Le temps des grêlons

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En deux mots
Tout a commencé par une sortie scolaire et ces images qui ne montraient plus les gens pris en photo. Pour le narrateur et ses amis, il va désormais falloir apprendre à vivre avec cette nouvelle donne, mais aussi s’occuper de ceux qui tombent du nuage, retrouvant une vie après le temps saisi par le cliché.

Ma note
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique

Au-delà du cliché

Dans un second roman étonnant et détonnant, Olivier Mak-Bouchard imagine un monde dans lequel le numérique a des ratés, qu’il ne peut plus enregistrer les personnes sur les photos et au-delà de cette panne qu’il recrache des données, faisant revivre ceux qui ont été photographiés. Un conte tout à la fois drôle, tendre et profond.

L’événement aurait pu passer inaperçu, d’autant que Mme Philibert, leur prof de français avait prévenu ses élèves que les indiens ne devaient pas être pris en photo, parce qu’ils avaient peur de perdre leur âme. Et même si ces indiens ne sont que des employés d’Ok Corral, le parc d’attraction provençal où le narrateur passe la journée avec sa classe, ils n’apparaissent pas sur les photos. Si la première hypothèse est un souci technique sur les smartphones, il va bien falloir se rendre à l’évidence. Le problème est bien plus grave, d’autant qu’il va vite s’étendre à la planète toute entière. Tous les humains ne figurent plus sur les clichés que l’on prend d’eux. Les premières analyses montrent que le traitement des données par le cloud est défaillant. «Là, ce que le Nuage relâche, ce n’est pas des 0 et des 1, du binaire. C’est autre chose, un langage qui n’a ni queue ni tête, de la data d’un nouveau type, qui s’échappe du Nuage au milieu du reste en petits paquets. Des micro-averses qui tombent, comme çà, alors qu’on n’a rien demandé. Il ne s’agit pas de flux, qui sont vectorisés; non, le Nuage nous crache dessus des micro-averses de data sauvage.» Ces averses de grêlons effacent les personnes. Du coup le cinéma, la télévision et la photo elle-même perdent de leur intérêt. À contrario le dessin connaît une nouvelle jeunesse.
Mais dans ce fantastique roman, nous sommes loin d’être au bout de nos surprises. Quand la gare de la Ciotat est envahie par un groupe de personnes habillées comme au début du siècle dernier, on pense à une flash-mob, avant de se rendre compte qu’il s’agit des personnages tombés de l’un des premiers films des Frères Lumière. Du coup un policier a l’idée de remonter aux origines de la photographie et va dénicher l’homme qui figurait sur la première photo de Daguerre! Les grêlons sont alors le seul sujet de conversation. Même le Président de la République s’en empare, bien qu’il n’ait pas d’explication plausible à livrer. En revanche, il doit mettre en place un système permettant d’identifier ces personnes et leur éviter de causer de gros dommages en descendant de leur nuage. Car si la résurgence des photographiés est chronologique, elle va très vite devenir ingérable, la production de photo étant exponentielle au fil du temps.
Jean-Jean et Gwen, les deux copains de classe du narrateur, vont du reste jouer un rôle dans les gestion des grêlons. Lui-même se voyant confier le rôle de leur rafraîchir la mémoire, de les illuminer, surtout s’ils s’agit de célébrités telles qu’Arthur Rimbaud. Une tâche qui va s’avérer très délicate, voire risquée.
Pour son second roman Olivier Mak-Bouchard, qui nous avait épaté avec Le Dit du Mistral, fait preuve de la même imagination débridée, mais creuse davantage le côté fantastique. Autour de l’histoire de la photographie, qui est habilement retracée au fil du livre, le romancier explore cette manie du selfie, ce besoin d’avoir des images, de remplir sa vie. Avec humour et un sens affûté de l’autodérision, il va nous prouver qu’Arthur Rimbaud a encore de beaux restes, que l’amour peut s’immiscer où on ne l’attend pas et qu’une mère a eu une vie avant d’enfanter. Derrière la joyeuse comédie peuvent se cacher quelques profondes réflexions et la belle confirmation du talent d’Olivier Mak-Bouchard.

Le temps des grêlons
Olivier Mak-Bouchard
Éditions Le Tripode
Roman
352 p., 19 €
EAN 9782370553188
Paru le 3/03/2022

Où?
Le roman est situé en France, principalement en Provence, dans la région d’Apt et Avignon.

Quand?
L’action se déroule de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
Du jour au lendemain, partout sur la planète, c’est la stupéfaction : les appareils photographiques ont cessé de fonctionner, ils refusent d’enregistrer la présence des personnes ! C’est à croire que l’univers, saturé de nos présences, a décidé de se révolter contre l’espèce humaine. En Provence, trois enfants doivent grandir avec ce phénomène inexplicable, et voient leur monde basculer dans une direction que personne n’aurait imaginée…
Olivier Mak-Bouchard est l’auteur du Dit du Mistral (Le Tripode, 2020). Avec Le Temps des Grêlons, il nous offre un second roman tout aussi étonnant, une fable envoûtante, douce et âpre, qui questionne une nouvelle fois les menaces qui pèsent sur notre temps.

Les critiques
Babelio
Lecteurs.com
goodbook.fr
Diversions magazine
Ernestmag (Entretien avec l’auteur)
Actualitté

Extrait
« Lorsque les appareils photo se sont arrêtés c’est de ce côté-là qu’on avait creusé pour trouver une explication. On a regardé à nouveau, on a renvoyé de la data pour voir.
Le Nuage est toujours là, et il joue toujours avec la data. Impossible de lui faire avaler ou cracher ce qu’on veut, ça n’a pas changé. En revanche, ce qui est nouveau, c’est qu’il a en plus commencé à lâcher de l’information sans qu’on le lui demande. On s’en est même pas aperçu, au début, il a vraiment fallu regarder deux fois avant d’arriver à voir quelque chose. C’est infinitésimal, presque rien par rapport aux flux qui opèrent encore normalement. Mais le plus curieux, c’est que ce n’est même pas de la data, ou moins pas la même structure que celle avec laquelle on a l’habitude de traiter.
Là, ce que le Nuage relâche, ce n’est pas des 0 et des 1, du binaire. C’est autre chose, un langage qui n’a ni queue ni tête, de la data d’un nouveau type, qui s’échappe du Nuage au milieu du reste en petits paquets. Des micro-averses qui tombent, comme çà, alors qu’on n’a rien demandé. Il ne s’agit pas de flux, qui sont vectorisés; non, le Nuage nous crache dessus des micro-averses de data sauvage.»
L’Homme le Plus Riche du Monde a fait une pause. On s’entait qu’il voulait nous laisser le temps de digérer. » p. 100

À propos de l’auteur
MAK-BOUCGARD_OLIVIER_DROlivier Mak-Bouchard © Photo DR

Olivier Mak-Bouchard a grandi dans le Luberon. Il vit désormais à San Francisco. Il est l’auteur au Tripode du Dit du Mistral (prix Première Plume, 2020) et du Temps des Grêlons (2022). (Source: Éditions Le Tripode)

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Vie Prolongée d’Arthur Rimbaud

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Vie prolongée d’Arthur Rimbaud
Thierry Beinstingel
Fayard
Roman
416 p., 20,90 €
EAN : 9782213687490
Paru en août 2016

Où?
Le roman se déroule principalement en France, dans les Ardennes et en proche Belgique, à Charleville-Mézières, Givet, Voncq, Attigny, Roche, Reims, Lille, Namur, Liège, Charleroi, Bruxelles, ainsi qu’à Marseille ou Paris. Les grands voyages d’Arthur Rimbaud sont également évoqués : à Londres, Chypre, Milan, Stuttgart, Aden, Harar, Zeilah.

Quand?
L’action se situe de 1891 au du XXe siècle.

Ce qu’en dit l’éditeur
A la suite d’une confusion, c’est avec la dépouille d’un inconnu qu’Isabelle Rimbaud fait le trajet de Marseille à Charleville.
Déjouant les pronostics des médecins, Arthur, lui, se remet.
Et ce sont les journaux qui lui apprennent sa mort…
Jadis poète, naguère marchand, Jean-Nicolas-Arthur Rimbaud sera-t-il capable de s’inventer un troisième destin ?
Relancé dans la tourmente de l’histoire, de l’affaire Dreyfus aux tranchées de la Première Guerre mondiale ; assistant stupéfait à l’élaboration de son propre mythe, à la construction de sa légende littéraire, celui qui écrivit « Je est un autre » avait-il imaginé à quel point cette phrase se révélerait prophétique ?

Ce que j’en pense
***
Ceux qui suivent la carrière de Thierry Beinstingel ne seront pas surpris de voir l’auteur s’emparer de la vie d’Arthur Rimbaud. «Faux Nègres » était un titre emprunté à l’auteur des Illuminations et cette plongée dans les Ardennes était déjà l’occasion pour lui d’évoquer le poète et, sans doute, de poser les jalons de ce roman qui imagine ce qui se serait passé si le jeune homme n’était pas mort à l’hôpital de la Conception de Marseille le 10 novembre 1891 d’une tumeur au genou.
À la suite du fâcheux concours de circonstances, la dépouille d’un pauvre hère est confondue avec celle du poète et sa sœur Isabelle se voit confier le cadavre d’un inconnu qu’elle va accompagner jusqu’à sa dernière demeure.
Pendant ce temps Arthur Rimbaud se remet de sa maladie et voit là l’opportunité de commencer une nouvelle vie. S’il a une jambe en moins, il a aussi une vie à rattraper.
Il prend la direction du nord, veut se rapprocher de ses terres natales mais rester fidèle à sa promesse de ne plus écrire de poésie. Par étapes, il va devenir un entrepreneur respecté sous le pseudonyme de Nicolas Cabanis. Il seconde d’abord un horloger, avant de s’associer avec l’exploitant d’une carrière de marbre.
De sa vie antérieure, il ne veut rien retenir, si ce n’est une dette envers Djami qui l’a accompagné durant ses expéditions. En se faisant passer pour un ami africain d’Arthur, il va prier sa sœur Isabelle de lui faire parvenir une somme d’argent. Cette dernière sera du reste la seule à connaître le subterfuge et à rendre visite à Nicolas, à partager quelques instants de cette nouvelle vie.
Si elle croise Marie, l’épouse de Nicolas, suivra la naissance de leurs enfants et comprendra la douleur de son frère quand sa jeune épouse mourra, elle mettra davantage d’énergie à faire vivre l’œuvre du poète. On la voit contacter éditeurs, journalistes, écrivains pour reprendre point par point ce qui se publie. Elle souligne les erreurs, les contresens, argumente, va chercher des informations et corrige. Un acharnement qui ira jusqu’à énerver Verlaine, mais permettra aussi de ne pas oublier les merveilleux textes qu’il a laissés. Son beau-frère, Paterne Berrichon, sera lui aussi un ardent défenseur et illustrateur de sa vie et de son œuvre, lançant par exemple la souscription au monument à Arthur Rimbaud et rassemblant écrivains et artistes.
Nicolas lui a choisi de tirer un trait sur ce passé. Et si, en parcourant la presse, il découvre ce qu’on dit de lui, il n’en retire qu’amertume et incompréhension. Ses exégètes font tous abstraction des quinze années en Afrique qui l’avaient profondément changé. Il était devenu «un homme courageux qui construisait sa vie dans ces contrées inhospitalières.»
Tout juste peut-il esquisser un sourire en découvrant le texte de son ancien professeur de rhétorique Georges Izambard retraçant les facéties de son élève. Les hommages et même les rééditions de ces textes ne l’intéressent plus. Les poètes sont « maudits car on décide pour eux, on parle en leur nom, mais toujours derrière eux, toujours en retard.»
Il s’intéresse davantage à l’économie, aux progrès des techniques. Il n’a de cesse de développer son entreprise, d’installer des machines, d’associer des compétences.
Pour Thierry Beinstingel, cet engagement total apporte la preuve que l’homme n’a pas changé. Il a déjà été meneur d’hommes en tant que poète, en «traînant à sa suite les rimailleurs hésitants», puis en tant que négociant en Afrique où il a su s’entourer des «caravaniers les plus hardis» et désormais en tant que gérant, en dirigeant «cent métiers».
Mais cette belle carrière va se heurter à la folie des hommes. La Première Guerre mondiale va le plonger de un grand dénuement, victime et témoin, seul et entouré de centaines de morts et de blessés.
Pourtant l’auteur du Bateau Ivre saura une fois encore rebondir et se glisser «avec entrain et sans regret dans sa troisième vie».
S’il apparaît que l’exofiction – un genre littéraire qui crée une fiction à partir d’éléments réels – marque une tendance lourde de cette rentrée littéraire, alors on peut se réjouir. Surtout si tous les romans sont de la veine de celui-ci, à savoir solidement documentés. Car ce n’est qu’ainsi que l’uchronie prend tout son sens, en crédibilisant le scénario imaginé. C’est le cas ici et c’est pourquoi je vous conseille la découverte de cette vie prolongée.

Autres critiques
Babelio 
Blog Just one more page 

Extrait
«Les poètes ne meurent jamais. Il ressuscite donc, Arthur Rimbaud. Au début, c’est une conscience aléatoire, parfois un œil ouvert sur la jeune religieuse qui nettoie la chambre. On met cela sur le compte d’un réflexe, d’un sens encore présent, l’ouïe peut-être. Puis ces éclairs deviennent plus fréquents. Un matin où elle le rase, il ouvre complètement les deux yeux. Le médecin vient, braque la lampe dans la pupille qui cligne par réflexe, puis s’ouvre à nouveau, regard inexpressif. Quelques jours plus tard, on le retrouve en bas du lit. On l’attache. Le médecin revient, regarde les plaies : toujours l’aspect cartonneux, brun, mais comme figé, comme si la tumeur ne progressait plus. Le lendemain, le blessé bouge la bouche, fait mine de parler. La religieuse rapporte le fait, prononce le mot « miracle » à la mère supérieure. Comme vous y allez, ma fille ! Il faut pourtant se rendre à l’évidence. Un jour où la jeune religieuse humecte les lèvres entrouvertes de l’amputé, elle croit entendre « merci ». Elle recommence et il prononce encore le même mot. On appelle le médecin. La jeune religieuse refait le geste, verse cette fois un peu trop d’eau qui déborde sur le drap. On entend distinctement « pardon ». On retire les liens qui l’attachaient. La suite va très vite. Un après-midi, il examine longuement sa main et son bras abîmés, les tourne dans tous les sens. Les progrès sont étonnants. Il arrive à redire « merci » et « pardon » et aussi d’autres mots dans une langue qu’on ne comprend pas. Il parle surtout lorsque la jeune religieuse est là. On la fait venir souvent, la mère supérieure reste parfois derrière elle et aussi le médecin. Encore deux semaines et le voilà assis sur son lit, calé sur des oreillers. La jeune religieuse lui donne à manger de la soupe à la cuillère. Il veut essayer tout seul, mais il renverse l’assiette. Le directeur finit aussi par venir. Il examine à son tour les plaies figées dans une sorte d’attente, recouvertes de cette étrange substance faite de peaux desquamées et de corne brunâtre qui ressemble aux écailles d’un serpent. Extraordinaire ! Il faudrait faire une communication à la société des sciences, lance-t-il au médecin, tout en pensant aux retombées certaines pour sa future rosette. Il l’oubliera vite : le député lui annonce peu après sa nomination prochaine à un plus vaste hôpital.
Rimbaud retrouve assez vite l’usage de la parole. La première chose qu’il demande, c’est de se dresser. On l’aide à se lever, mais c’est difficile. Il lui faut plusieurs jours pour trouver la force de rester en équilibre, échassier tenant d’une main le rebord de la table de nuit, le plat du mur. Un homme debout et la mort s’éloigne, la guérison si inattendue devient possible. La jeune religieuse joint les mains avec ferveur, regarde souvent le ciel : Oui mon Dieu, vous existez ! Une étrange langueur la soulève quand elle regarde l’objet du miracle, le visage émacié, les yeux gris, mobiles, bien vivants. Bien sûr, la jambe en moins, d’accord, l’étrange peau de serpent qui recouvre son côté droit, mais enfin, merveille que cette vie ! Le soir, elle prie longtemps dans la solitude de sa cellule. Ses dévotions sont infinies et douces, ne cessent que lorsque la chandelle vacille. L’amputé ressuscite par sa ferveur, le blessé renaît par sa dévotion, l’homme aux beaux yeux gris guérit par ses extases. Il revit parce qu’elle aime Dieu.
Enfin, vient le jour où il demande où est sa sœur. Le directeur est bien ennuyé. Il redoute depuis longtemps cet instant. Il a compris la méprise et l’enchaînement des circonstances ne lui est pas favorable : il avait déserté son poste pour aller à la chasse. Le médecin en avait profité pour prendre la poudre d’escampette et le seul employé qui restait était cet alcoolique incapable, tout juste bon à larmoyer ses « pauvre homme ! » ou « pauvre femme ! ». Comment annoncer à quelqu’un qu’il est mort et enterré, à la suite d’une négligence, d’une erreur, d’une lamentable substitution avec un cadavre inconnu, réclamé par personne ? »

A propos de l’auteur
Né à Langres en 1958, Thierry Beinstingel est cadre dans les télécommunications. Il a publié, aux éditions Fayard, Central (2000), Composants (2002), qui a reçu une mention au prix Wepler 2002, Paysage et portrait en pied-de-poule (2004) et C.V. roman (2007). (Source : Éditions Fayard)

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