du sol au plafond, mais aussi des attrape-souci, « de petites boîtes ovales bizarres, jaunes et recouvertes de signes avec des poupées minuscules à l’intérieur. «Quand tu as un souci, n’importe lequel, tu glisses une des petites poupées sous ton oreiller, tu le lui confies et le lendemain matin, quand tu te réveilles, plus de souci, il s’est envolé.»
Sauf que cette fois, ce n’est pas le souci qui disparaît mais la mère! Quand Lucien se retourne, il n’y a plus personne. Il a beau courir dans les rayons de la librairie, puis dans la rue, sa mère s’est comme envolée.
Après la vendeuse qui ne comprend pas ce qu’il veut et le jette littéralement dans la rue, Lucien va se retrouver bien en peine pour trouver de l’aide. Même la police est suspicieuse, tant et si bien qu’il lui faut désormais apprendre à se débrouiller seul. Pour trouver un abri, pour trouver de quoi manger, pour tenter d’élaborer un plan pour retrouver sa mère et pour éviter les dangers qui le guettent.
Sur ces pas, on va bien vite se rendre compte de l’énorme défi qu’il lui faut relever. Car aux angoisses et aux difficultés viennent s’ajouter des problèmes de santé inhérents à sa condition d’enfant de la rue.
« Je serais incapable de dire combien d’heures, combien de jours j’ai divagué, égaré entre deux eaux. La nuit et le matin ne faisaient qu’un, l’après-midi, la fièvre montait. J’avais l’impression de me noyer, puis je remontais à la surface, ballotté entre cauchemars et rêves, sommeils profonds et délires (…) je lâchais prise. L’ombre de ma mère, immobile, semblait me surveiller, je l’entendais fredonner, tantôt douce, tantôt méchante. Je tendais la main pour la toucher. Rien. Personne. »
Mais après quelques jours difficiles et fort d’une certitude nouvelle, «une voiture se répare, un rhume se guérit, une mère se retrouve», il va croiser le chemin d’une mercière prête à l’accueillir dans sa famille avec ses filles. Ariana, Anita, Solana.
C’est avec cette dernière qu’il va connaître ses premiers émois sexuels. «Je faisais quelque chose de défendu, je nageais entre deux eaux. Impossible de résister.»
Mais son initiation ne va pas s’arrêter là. Il va faire d’autres rencontres, plus ou moins heureuses. Il va aussi faire quelques rencontres qui vont lui ouvrir de nouveaux horizons. Et le mener à prendre sa vie en mains, plutôt que d’être ballotté par le destin. Pour cela trois bouteilles en plastique bleu et trois balles colorées devraient faire l’affaire. Il y aura aussi Arrigo le jardinier et la belle dame élégante qui pourrait bien la mener à sa mère…
Dans ce beau roman de formation, Catherine Faye a sans doute mis beaucoup plus d’elle qu’une lecture trop rapide peut le laisser supposer. Si, comme son Lucien, rebaptisé Lucio, elle a passé son enfance en Argentine, j’imagine qu’elle a aussi eu son jardin secret, son raconte-à-moi qui est l’antichambre de la littérature. À la manière de ces histoires qu’elle a pu s’inventer, qui n’étaient belles que si elles faisaient un peu peur, elle nous offre un suspense initiatique servi par un bel imaginaire, magnifié par ses souvenirs d’enfance et conclu par une fin qui vous surprendra. Bref, tout pour nous séduire.

L’attrape-souci
Catherine Faye
Éditions Mazarine
Roman
300 p., 18 €
EAN : 9782863744758
Paru le 17 janvier 2018

Où?
Le roman se déroule en Argentine, à Buenos Aires et environs.

Quand?
L’action se situe au début du siècle.

Ce qu’en dit l’éditeur
Décembre 2001. Lucien, onze ans, vient d’arriver à Buenos Aires avec sa mère. Dans une librairie, il est captivé par de mystérieuses petites boîtes jaunes. Dedans, de minuscules poupées. Selon une légende, si on leur confie ses soucis avant de s’endormir, le lendemain, ils se sont envolés.
Le temps qu’il choisisse son attrape-souci, c’est sa mère qui s’est envolée. Disparue.
Lucien part à sa recherche. Se perd.
Au fil de ses errances, il fait des rencontres singulières. Cartonniers, prostituées, gamins des rues avec qui il se lie, un temps. Et grâce à qui, envers et contre tout, il se construit, apprend à grandir. Autrement.
Rebaptisé Lucio par ses compagnons de route, cet enfant rêveur et déterminé incarne ce possible porte-bonheur que chacun a en soi.

Les critiques
Babelio
Le Parisien (Pierre Vavasseur)
Blog Les chroniques de Koryfée (Karine Fléjo)
Blog Les lectures du mouton (Virginie Vertigo)
Blog La Dory qui lit 

Les premières pages du livre 
« Je l’ai perdue comme ça. C’était l’après-midi. Nous avions déjeuné dans un bistrot à étages de Palermo, en sortant, il avait encore fallu faire les magasins. Depuis notre arrivée à Buenos Aires, nous n’arrêtions pas de marcher et d’entrer dans des boutiques. Je ne comprenais pas grand-chose à ce que nous étions en train de faire, on était partis de Paris, comme ça, très vite et très loin, en plein mois de décembre, des vacances ou alors une autre vie. Elle avait décidé de m’emmener dans la ville de son enfance, une enfance de rêve, c’est ce qu’elle me répétait. C’était juste après l’attentat des tours jumelles. 2001, une drôle d’année.
Je me souviens de ses sandales à talons compensés, elle se tordait les chevilles sur les trottoirs cabossés, me tirait par la main, on manquait de tomber tous les deux. Je les vois encore, ses sandales, parce qu’à chaque fois qu’elle les mettait elle me demandait si elles lui allaient, en se tournant dans tous les sens devant le miroir. Elles avaient une bride rouge, fine, on aurait dit un bracelet autour de ses pieds. J’aimais m’amuser avec, faire et défaire la boucle quand elle dormait et que je m’ennuyais. Elle aimait mettre des talons, ma mère, même si elle était grande. Elle disait que l’élégance, c’est de donner l’impression qu’on va s’envoler. Et moi, j’avais peur.
J’avais onze ans, elle trente. Ou quarante. À onze ans, trente ou quarante ans, c’est un peu la même chose. Et puis, avec le temps, j’ai oublié.
Il devait être cinq heures, l’air était doux, l’ombre violette des jacarandas recouvrait la rue et les caniveaux, elle était entrée dans une librairie. Des passages étroits s’enfonçaient entre les présentoirs en désordre et les étagères penchées, débordantes de livres. Un vrai château de cartes. Dans un coin, un étalage de petites boîtes ovales bizarres, jaunes et recouvertes de signes – des croix, des flèches, des yeux –, j’étais fasciné. Ma mère s’était approchée. Elle m’expliquait qu’à l’intérieur il y avait des poupées minuscules, indiennes. D’Amérique du Sud, pas des États-Unis, ni des Indes, c’est ce qu’elle m’avait dit.
– Donc, vois-tu, quand tu as un souci, n’importe lequel…
Elle avait laissé un blanc.
– … tu glisses une des petites poupées sous ton oreiller, tu le lui confies et le lendemain matin, quand tu te réveilles, plus de souci, il s’est envolé.
– Il y en a beaucoup, des poupées, dedans ?
– Sept, des petits messieurs pour les soucis au masculin et des petites dames pour les soucis au féminin.
En détournant la tête, elle avait ajouté :
– Et un petit enfant aussi, pour le souci… qui n’en est pas vraiment un.
– Je peux en avoir un d’attrape-souci ?
– Lucien ! Exprime-toi correctement ! Tu dois dire : Pourrais-je en avoir un, s’il te plaît, maman ?
Elle me reprenait tout le temps. Il fallait que je parle comme il faut, surtout devant les autres.
– Fais attention quand même ! Et tiens-toi droit.
Puis, après s’être éloignée avec son grand sac mou en toile verte plaqué sous le bras, elle s’était mise à regarder des livres empilés près de l’entrée. Elle n’arrivait pas à en lire les titres, même un peu de biais, alors, elle essayait de déchiffrer les mots à l’envers. Toujours dans des positions improbables, ma mère.
Elle voulait un roman qui se passe au bout du monde, c’est ce qu’elle expliquait maintenant à la vendeuse au chignon plat, dans cette langue qu’elle parlait couramment, l’argentin. J’aimais l’entendre faire danser ses phrases, avec tous ces mots qu’elle m’avait appris à Paris les soirs où elle était de bonne humeur. Il avait fallu que j’apprenne vite parce qu’elle avait décidé qu’entre nous on parlerait cette langue. Un point c’est tout. Je m’en sortais plutôt bien. Avec un vocabulaire d’enfant, mais ça allait.
Ça faisait des jours que ma mère cherchait ce livre du bout du monde, un livre contre les insomnies. »

Extraits
« J‘avais mal dans le bas du ventre, là où on m’avait opéré. Au bout d’un long moment, ça s’est calmé. Tout doucement, il m’a collé une tasse brûlante entre les lèvres et m’a fait boire un liquide qui ressemblait à du feu. A bout de force, je me suis laissé glisser entre ses jambes, ma joue posée sur sa cuisse, ça empestait les chaussettes. Je me suis agrippé à lui et je me suis endormi, brusquement, profondément.
Je serais incapable de dire combien d’heures, combien de jours j’ai divagué, égaré entre deux eaux. La nuit et le matin ne faisaient qu’un, l’après-midi, la fièvre montait. J’avais l’impression de me noyer, puis je remontais à la surface, ballotté entre cauchemars et rêves, sommeils profonds et délires. De temps à autre, Gaston me mouillait les lèvres avec une éponge qui sentait l’essence, me grattouillait les cheveux. Je me laissais faire, je lâchais prise. L’ombre de ma mère, immobile, semblait me surveiller, je l’entendais fredonner, tantôt douce, tantôt méchante. Je tendais la main pour la toucher. Rien. Personne. »

« Les petites boîtes se ressemblaient toutes, je n’arrivais pas à me décider, je les trouvais mal taillées, trop plates, pas assez colorées, j’en aurais voulu qui soit parfaite. Je les dévorais des yeux, sans oser les toucher, encore moins les ouvrir pour voir dedans. D’un coup, j’ai su laquelle j’allais prendre, j’ai souri, je me suis retournée pour faire signe à ma mère. De là où j’étais, je ne la voyais pas, j’ai tendu la main pour la saisir, mais j’ai eu peur que la libraire ne pense que j’allais la voler, alors, je l’ai reposée, j’ai regardé de tous les côtés et je me suis dirigé vers la sortie, les mains vides. Sauf que, dehors, personne. Elle avait disparu. »

À propos de l’auteur
Catherine Faye est journaliste indépendante et auteure depuis 1990. Elle a passé son enfance à l’étranger, notamment en Argentine. Dans ses récits, ce sont les parcours atypiques, les histoires de vies, qui la guident. L’Attrape-souci est son premier roman. (Source : Babelio)

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Le poids de la neige

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En deux mots:
Un grand blessé est recueilli par un vieil homme dans un village au seuil de l’hiver. Un huis-clos sous des tonnes de neige avec des protagonistes qui se mettent à l’unisson de la météo. Glaçant et magique.

Ma note:
★★★ (bien aimé)

Ma chronique:

20000 lieues sous l’hiver

Un grave accident oblige le narrateur à séjourner dans un village isolé au seuil de l’hiver. La plume du Québécois Christian Guay-Poliquin étincelle comme la neige qui recouvre ce récit.

Ce roman est d’abord celui d’une ambiance, d’un décor qui saisit le lecteur et qui va l’accompagner jusqu’à l’épilogue. « J’ai vu le lent mouvement du paysage, le ciel gris de l’automne, la lumière rougeoyante des arbres. J’ai vu les fougères se faire mâcher par le givre, les hautes herbes casser à la moindre brise, les premiers flocons se poser sur le sol gelé. J’ai vu les traces laissées par les bêtes qui inspectaient les alentours après la première neige: Depuis, le ciel n’en finit plus d’ensevelir le décor. L’attente domine le paysage. Et tout a été remis au printemps. C’est un décor sans issue. Les montagnes découpent l’horizon, la forêt nous cerne de toute part et la neige crève les yeux. »
Le narrateur est un jeune homme gravement blessé à la suite d’un accident de voiture dont on ne saura ni le nom, ni le lieu où il se trouve. En revanche, on apprendra que la communauté villageoise a proposé à Matthias, un vieil homme habitant une maison un peu à l’écart à la lisière de la forêt, de lui confier la garde de cet homme jusqu’à ce qu’il puisse à nouveau se déplacer. En échange, on lui promet une place dans un bus qui, quand les routes seront à nouveau praticables, le conduira vers la ville où se trouve son épouse mourante.
Mais la situation n’est pas prête de s’arranger, bien au contraire. À la neige qui tombe vient s’ajouter une panne d’électricité. La tension va alors croître au fil des jours entre les habitants pris au piège, mais aussi entre le narrateur et Matthias. Une tension que l’on va pouvoir mesurer de chapitre en chapitre sur une échelle à neige installée dans la clairière, à portée de vue du lit de notre convalescent. « Merveilleux, me dis-je. Nous allons désormais pouvoir mesurer notre désarroi. »
Et de fait, le manteau neigeux ne va cesser de croître de chapitre en chapitre, avant un épilogue surprenant.
Alors que les habitants se divisent sur la stratégie à adopter, faut-il fuir un village aux conditions de vie de plus en plus précaires en montant une expédition très risquée ou organiser la survie en attendant des temps plus cléments, Matthias et son hôte continue à se méfier l’un de l’autre, alternant les phases d’apaisement et les phases conflictuelles.
« J’ai toujours su que tu finirais par céder, recommence Matthias. Si on ne peut pas changer les choses, on finit par changer les mots. Je ne suis pas ton médecin, je ne suis pas ton ami, je ne suis pas ton père, tu m’entends? On passe l’hiver ensemble, on le traverse, puis c’est fini. Je prends soin de toi, on partage tout, mais, dès que je pourrai partir, tu m’oublies. Tu te débrouilles. Moi, je repars en ville. Tu m’entends? Ma femme m’attend. Elle a besoin de moi et j’ai besoin d’elle. C’est ça mon aventure, c’est ça ma vie, je n’ai rien à faire ici, tout ça est un concours de circonstances, un coup du sort, une grossière erreur. »
Dans cet affrontement psychologique, il n’y a guère que Maria, la belle vétérinaire, qui se convertit en infirmière – et bien davantage – pour apaiser le grand blessé. Mais cette dernière finira aussi par choisir la fuite…
Comme la neige, les pensées s’accumulent dans la tête du narrateur. Il va refaire la route qui a conduit à l’accident, nous expliquer qu’après dix ans d’absence il revenait voir son père, le mécanicien du village, mais qu’il arrivera trop tard. Qu’il n’a plus rien à faire là, «mis à part le fait que mes jambes parviennent à peine à me supporter».
Christian Guay-Poliquin a été couronné du Prix du Gouverneur Général au Québec (l’équivalent du Goncourt en France) pour ce roman sur la solitude et la réclusion, à moins que ce ne soit celui de la reconstruction et de la résilience… Le livre idéal pour accompagner les longues soirées d’hiver.

Le poids de la neige
Christian Guay-Poliquin
Éditions de l’Observatoire
Roman
260 p., 19 €
EAN : 9791032902134
Paru le 10 janvier 2018

Où?
Le roman se déroule dans un endroit qui n’est pas nommé, mais que l’on situera volontiers sau Canada.

Quand?
L’époque n’est pas précisée non plus, mais les indices – accident de voiture, motoneige – laissent à penser que le roman se déroule à notre époque.

Ce qu’en dit l’éditeur
À la suite d’un accident, un homme se retrouve piégé dans un village enseveli sous la neige et coupé du monde par une panne d’électricité. Il est confié à Matthias, un vieillard qui accepte de le soigner en échange de bois, de vivres et, surtout, d’une place dans le convoi qui partira pour la ville au printemps, seule échappatoire.
Dans la véranda d’une maison où se croisent les courants d’air et de rares visiteurs, les deux hommes se retrouvent prisonniers de l’hiver et de leur rude face-à-face.
Cernés par une nature hostile et sublime, soumis aux rumeurs et aux passions qui secouent le village, ils tissent des liens complexes, oscillant entre méfiance, nécessité et entraide.
Alors que les centimètres de neige s’accumulent, tiendront-ils le coup face aux menaces extérieures et aux écueils intimes ?

Les critiques
Babelio
Télérama (Fabienne Pascaud)
Le Soleil (Valérie Lessard / Valérie Gaudreau)
Le Devoir (Christian Desmeules)
Artichaut Magazine (Florence Dancause)
Blog Hop! Sous la couette
La Fabrique culturelle Une superbe présentation vidéo du livre


À l’occasion du festival « Étonnants voyageurs » de Saint Malo, Christian Guay-Poliquin vous présente son ouvrage Le poids de la neige © Production Librairie Mollat


Entretien avec Christian Guay-Poliquin à l’occasion de la rencontre entre l’auteur et les lecteurs de Babelio.com dans les locaux des éditions de L’Observatoire, le 19 janvier 2018. Découvrez les 5 mots choisis par l’auteur pour évoquer son livre Le Poids de la neige.

La première page du livre:
« La neige règne sans partage. Elle domine le paysage, elle écrase les montagnes. Les arbres s’inclinent, ploient vers le sol, courbent l’échine. Il n’y a que les grandes épinettes qui refusent de plier. Elles encaissent, droites et noires. Elles marquent la fin du village, le début de la forêt.
Près de ma fenêtre, des oiseaux vont et viennent, se querellent et picorent. De temps à autre, l’un d’eux observe la tranquillité de la maison d’un oeil inquiet.
Sur le cadre extérieur, une fine branche écorcée a été fixée à l’horizontale, en guise de baromètre. Si elle pointe vers le haut, le temps sera clair et sec; si elle pointe vers le bas, il va neiger. Pour l’instant le temps est incertain, la branche est en plein milieu de sa trajectoire.
Il doit être tard. Le ciel gris est opaque et sans aucune nuance. Le soleil pourrait être n’importe où. Quelques flocons virevoltent dans l’air en s’accrochant à chaque seconde. À une centaine de pas de la maison, dans l’éclaircie, Matthias enfonce une longue perche dans la neige. On dirait le mât d’un bateau. Mais sans voile ni drapeau. »

Extraits:
« Je connais pourtant ce décor par cœur. Je l’observe depuis longtemps. Je ne me souviens plus vraiment de l’été, à cause de la fièvre et des médicaments, mais j’ai vu le lent mouvement du paysage, le ciel gris de l’automne, la lumière rougeoyante des arbres. J’ai vu les fougères se faire mâcher par le givre, les hautes herbes casser à la moindre brise, les premiers flocons se poser sur le sol gelé. J’ai vu les traces laissées par les bêtes qui inspectaient les alentours après la première neige: Depuis, le ciel n’en finit plus d’ensevelir le décor. L’attente domine le paysage. Et tout a été remis au printemps. C’est un décor sans issue. Les montagnes découpent l’horizon, la forêt nous cerne de toute part et la neige crève les yeux.
Regarde mieux, lance Matthias.
J’examine la longue perche que Matthias vient d’installer dans la clairière. Je remarque qu’il l’a minutieusement graduée. C’est une échelle à neige, annonce-t-il triomphalement. Avec la longue-vue, je peux voir que la neige atteint quarante et un centimètres. Je considère la blancheur du décor pendant un instant, puis me laisse choir sur mon lit en fermant les yeux.
Merveilleux, me dis-je. Nous allons désormais pouvoir mesurer notre désarroi. »

« J’ai toujours su que tu finirais par céder, recommence Matthias. Si on ne peut pas changer les choses, on finit par changer les mots. Je ne suis pas ton médecin, je ne suis pas ton ami, je ne suis pas ton père, tu m’entends? On passe l’hiver ensemble, on le traverse, puis c’est fini. Je prends soin de toi, on partage tout, mais, dès que je pourrai partir, tu m’oublies. Tu te débrouilles. Moi, je repars en ville. Tu m’entends? Ma femme m’attend. Elle a besoin de moi et j’ai besoin d’elle. C’est ça mon aventure, c’est ça ma vie, je n’ai rien à faire ici, tout ça est un concours de circonstances, un coup du sort, une grossière erreur. »
En disant cela, il avance une pièce sur l’échiquier et m’invite à le défier.
J’ai toujours su que tu finirais par céder. Personne ne peut se taire ainsi. Tout le monde retourne vers la parole un jour ou l’autre. Même toi. Et, bientôt, je te le dis, tu vas aussi t’adresser à moi. Tu vas me parler, même s’il n’y a pas le feu, même si je ne suis pas une jeune vétérinaire. Tu vas me parler, tu m’entends ? Et tu vas jouer aux échecs avec moi. C’est ça qui va arriver. Rien d’autre. Vas-y, c’est à toi de jouer. »

« Dans le coin du salon, il y a les livres que nous avons entassés pour brûler les bibliothèques. Les livres dans lesquels Matthias trouvait ses histoires. Je me penche et saisis quelques bouquins, les premiers qui me tombent sous la main. Je retourne devant le foyer et, sans attendre, je jette un livre sur les braises crépitantes. La couverture prend feu presque immédiatement. Les coins se replient et le carton se cintre dans les flammes. Les premières pages se retroussent. Le livre gondole comme un accordéon. La chaleur est intense, mais rapidement le livre n’est plus qu’une masse informe, orange et noir. On dirait une pierre brûlante et friable. Alors j’en brûle un autre et les flammes reprennent vie de plus belle, vrillent dans la cheminée, et une lumière vive rayonne dans la pièce. Je me déshabille complètement pour profiter de la chaleur des livres et mange quelques betteraves dans le vinaigre prises chez la dame. En regardant les pages se consumer, je me demande où peut bien être rendu Matthias, à l’heure qu’il est. Plus loin que moi, ça ne fait aucun doute. »

À propos de l’auteur
Né au Québec, en 1982, Christian Guay-Poliquin est doctorant en études littéraires. Le Poids de la neige, grand succès au Québec, a été distingué par plusieurs prix prestigieux. (Source : Éditions de L’Observatoire)

Site Wikipédia de l’auteur 
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Le cas singulier de Benjamin T.

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En deux mots:
Benjamin est ambulancier dans la région lyonnaise. Mais Benjamin est aussi un résistant luttant contre les nazis sur le plateau des Glières. Deux vies pour un même homme ? Un roman aussi addictif qu’insensé.

Ma note:
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique:

Ben mène une double vie

Victime de crises d’épilepsie qui vont s’accompagner de visions, Benjamin se voit combattre l’armée allemande aux côtés de son frère Cyrille sur le plateau des Glières. Commence alors une double vie, en 1944 et en 2016.

Benjamin Teillac n’est pas vraiment gâté par la vie. Tout avait pourtant bien commencé pour lui. Un travail d’ambulancier qu’il avait toujours rêvé de faire, Sylvie, une belle épouse qui va mettre au monde un fils, des amis… Les choses ont commencé à déraper quand il s’est découvert cocu, sa femme couchant avec Haetsler, son patron. Du coup les relations professionnelles deviennent très tendues. Le divorce est difficile, tout comme ses relations avec son fils: « Lorsqu’il arrivait le vendredi soir, il s’y rendait directement, claquait la porte derrière lui et ne réémergeait brièvement qu’au moment des repas que nous partagions dans un silence presque complet. On dit que lors de la séparation de leurs parents, les gamins se sentent presque toujours obligés de prendre parti. Pierrick avait choisi son camp, et j’aurais probablement dû m’estimer heureux qu’il accepte encore de venir chez moi une semaine sur deux. » Et pour couronner le tout, ses crises d’épilepsie qui ont repris. Des ennuis de santé qui peuvent conduire à un licenciement. Heureusement, son copain David, qui est avec Sylvie le seul dans la confidence, reste à ses côtés.
Et ne va pas tarder à être le témoin de nouvelles crises. Déstabilisé, Benjamin décide d’accepter le nouveau traitement préconisé par sa neurologue, mais ne va pas être soulagé pour autant. Bien au contraire, des hallucinations, des visions commencent par le hanter. Il se voit soudain comme projeté dans un film, se retrouvant aux côtés de résistants retranchés sur le plateau des Glières. Il se voit artificier, chargé de faire sauter un pont au passage de l’armée allemande. L’épisode est d’un réalisme tel qu’il en est tout secoué: « Je n’avais jamais porté d’intérêt à l’histoire, pas plus à la Seconde Guerre mondiale qu’à aucune autre période du passé. Je faisais partie de ces hommes cartésiens pour qui seul le présent comptait (…) mais j’avais pourtant su citer sans hésitation, comme d’un fait connu de toujours, le nom de Tom Morel, héros d’une bataille dont il me semblait n’avoir jamais entendu parler. »
C’est à ce point du roman que Catherine Rolland réussit un premier grand tour de force. On «voit» Benjamin aux côtés de son frère Cyrille, un abbé avec lequel il a rejoint les maquisards. On ressent avec lui l’intensité de ce moment, la peur et l’exaltation. Et si on partage son trouble, on a – tout comme lui – envie d’en savoir davantage, de retrouver ses compagnons et cette femme qui allait s’engager sur le pont à quelques secondes de l’explosion, la belle Mélaine qu’il va sauver et dont il va presque instantanément tomber amoureux. Si, comme le disait le poète Calderon de la Barca, la vie est un songe, alors on a envie de continuer à rêver avec Benjamin: « L’immersion dans le passé, pour le moment, était ma seule façon de supporter assez mon présent pour m’empêcher d’ouvrir le gaz en plein avant de me coller la tête dans le four. Je n’avais plus de travail ni de ressources, ma femme m’avait quitté, mon fils me tournait le dos. (…) Contre toute attente, je me sentais bizarrement serein. Mon seul problème, dont je savais qu’il finirait par se résoudre, était d’éliminer Hitler et de rendre la patrie aux Français. »
Au fur et à mesure des crises, on va passer avec Benjamin d’une époque à l’autre, comprendre que toutes deux sont aussi réalistes l’une que l’autre et, comme les témoins aux côtés de Benjamin, nous dire que tout cela n’est pas possible, que l’on ne saurait se réincarner en héros de guerre – mais comment dans ce cas peut-on se souvenir des noms, des lieux, des personnes – pas plus qu’on ne saurait dans les années quarante connaître l’issue du conflit ou encore parler de produits qui n’ont pas encore été inventés, comme le DVD.
Et c’est là le second tour de force réussi avec brio par Catherine Rolland. Non seulement elle nous emporte par son écriture addictive, mais elle nous entraîne dans les pas de Benjamin à nous poser quelques questions existentielles essentielles: peut-on passer sans encombre d’une vie à l’autre?; Peut-on se perdre en route ou à l’inverse choisir une vie plutôt qu’une autre?; Peut-on ne pas revenir du passé? Et peut-on changer le passé? Car il faut bien que tout cela à quelque chose, à sauver son frère qui vient d’être arrêté et auquel on destine un peloton d’exécution ou à tenir la promesse faite à Mélaine de l’épouser et d’emménager avec elle dans la jolie maison à l’orée du village… Tout le reste est littérature. Un bel hommage à la littérature qui, par la grâce d’une romancière omnisciente, rend vraisemblable l’invraisemblable, rend le temps poreux, brise nos certitudes et nous rend totalement addicts à cette double-histoire, aussi étonnante que vertigineuse.
En refermant le livre, on se dit que notre bonheur de lecture pourrait se doubler du plaisir à découvrir une adaptation cinématographique de cette histoire époustouflante qui offre au cinéaste un formidable registre, de l’histoire d’amour impossible à la tranche de vie sociale, de la fresque historique dans les paysages enneigés du plateau des Glières aux avancées (?) de notre médecine. Sans oublier le tourbillon des émotions qui accompagnent toutes ces séquences.
Catherine Rolland a à la fois profité de son expérience de médecin et de son parcours – originaire de Lyon et vivant aujourd’hui en Suisse – pour construire ce formidable roman qui est, après Éparse de Lisa Balavoine, la seconde belle découverte de cette rentrée 2018. Après plusieurs romans publiés dans des maisons d’édition confidentielles, il me semble qu’elle a trouvé aux Escales l’éditeur qui va lui permettre de percer. C’est tout le mal qu’on lui souhaite!

Le cas singulier de Benjamin T.
Catherine Rolland
Éditions Les Escales
Roman
352 p., 18,90 €
EAN : 9782365693301
Paru le 8 février 2018

Où?
Le roman se déroule en France, à Lyon et région ainsi que sur le plateau des Glières dans les Alpes.

Quand?
L’action se situe de nos jours ainsi qu’en 1944.

Ce qu’en dit l’éditeur
L’histoire commence de nos jours. Benjamin, ambulancier de métier, est en pleine tempête sentimentale. Sa femme en aime un autre, elle a quitté le domicile, son fils le boude, bref, rien ne va plus. Heureusement que son meilleur ami, David, veille sur lui et l’accueille pour quelques jours dans sa maison. Survient alors chez Benjamin une crise d’épilepsie comme il n’en avait plus eue depuis l’adolescence. Au cours de cette crise, étrangement, le héros se retrouve propulsé dans une autre réalité. Le voilà sur un chemin de neige à faire le guet, en compagnie de jeunes hommes qu’il ne connaît pas et à qui, pourtant, il s’adresse comme à des familiers… en pleine Seconde Guerre mondiale ! Le Benjamin de 2016, qui est aussi le Benjamin de 1944, se retrouve à cheval entre deux époques, entre deux mondes – entre deux vies possibles. Pourra-t-il choisir celui qu’il veut être? De cet entrelacement de deux destins parallèles, Catherine Rolland tire une réflexion sur le temps, l’héroïsme ou la lâcheté, en un mot sur la condition des hommes lorsqu’ils doivent faire des choix qui engagent toute leur vie. Catherine Rolland, lyonnaise d’origine, vit en Suisse. Elle est médecin.

Les critiques
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Les premières pages du livre
« Le petit village de montagne était écrasé de soleil.
Les rues tortueuses, étroites, rappelaient le temps pas si lointain où aucune voie n’était goudronnée, et où seules les charrettes à bras montaient jusque-là. Les maisons en torchis, plus rarement en pierres, étaient groupées en cercle autour de l’église et de son clocher à bulbe, typique des paysages de Haute-Savoie.
À cette heure du milieu de l’après-midi, il n’y avait pas un bruit, tous les habitants terrés chez eux pour laisser passer le gros de la chaleur. En fin de journée, ils ouvriraient leurs portes, ils sortiraient à pas lents, de ce pas qu’ont les vieux dont la vie est derrière, et qui semblent ne se déplacer qu’à contrecœur, avec la conscience aiguë que rien ne les attend plus. Certains installeraient un fauteuil sur leur seuil, les femmes sortiraient leur ouvrage, les hommes le journal, le tabac et un verre. Ils deviseraient, d’un bout de la rue à l’autre, du temps qu’il fait et de celui qui passe, inéluctablement.
Chaque jour, si semblable au précédent. David en avait des frissons.
Il s’était garé sur la place minuscule, ombragée par un marronnier, unique et gigantesque. Les arbres. David n’y connaissait rien. Il faudrait qu’il demande à Thibault si cette espèce-là poussait vite ou bien pas, s’il était possible que cet arbre, sentinelle solitaire, ait été là du temps de la guerre, qu’il ait vu passer les soldats de l’un et l’autre camp.
Maintenant, il ne pouvait plus regarder un arbre sans se poser la question.
Est-ce qu’il était déjà là? À combien d’êtres humains, morts depuis longtemps, avait-il fait de l’ombre, combien d’amants sur son tronc avaient-ils gravé leurs noms, sur lesquels l’écorce s’était peu à peu refermée pour en conserver le secret à tout jamais?
David gardait les mains crispées sur le volant, les articulations blanchies par la tension. Il finit par s’en apercevoir, coupa le contact, ouvrit la portière.
Descendit.
La chaleur l’engloutit immédiatement, contrastant avec l’habitacle climatisé de la berline. Lentement, il retira son blouson léger, le jeta négligemment sur le siège avant, puis s’éloigna de quelques pas, sans fermer à clé.
Il n’avait aucune crainte à avoir. Ni des voleurs, ni d’autre chose. Il fallait qu’il se calme.
Avec un soupir, il fouilla la poche de sa chemise, sortit ses cigarettes. Il en alluma une, à l’abri du vent chaud qui se levait timidement. L’orage allait venir. Une telle fournaise, aussi humide et lourde, elle finirait forcément par craquer.
Les mouvements toujours mesurés, David pivota sur lui-même, examinant les lieux. La petite place lui semblait déjà familière alors qu’il n’y était venu qu’une fois, un an plus tôt, et n’était même pas descendu de voiture. Deux heures et demie de route, pour se garer quelque vingt mètres plus bas que l’endroit où il se tenait maintenant, et moteur tournant, ouvrir la vitre pour lire les noms sur le monument aux morts.
Ce jour-là, les rideaux avaient bougé derrière la fenêtre d’une maison jaune, juste en face. D’instinct, il regarda et aperçut, encore, la même silhouette immobile. »

Extraits
« Ma première crise d’épilepsie remontait à mes huit ans. En pleine classe, j’étais tombé de ma chaise et je m’étais mis à convulser, provoquant un joli vent de panique dans l’école. Par la suite, les neurologues avaient mis le temps, mais ils avaient fini par trouver un médicament efficace, et ma dernière crise remontait à mes dix ou onze ans. Ensuite, j’avais été tranquille pendant des années, au point que les médecins m’avaient jugé guéri et avaient même parlé d’arrêter le traitement.
J’avais refusé. Depuis tout petit, je rêvais de devenir ambulancier, et je savais pertinemment que la moindre récidive de mon épilepsie m’empêcherait d’obtenir mon permis de conduire. Bien sûr, j’avais menti à la visite médicale, par prudence, et je n’avais jamais rien dit de ma maladie à mon entourage. En dehors de Sylvie, ma femme, et de David mon meilleur ami, personne n’était au courant. »

« Qu’est-ce qui m’arrivait, bon sang ? Non content d’avoir des crises quotidiennes, j’allais en plus me mettre à avoir des hallucinations ? Qu’est-ce que c’était que ce paysage d’hiver, et puis cet homme en soutane qui revenait sans cesse hanter mes pensées, comme la veille chez Thibault ? j’avais même, j’en aurais juré, rêvé de lui et de cette montagne inconnue. Se pouvait-il qu’une simple photo, dont je n’avais même pas un souvenir conscient, puisse m’obséder à ce point ?
L’image de son exécution était si réelle que mes mains en tremblaient encore. »

« L’immersion dans le passé, pour le moment, était ma seule façon de supporter assez mon présent pour m’empêcher d’ouvrir le gaz en plein avant de me coller la tête dans le four. Je n’avais plus de travail ni de ressources, ma femme m’avait quitté, mon fils me tournait le dos. Haetsler allait passer le mot à toutes les compagnies d’ambulances du coin pour qu’aucune ne m’embauche, et sans autre qualification en poche qu’un permis de conduire professionnel que la médecine m’interdisait d’utiliser, mes perspectives d’avenir me semblaient plutôt réduites. »

« Je bloquai le cheminement de ma pensée, avec effroi. Qu’est-ce que je racontais, bon sang? À l’époque? Quelle époque? Où est-ce que je pensais être, exactement, et surtout quand? Projeté en pleine Seconde Guerre mondiale, cheminant dans les galeries secrètes du maquis pour y suivre un curé résistant qui prétendait être mon frère? Je dus reculer, prendre appui contre le mur tandis que l’étroit couloir, brusquement, se mettait à tourner autour de moi. »

« – Tu sais ce que je pense ? fit David, avant d’enchaîner sans attendre : le pense que tu nous fais une belle dépression. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Il y a la séparation, évidemment, et aussi le décès de ce bébé, ce petit Quentin, que tu n’as jamais digéré…
– Tu m’as dit cent fois que ce n’était pas ma faute.
– Cent fois. Et tu es toujours persuadé du contraire. Ne nie pas, nous le savons tous les deux.
– Je ne nie pas, soupirai-je, renonçant à le contredire.
– Peut-être que si tu avais accepté de voir un psy à l’époque, on n’en serait pas là…, poursuivit-il, songeur. Ajoute à ça ton fils qui te rejette, ton épilepsie qui s’emballe.
– Et encore, tu oublies de mentionner le fait que Haetsler m’a foutu à la porte. complétai-je sans réfléchir. Son silence me rappela, trop tard, qu’il ne le savait pas. »

À propos de l’auteur
Pendant plus de dix ans, Catherine Rolland a exercé la médecine dans un cabinet rural, puis dans un service d’urgences. Originaire de Lyon, elle vit depuis quelques années en Suisse. Passionnée de littérature, elle signe avec Le Cas singulier de Benjamin T. une réflexion sur le temps, l’héroïsme et la lâcheté, en un mot, sur la condition des hommes lorsqu’ils font des choix qui engagent toute leur vie. (Source : Éditions Les Escales)

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Nage libre

BERGMANN_Nage_libre

En deux mots:
Issa vient de rater son bac et dans sa Zone, les perspectives d’avenir sont proches du néant. Quand il accepte de suivre son ami Élie à la piscine, il ne sait pas encore combien cette décision va être capitale.

Ma note:
★★★ (bien aimé)
Ma chronique:

Dans le grand bain

Quand on a raté son bac, qu’on vit dans un quartier difficile avec une mère célibataire, l’avenir n’est pas rose. Issa réussira-t-il à s’en sortir?

À 25 ans, Boris Bergmann nous offre déjà son quatrième roman. On se souviendra notamment de Viens là que je te tue ma belle, paru en 2007, alors couronné par un prix créé pour l’occasion, le Prix de Flore du Lycéen et de Déserteur paru en 2016. Cette fois le jeune homme s’est mis dans la peau d’un jeune métis prénommé Issa, un héritage du Mali d’où vient Fatumata, sa mère. De son père on ne saura rien d’autre qu’il a fui avant même sa naissance. À la périphérie de Paris, pas la banlieue chaude mais plutôt un «bourrelet tiède», l’horizon se résume aux barres d’immeuble et au désœuvrement. Quand, comme Issa, on ne veut pas sombrer dans la délinquance, il n’y a guère que les petits boulots pour essayer de seconder une mère qui connaît mieux que personne la chanson métro, boulot, dodo. Car Issa vient de rater son bac, sans espoir de rattrappage.
Fort heureusement, il n’est pas seul dans sa galère. Élie, son voisin, lui propose de quitter la Cité du Parc, bât. B, esc. 2, 3e ét., appt. 24C pour une nouvelle expérience: la piscine municipale.
Ce qui semble à priori un loisir comme un autre a tout d’un rite de passage pour Issa. Dans tous les sens du terme, il doit se découvrir, oublier sa pudeur et les interdits que les intégristes entendent lui faire respecter. C’est peu dire qu’il rentre avec appréhension dans l’eau. Mais il va surmonter le traumatisme et apprendre à regarder son corps et celui des autres, notamment celui des femmes. « Il saisit l’importanoe de ce premier pas vers le corps de l‘autre. Il a réussi, sans avoir le choix, à partager un peu de salive, de langue, de dent, de peau. C’est quand même son premier baiser. Sa passion naissante d’adolescent solitaire n’est plus confrontée à son propre vide mais à la passion d’un autre (…) Issa sent pousser en lui la plante commune – désir d’être désirable. » Et la métamorphose est spectaculaire. L’anxieux, le mélancolique, le résigné, l’envieux de son copain extraverti va avancer ses pions. Au fur et à mesure de ses progrès en natation, il va se transformer, tenter de dépasser ses propres limites, mais aussi celles que les ancêtres de Tombouctou veulent lui imposer en jufeant sa pratique sportive impure. Sa situation sociale ne lui fait plus peur, lui qui né « dans le tiroir du bas. Dernière petite tache de pourriture sur la carte de la capitale, en haut à droite. » Il s’enhardit à franchir le prériphérique, à répondre aux attaques des bandes qui hantent la cité, à venir en aide à Élie qui doit subir les coups d’un père violent.
Du coup, il s’inscrit à la formation de maître-nageur sauveteur. Un autre moyen de s’insérer… et d’épater les filles.
« Toutes ses lourdeurs tombent au sol, abandonnées comme de vieux vêtements sales. Profanation des certitudes, des évidences, des lacunes, des pauvretés, des temporalités. Tout chavire, tout se mélange… »
Boris Bergmann sait admirablement rendre compte de cette métamorphose. À l’inverse de Delphine de Vigan qui raconte une descente aux enfers dans Les Loyautés, ce roman d’apprentissage tente d’oublier le malheur et les drames pour nous montrer qu’une autre voie est possible. Mais le combat est rude. Ici, il n’est pas question de lendemains qui chantent, mais de petites victoires, d’une rencontre qui permet d’avancer encore un peu davantage vers l’émancipation. À tel point qu’on aimerait quelquefois pousser Issa, l’aider à faire de plus grands pas. Mais Issa avance à son rythme, mesuré mais déterminé. N’hésitez pas vous aussi à vous lancer dans le grand bain. Vous verrez combien cette Nage libre peut faire du bien.

Nage libre
Boris Bergmann
Éditions Calmann-Lévy
Roman
312 p., 18,90 €
EAN : 9782702161401
Paru le 3 janvier 2018

Où?
Le roman se déroule en région parisienne. Le Mali y est évoqué.

Quand?
L’action se situe de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
Du haut de son HLM parisien, l’horizon d’Issa se resserre: il vient de rater son bac et n’a pas le moindre projet d’avenir. Par chance, son ami Élie lui propose de le former pour devenir maître-nageur – excellent prétexte pour passer l’été ensemble. Mais Issa garde d’épouvantables souvenirs d’enfance de la piscine.
Il se prête néanmoins au jeu, se faisant violence chaque jour pour dompter le bassin. Sous l’eau, l’enjeu sportif se mue bientôt en un vaste éveil des sens où chaque corps déclenche son désir d’adulte. Plus que le crawl, la conquête de l’autre devient l’obsession d’Issa. Mais la «zone» dans laquelle il vit le laissera-t-elle ainsi s’abandonner? Et, surtout, sera-t-il là pour Élie quand il aura à son tour besoin d’un ami? De son style nerveux et acéré, Boris Bergmann dresse le portrait d’une jeunesse qui se débat pour être libre, signant ici un roman d’une grande sensibilité.

Les critiques
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Les premières pages du livre
« Son nom manque à l’appel.
Il a beau chercher – c’est facile, il est le plus grand, presque deux mètres, comme un arbre mûr, il les dépasse tous –, il a beau scruter la liste qu’une main a punaisée au tableau ; il ne trouve pas. Il ne se trouve pas.
Il est plus grand que les autres et pourtant il se tient courbé, le dos brisé. Il cherche, hume, flaire, parcourt la liste mille fois parcourue… Ah. Enfin. ISSA. C’est son nom.
Son nom est là. En capitales. Mais, comme s’il n’existait pas, il n’y a rien à côté, rien pour le soutenir. Du vide, du blanc. Pas le moindre résultat positif. Pas la moyenne. Pas même la case « rattrapage » qu’on aurait cochée en dernier recours. Ça y est. C’est officiel. Il a raté son bac.
Il s’extirpe de la cohue, mélasse frétillante de corps indifférenciés. Laisse son nom dans l’oubli. Laisse son nom tomber là. Issa croise tous ces visages qu’il connaît et qui le méprisent. Il aimerait les mépriser en retour, ce serait juste – dent pour dent, vengeance de canines, colère de molaires –, mais il ne sait pas faire ça. Il ne sait pas être juste. Il ploie un peu plus, il prolonge sa brisure vers le bas.
Il voudrait se rayer de la liste, tracer un trait à la règle sur ce patronyme imposé, ces lettres noires qui le confectionnent, lui donnent vie, l’habitent à plein-temps, lui inculquent un son et une histoire – brisés, eux aussi.
Il aimerait voir Élie, entendre sa voix. La sentir, sa voix, car les voix ont une odeur et une couleur rien qu’à elles. Élie, ami unique. Que fait-il ? Où est-il ? Il doit chercher son nom, lui aussi. Il doit chercher.
Chercher Issa ? Peut-être. Mais Issa en doute.
Issa… C’est pas beaucoup, son nom. On le cerne facilement. Ça tient en quelques lettres. Prononcé à haute voix, c’est moins qu’un souffle.
Issa : nom-prophète, nom savant, nom taille haute et destin qui va avec. À-valoir de grandeur, ça ne suffit pas pour y croire. Sa mère l’a appelé Issa en hommage au nom que porte Jésus dans le Coran. Et parce qu’un vieux parent mort au pays et réputé pour sa sagesse s’appelait aussi Issa. Nom-histoire, mais pas la sienne.
C’est un nom trop grand pour lui. Pas à sa taille.
Issa : héritage du Mali. Le pays de sa mère, Fatumata. Et de son géniteur, père inconnu, parti bien avant, qui n’a rien voulu connaître, surtout pas le reconnaître.
Issa pense à ce pays d’origine, comme on dit, mais qu’il n’a jamais vu, jamais foulé. Né à Paris dans le XIXe arrondissement. Depuis, Issa n’a pas bougé.
Enfin il aperçoit Élie.
Il entend la rumeur qui l’entoure : Élie aussi a raté, Élie aussi a échoué. Mais Élie s’en fiche, lui. Il porte haut le sourire hardi, tord ses lèvres rouges jusqu’à l’excès, pour leur montrer que ça ne l’atteint pas, avec sa noble violence, il est insaisissable.
Issa aimerait s’approcher. Mais Élie est avec les Autres.
Tous ceux qui ont raté ont spontanément convergé vers son rire et son insolence car ils les rassurent. Ils s’y associent, s’y abritent. C’est de l’ombre, un rocher, une cachette, un espace libre – l’insolence des Autres. Issa ne peut pas, lui, en être, en faire partie. Il n’a pas le droit.
Alors il rentre. Il laisse son nom. Son nom a fait défaut. »

À propos de l’auteur
Dès l’adolescence, Boris Bergmann impressionne avec son premier roman, Viens là que je te tue ma belle, couronné en 2007 d’un prix de Flore des lycéens créé pour lui. Phénomène d’édition tant par sa jeunesse que par son talent, il est très remarqué en 2016 avec Déserteur, encensé par la presse, finaliste du prix Wepler et du prix de Flore et lauréat du prix du Touquet. Nage libre est son deuxième roman à paraître chez Calmann-Lévy. Boris Bergmann vit actuellement à Rome, où il a été sélectionné par la prestigieuse Villa Médicis pour une année de résidence. (Source : Éditions Calmann-Lévy)

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Pays provisoire

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En deux mots:
Une modiste originaire de Savoie installe sa boutique à Saint-Pétersbourg au début du XXe siècle. Mais en 1917, elle est contrainte de fuir et entreprend un périlleux voyage alors que la guerre fait rage.

Ma note:
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique:
Le fabuleux destin d’Amélie Servoz

La Révolution russe et la Première Guerre mondiale vues par les yeux d’une jeune modiste installée à Saint-Pétersbourg. Un excellent premier roman.

Une page oubliée de notre histoire, la découverte de quelques archives et l’imagination de la romancière : il n’en fallait pas davantage pour réussir une belle entrée en littérature. Fanny Tonnelier s’est intéressée à la colonie française qui a émigré vers la Russie des tsars au tournant du XXe siècle. Appréciés d’une cour et d’une noblesse qui avait à cœur de s’exprimer dans la langue de Molière, ces francophones (des Suisses romands ont aussi fait le voyage, notamment comme précepteurs) ont fort souvent réussi, comme le rappelle notamment Paul Gerbod dans son Livre D’une révolution, l’autre: les Français en Russie de 1789 à 1917 : «nombreux sont les commerçants et artisans (modistes, pâtissiers, marchands de vins ou d’articles de Paris) ainsi que les industriels, les ingénieurs et les dirigeants d’entreprises ainsi que les hommes engagés dans le développement économique de la Russie et les agents bancaires à réussir leur intégration. Les professeurs de français, par exemple, ont des appointements de 1500 roubles par an (soit environ 4000 francs-or).
Pour Amélie Servoz aussi, les affaires sont florissantes. Originaire de Savoie, la modiste a pu faire ses preuves dans une boutique parisienne avant d’être repérée par la dame qui lui offrira de reprendre sa boutique de Saint-Pétersbourg. Depuis près de sept ans qu’elle es tinstalée en Russie, elle a su conquérir une clientèle aussi riche que fidèle et ses chapeaux font la mode sur les bords de la Néva.
Mais nous sommes en 1917 et la grande Histoire vient rattrapper la modeste modiste. La Révolution bolchévique s’étend et la ville est en proie à des troubles qui vont laisser des traces. Son magasin est saccagé et elle est sommé de prendre fait et cause pour ceux qui prônent l’union des prolétaires de tous les pays.
Elle va bien tenter de continuer son activité en transférant son atelier à son domicile, mais va devoir se rendre compte que c’est peine perdue et que sa vie est en danger.
Il faut fuir un pays en ébullition, mais aussi traverser une Europe en proie à la plus meurtrière des guerres.
Après des démarches administratives délicates, un peu de chance et d’entregent, elle fuit avec son amie Joséphine «un pays devenu inhospitalier, où régnaient la peur, l’angoisse, le stress et la faim.» Je vous laisse découvrir les péripéties d’un voyage mouvementé en y ajoutant simplement que le bien et le mal s’y côtoient, que quelques rencontres vont s’avérer riches d’enseignements et qu’il va dès lors devenir très difficile de ne pas être pris dans ce tourbillon d’émotions.
On sent que Fanny Tonnelier s’est solidement documentée pour nous raconter ce périple et qu’elle a pris du plaisir en écrivant la fabuleux destin d’Amélie. Un plaisir très contagieux tant les descriptions sont réussies, tant le rythme est enlevé. Voilà qui donnerait sans doute un grand film en costumes. Chapeau !

Pays provisoire
Fanny Tonnelier
Alma éditeur
Roman
256 p., 18 €
EAN : 9782362792458
Paru le 4 janvier 2018

Où?
Le roman se déroule en Russie, à Saint-Pétersbourg, puis à Paris et en Savoie ainsi qu’en Finlande, Suède, Irlande et Angleterre.

Quand?
L’action se situe en 1917, avec des retours en arrière au tournant du XXe siècle.

Ce qu’en dit l’éditeur
Amélie Servoz, jeune modiste d’origine savoyarde, n’a pas froid aux yeux. En 1910, elle rallie Saint-Pétersbourg avec, pour seul viatique, un guide de la Russie chiné en librairie et l’invitation d’une compatriote à reprendre sa boutique de chapeaux. Sept ans plus tard, la déliquescence de l’Empire l’oblige à fuir. Son retour, imprévisible et périlleux, lui fera traverser quatre pays, découvrir les bas-côtés de la guerre et rencontrer Friedrich…
Fanny Tonnelier campe avec verve et finesse tout un monde de seconds rôles où les nationalités se mêlent; changeant à volonté et avec dextérité la focale, elle raconte aussi bien le détail des gestes et des métiers que l’ample vacarme d’une Révolution naissante. Elle s’est inspirée d’un pan d’histoire méconnu: au début du XXe siècle, de nombreuses Françaises partirent travailler en Russie.

Les critiques
Babelio 
Livreshebdo (Cécilia Lacour)
Blog T Livres T Arts 
Blog Bricabook 
Blog Cultur’Elle (Caroline Doudet)
Blog Les lectures du mouton (Virginie Vertigo)
Blog Le Goût des livres

Les premières pages du livre
« Cette nuit-là, Amélie ne se coucha pas. Elle laissa les épais rideaux ouverts, enñla sa robe de chambre et s’installa dans son fauteuil face àla nuit claire de juillet. Elle était triste, cafardeuse, et n’arrivait pas à dormir.
Elle ne recevait plus de courriers de ses parents depuis six mois et s’inquiétait pour eux. Son père, malgré son âge, avait été rappelé sous les drapeaux pour être ambulancier. Était-il encore en vie? C’était la première fois qu’elle se posait aussi franchement la question. Et puis la ville qu’elle avait découverte sept ans plus tôt n’était plus la même. C’était encore la période des nuits blanches, d’habitude pleines de gaieté et de rires. Mais depuis quelques semaines, les rues étaient désertes, sans le bruit familier des tramways, et les activités s’arrêtaient les unes après les autres. Manifestations, meetings politiques, défilés étaient le lot quotidien des habitants qui se terraient chez eux. Les denrées de base manquaient cruellement et le peuple avait faim. Les journaux ne paraissaient plus et les rumeurs allaient bon train, ampliñant l’inquiétude et la peur. Les nouvelles du front étaient mauvaises, les armées disloquées. Le ressentiment était général pour tout ce qui représentait l’État et l’ordre. Les gens étaient à bout, souhaitant presque qu’il y ait un choc, d’où qu’il vienne. Révolte populaire? Coup d’État? Il y avait matière à devenir pessimiste et Amélie l’était.
Soudain, dans l’après-midi, elle entendit un grondement sourd, comme les prémices d’un orage, et vit au loin une marée d’hommes et de femmes hérissée de fusils, de gourdins, de drapeaux rouges s’approchant menaçante vers la Douma. Bouleversée, Amélie avait l’impression de revivre les journées de février qui lui avaient longtemps donné des cauchemars.
En se penchant par la fenêtre, elle découvrit une foule disparate : des ouvriers, des femmes laborieuses, des étudiants, des soldats : tous avançaient presque mécaniquement, martelant le sol de leurs pieds comme pour se donner le courage d’avancer ; ils avaient l’air épuisé, sûrement affamés, soutenus par la vodka et les slogans répétés des meneurs qui avançaient fièrement devant. Certains brandissaient des armes, d’autres les portaient contre la poitrine; des voitures volées avec des mitrailleuses fixées sur les capots les encadraient. Il y avait même des canons tirés par des volontaires; tout cet armement présageait mal de l’avenir : qu’allaient-ils en faire?
Affolée, Amélie referrna la fenêtre et sursauta quand un coup de feu éclata, suivi d’une fusillade désordonnée qui déclencha la panique. Elle vit alors que des petits groupes s’étaient postés à chaque coin de rue, voulant prendre le dessus sur la police. Les tirs s’arrêtèrent puis reprirent au milieu des gens terrorisés. Des cosaques attendaient les ordres pour intervenir, jaugeant la situation pour éventuellement faire volte-face plutôt que de se faire tuer. »

À propos de l’auteur
Fanny Tonnelier, née en 1948, vit à Cunault près d’Angers. Pays provisoire est son premier roman. (Source : Éditions Alma)

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Et le ciel se refuse à pleurer…

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En deux mots:
Fait divers en Haute-Savoie: une femme est retrouvée morte, fauchée par un sapin. Mais quelquefois les apparences sont trompeuses, surtout lorsque l’on creuse les secrets de famille…

Ma note:
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique:

« C’est vrai que Germaine elle est cruelle »

Comme l’a chanté Jacques Brel, la personne au cœur du nouveau roman de Gérard Glatt – qui meurt dès la première page – n’est pas une Sainte.

Trois hommes et une femme. Trois hommes réunis pour enterrer Germaine découverte sous un sapin, à quelques mètres de la ferme de montagne située au-dessus de Sallanches en direction du Grand Arvet. Le premier à entrer en scène est son mari. Tronchet a découvert son épouse sous un sapin, apparemment écrasée par le conifère. C’est du moins ce que conclue le docteur Echenoz dépêché sur place.
Edmé, le garçon de ferme, arrive ensuite pour tenter de soulager Tronchet. Cela fait des années qu’il aide à la ferme et fait quasiment partie de la famille. Il est du reste de la même génération qu’Antoine, le troisième homme de cette histoire qui a choisi de «monter» à Paris et qui rejoint père et ami, quasi-frère, pour les obsèques.
Si les émotions affleurent à peine, c’est sans doute à cause de la rudesse du climat et du travail ingrat qu’ils ont à effectuer pour produire le lait et le fromage, mais c’est aussi parce que Germaine avait un caractère aussi difficile que les hivers de Haute-Savoie. C’est peut-être du Québec que vient le portrait le plus juste de cette femme. Là-bas, l’expression «être une germaine» – un jeu de mots créé par la combinaison des verbes gérer et mener – sert à décrire une femme autoritaire et «contrôlante». Au fil des pages, on va découvrir comment elle a jeté le grappin sur Tronchet, comment il a été décidé qu’elle l’épouserait, comment Antoine et Edmé son entrés dans la famile et comment la situation s’est dégradée année après année.
Görard Glatt sait mieux que personne planter le décor de ses romans. Après l’Auvergne et les Monts du Forez dans Retour à Belle Étoile et dans Les Sœurs Ferrandon, voici le décor somptueux et écrasant des Alpes que l’on peut sans conteste compter comme l’un des personnages du livre. Car ici la géographie rencontre l’histoire. Ici, on doit tous les jours compter avec les caprices de la nature, en sachant qu’au mieux on réussira à en tirer de quoi nourrir sa famille.
Une fois de plus, on peut convoquer Jacques Brel: « Ces gens-là ne parlent pas ». Ou alors par bribes…
Quand Antoine retrouve son père, il n’est du reste guère besoin de mots. Ils se connaissant et s’aiment. Leurs souvenirs sont aussi le terreau de l’intrigue que l’auteur tricote patiemment jusqu’au dénouement qui, comme on peut s’en douter, réservera son lot de surprises.
Il n’y a, à mon sens, aucune raison de ranger les romans dits «de terroir» dans une catégorie inférieure. Si vous daignez vous plonger dans celui-ci, vous aurez l’éclatante démonstration que l’inverse est vrai. Ce roman est un grand roman.

Et le ciel se refuse à pleurer…
Gérard Glatt
Presses de la Cité / Terres de France
Roman
349 p., 20 €
EAN : 9782258146716
Paru en janvier 2018

Où?
Le roman se déroule en France, en Haute-Savoie, à Sallanches et dans les environs. On y évoque aussi Paris et sa banlieue.

Quand?
L’action se situe en 2016, avec quelques retours en arrière.

Ce qu’en dit l’éditeur
Août 2016, en Haute-Savoie, sous un soleil de plomb, trois hommes se retrouvent à la mort de celle qui a broyé leur vie. Souvenirs et confidences de chacun jaillissent pour faire éclater le secret de la défunte…
Morte et muette à jamais, Germaine, fauchée par un sapin. C’est son mari, Tronchet, qui en fait la macabre découverte ce jour d’août 2016. Le travail harassant de la ferme, le soin constant porté aux bêtes n’auront été finalement que le ciment et le quotidien d’un couple désassorti. Pourquoi cette femme belle, vénéneuse, ne cachant pas son désir pour d’autres hommes, s’est-elle mariée avec cet honnête paysan, qu’elle méprisait? Dans sa solitude et sa peine, car l’homme était amoureux, Tronchet a auprès de lui son grand fils Antoine, revenu de la ville le temps des funérailles, mais aussi Edmé, frère de cœur d’Antoine, toujours fidèle à la besogne, un vrai garçon de ferme. Tous trois forment une chaîne unie, solidaire, délivrée de l’emprise toxique de Germaine, mais pas de leurs tourments, de leur histoire commune, ni de leurs doutes quant aux circonstances étranges de la mort de Germaine.
Il y a aussi ce médaillon doré, que tous ont toujours vu au cou de la défunte, qui renfermait un soi-disant secret… Un secret que l’opaque Germaine n’a jamais voulu dévoiler.

Les critiques
Babelio 
France Bleu (Valérie Rollmann)
Blog Sélectrice 

Les premières pages du livre 
« Le 17 août 2016. Pour le coup, ce n’était pas de la blague, Tronchet faisait vraiment la tronche quand le docteur Echenoz est enfin arrivé. Parce que ça faisait déjà une bonne heure qu’il l’avait appelé, regrettant de n’avoir pu le faire de là où il était, bien au-dessus de la ferme où pâturaient ses vingt vaches, sur le chemin du Grand Arvet, lorsqu’il avait découvert Germaine, sa femme, sous le tronc d’un sapin qui s’était abattu sur elle et l’avait aplatie comme une crêpe. Il était d’autant plus chagrin que, de son côté, pour la dégager de là-dessous, ce qui n’avait pas été une mince affaire, on le comprendra aisément, à cause du branchage, plus épais qu’un roncier, puis la ramener, la portant dans ses bras, il lui avait fallu tout l’après-midi, en exagérant à peine. C’est assez dire que si vraiment on avait pu espérer un instant la sauver, ce qui n’était pas le cas, l’arrivée de l’homme de science, bien trop tardive, n’avait plus d’intérêt que pour constater le décès et délivrer le permis d’inhumer.
Ce 17 août, après l’avoir un tant soit peu arrangée robe et savates, cheveux aussi -, Tronchet avait soulevé Germaine, et, tout en ayant soin d’éviter les ornières du chemin, il avait entrepris de la ramener à la ferme, le regard porté loin devant, jusqu’où, semblait-il, l’horizon se heurtait aux montagnes. Son regard, que pas une larme ne troublait, ne ñxait rien de précis, hormis ce que sa mémoire fidèle à quelques instants de sa vie lui avait alors imposé. Tel ce joyeux rire, le rire d’Antoine, le ñls qu’il avait eu de Germaine, le rire aigrelet, déjà très lointain d’un enfant heureux d’apporter avec lui, comme un trésor entre ses mains, ce que sa maîtresse, un jour, lui avait appris à l’école. Cette phrase que Victor Hugo avait écrite cent quatre vingt-onze années plus tôt, en août 1825 : «La vallée de Sallanches est un théâtre; la vallée de Servoz est un tombeau; la vallée de Chamonix est un temple… », comme lui et Adèle, son épouse, accompagnés de leur petite Léopoldine, alors âgée de un an, voyageaient à travers les Alpes. « La vallée de Sallanches est un théâtre… » Antoine l’avait répétée à ses parents, lors du repas du soir, tandis que sa mère s’occupait à remplir son assiette. Tronchet, en l’écoutant, avait tenté un léger sourire. Ce que Hugo avait écrit était si vrai. »

À propos de l’auteur
Gérard Glatt est né en 1944, à Montgeron, quelques semaines avant la Libération.
Pour étrange que ce soit, ses premiers bonheurs, c’est la maladie qui les lui offre, à l’âge de sept ans, quand une mauvaise pleurésie le cloue au lit des mois et des mois. Il découvre la lecture, et cette collection fameuse du Petit Livre d’Or.
Pendant ses études secondaires à Paris, Gérard Glatt a pour professeurs l’écrivain Jean Markale, spécialiste de la littérature celtique, puis René Khawam, orientaliste renommé et traducteur des Mille et Une Nuits. A la même époque, il rencontre Roger Vrigny – l’année où celui-ci reçoit le prix Femina – et Jacques Brenner, alors éditeur chez Julliard. L’un et l’autre, qui connaissent bien « le besoin d’écrire », l’encouragent à poursuivre ses débuts littéraires: il leur a déjà soumis plusieurs textes.
Quelques années plus tard, après de fastidieuses études de droit, il entre dans l’administration des Finances où il fait connaissance de Pierre Silvain, sans doute l’une des plus fines plumes contemporaines. Pierre Silvain le soutient à son tour. En 1977, son premier roman, Holçarté, est publié chez Calmann-Lévy où il retrouve Roger Vrigny, devenu directeur littéraire. En 1981, aux éditions Hachette, sortent les Contes du Pays Basque, puis il collabore à la revue Europe. Il quitte alors l’administration pour prendre la direction d’un cabinet de conseil en commerce extérieur.
Aujourd’hui, Gérard Glatt s’est retiré pour ne plus se consacrer qu’à l’écriture. Il partage son temps entre la région parisienne et la Bretagne. Auteur d’une dizaine d’ouvrages, il publie aux Presses de la Cité Retour à Belle Etoile et Les Sœurs Ferrandon. (Source : Presses de la Cité)

Site internet de l’auteur 

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