Marche en plein ciel

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En deux mots
Un besoin d’air, de nature, de voyage et voici la narratrice en route pour Clermont-Ferrand d’où elle marchera jusqu’en Provence. Sur les pas de Stevenson, elle va cheminer avec Marvejols et son ânesse, rencontrés en chemin.

Ma note
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique

Sur les pas de Stevenson dans les Cévennes

Gwenaëlle Abolivier a choisi le voyage à pied, de Clermont en Provence, pour se ressourcer et (re)découvrir l’œuvre de Stevenson qui l’a précédé sur ces chemins. Un cheminement érudit et revigorant!

Qui n’a pas ressenti ce besoin, après le confinement, de prendre l’air, de sortir de son quotidien, de s’ouvrir au monde. La narratrice de ce court mais savoureux roman ne tergiverse pas. Nourrie des écrits de bon nombre de glorieux prédécesseurs, de Stevenson à Bouvier, elle prend le train pour Clermont-Ferrand. Depuis le cœur de l’Auvergne, elle entend marcher jusqu’en Provence en essayant d’éviter les routes asphaltées et les grands centres urbains.
À peine les premiers kilomètres parcourus, elle trouve la confirmation de son intuition: «La marche nous augmente intérieurement d’un espace qui fait que nous devenons plus grands que nous-mêmes. Quelque chose en nous s’ouvre et s’étire, en même temps que notre conscience se déploie. On s’enrichit d’une présence au monde, d’un regard plus large et plus précis, d’une empathie envers les autres. Tout autour de nous se met à exister.»
Au détour du chemin, elle va faire la connaissance d’un voyageur qui partage son état d’esprit. Marvejols a choisi de faire la route avec Luce, une ânesse. Comme le faisait Robert Louis Stevenson. L’occasion de lui raconter les circonstances qui ont mené le futur auteur de L’Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde et de L’île au trésor à parcourir les Cévennes. Ce qui va s’avérer un voyage initiatique a commencé par un besoin de fuir le carcan familial et de tenter d’oublier un chagrin d’amour. Avec son âne, qu’il maltraite tout au long de la route, il va cheminer dans une contrée inconnue pour lui et apprendre à observer et à noter, qualités qui lui seront très utiles quand il explorera la Californie et parcourra les mers du sud. Et si les voyageurs d’aujourd’hui se rendent très vite compte que la route prise par l’auteur écossais n’existe plus ou très partiellement et que RLS est d’abord un outil de marketing, ils ne peuvent s’empêcher de faire le parallèle avec leur voyage. À chaque fois qu’ils se retrouvent au détour du chemin Marvejols en redemande, avide de connaître toute l’histoire. Alors l’érudition de notre narratrice fait merveille, ajoutant bientôt un autre voyageur à son récit, John Muir. Car «tous deux furent contemporains et originaires de la côte est de l’Écosse. Ils ont reçu la même éducation presbytérienne: rigide, brutale, où l’instruction et la religion étaient centrales. (…) Ils auront, tous deux, la chance de découvrir des forêts et des grands espaces naturels non encore défoliés.»
Tout à la fois ode au voyage à pied et bréviaire de la lenteur, ce roman est aussi un guide pour observer la nature et la respecter. Au-delà de la performance, ces pas sur les chemins d’une autre France sont aussi un appel à s’émerveiller, à échanger Un rendez-vous avec le meilleur de ce sentiment à redécouvrir sans cesse, l’humanité.

Marche en plein ciel
Gwenaelle Abolivier
Éditions Le Mot et le Reste
Roman
122 p., 13 €
EAN 9782361399023
Paru le 6/01/2022

Où?
Le roman est situé en France, de Clermont-Ferrand jusqu’à la Provence, en passant par Neussargues, Issoire, Aumont-Aubrac, Chassaradès, Sainte-Énimie, Meyrueis, Avèze, Montdardier, Navacelles. Des souvenirs de Rennes, du Vercors, des Pyrénées, de Corse ou encore du Portugal sont également évoqués.

Quand?
L’action se déroule de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
Partie dans les Cévennes, sur les traces de Stevenson, Gwenaëlle Abolivier orchestre une ode à la liberté.
En arpentant le chemin emprunté par Robert L. Stevenson il y a plus d’un siècle, Gwenaëlle Abolivier harmonise deux passions : l’écriture et la marche. Chaque pas qui l’éloigne de l’immobilité du quotidien, l’ouvre davantage à la littérature ; elle fait corps avec le paysage cévenol qui accueille son évasion. Sous le ballet aérien des milans royaux, elle partage l’errance du voyageur Marvejols et de Luce, son ânesse, – rencontrés au détour des sentiers – le temps d’une parenthèse consacrée à l’écoute du vivant. Au fil de ce voyage où elle tutoie le ciel, la solitude lui ouvre l’espace nécessaire pour réfléchir à la course du monde à travers le pays découvert. Bien plus qu’un journal de marche, Gwenaëlle Abolivier nous offre une méditation en mouvement où le rythme et l’effort de ses pas impulsent une écriture poétique qui délivre le récit.

Les critiques
Babelio
Lecteurs.com

Le Télégramme
Journal Ventilo (Simone d’Abreuvoir)
Blog Les passions de Chinouk
Bog Les petites lectures de Maud
Blog La constellation livresque de Cassiopée


Gladys Marivat vous invite cette semaine à découvrir Marche en plein ciel de Gwenaëlle Abolivier © Production Le jour du Seigneur

Les premières pages du livre
« En ce début de printemps, la France est un pays aux regards vides et aux volets clos. Dans cette perte des repères, plus personne ne sait quelle heure et quel jour sont accrochés aux horloges de l’existence. Seuls les bébés aux yeux ronds apportent la preuve que je suis bien vivante. Je suis montée dans le dernier train avant que la ville ne se renferme totalement sur elle-même. Direction Clermont-Ferrand. « Finis les temps modernes », crie un homme qui se trouve dans le même compartiment. « Miser le tout pour le tout ! » lance-t-il à nouveau. Il porte des chaussures aux reflets de nuage et ne cesse de dire que « le temps n’a plus la même valeur. Le monde s’est figé. L’heure est à la fugue. »
Mon idée a germé en l’espace d’une nuit : partir marcher, traverser les grands pâturages du centre de la France, retrouver une liberté de mouvement sur les anciens chemins de transhumance qui relient l’Auvergne à la Provence. Ces fameuses drailles ont vu passer tant de chemineaux accoutumés et de pèlerins assoiffés.
Je viens d’arriver dans un paysage de volcans endormis qui rappelle en miroir inversé une étrange vision des antipodes : Auckland, la capitale du long nuage blanc, où s’étendent entre ses mamelons océaniens des habitations légères. C’est le souvenir du bout du monde qui surgit peu après la démesure des parkings déserts et des grandes surfaces. À la sortie de la ville, l’eau des rivières dévale, épaissie de limon rouge. Les derniers orages ont ébranlé la région et la terre continue de vomir des cataractes impressionnantes. Les rares passagers sont apparemment habitués à ces épisodes de crues effrayantes qui ont éventré les routes et emporté les ponts. Perdus dans leurs pensées, ils regardent, résignés, ce spectacle de désolation. À Neussargues, j’ai attrapé de justesse un autre train, plus petit, plus lent. Je m’enfonce toujours plus loin dans la fourrure du paysage en me disant qu’il me faudrait plusieurs vies pour goûter à tous ces villages perchés.
C’est à Issoire, dans un clin d’œil de lumière, que j’ai vu les premiers signes : un couple d’oiseaux, ailes digitées en lente descente hélicoïdale, dessine des cerceaux dans un dégradé de cyanotype. Quels sont ces rapaces qui planent en rêve d’Arizona ? Aussitôt mon esprit s’envole. Je me détache de la réalité à mesure que le convoi épouse le chaos des gorges. Malgré les soubresauts du monde, quelle aventure reste encore possible ? Aussitôt, je dégaine mon petit carnet que je porte à la ceinture. En catapultes de phrases, j’écris partout et dès que je le peux. Les oiseaux réapparaissent dans un vol hésitant et finissent par se poser sur le toit d’un entrepôt. Je ne suis plus qu’un point immobile dans ce train qui roule comme un navire et qui à présent vogue dans le cœur rouge du monde. Dans un demi-sommeil les mots montent en panache de méditation : des paroles clairement articulées ricochent sur les rideaux de plantes, canevas tissés de lianes et de hautes fougères. Tout ce vert phosphorescent pour renaître. La pluie continue de s’abattre en baleines de survie. Le ciel en est labouré et se teinte à présent d’un bleu horizon.
*
Après une première nuit dans le village d’Aumont-Aubrac, je me suis engagée sur le chemin, un ancien camino qui emprunte sur plusieurs kilomètres celui de Compostelle. Face à la violence de la dernière catastrophe, je ressens une tristesse insondable. Les ravages sur l’environnement, la destruction programmée de la planète, et plus fondamentalement la perte de la beauté provoque chez moi une inquiétude. À la sortie de la ville, un graffiti tagué sur le mur d’un tunnel m’interpelle et ne me quittera plus : « Quelle est la profondeur de ton abysse ? » Ce vide, tout ce grand vide comme ce ciel sans avion, je cherche à le combler. Dans cette quête d’une nouvelle voie, je plonge mon regard dans le bitume. Le temps aussi est devenu insondable. La marche sera mon antidote : partir pour arpenter les chemins de mes pas cadencés. Les miens comme ceux qui m’ont précédée. Ils tapent, remontent du sol et sonnent comme la cloche des âmes perdues. Sur ce trajet solitaire, les grands espaces se métamorphosent en pensées sauvages. Certaines se balancent en pétales de violettes, d’autres crépitent en éclats de quartz. Toutes ces coquilles telluriques me tombent au fond de l’estomac et créent le précipité de ma démarche. Je veux me nourrir des vallées glaciaires parsemées de bombes volcaniques et de cailloux de granite. Je marche pour me laver, je marche contre le vide, je marche et en appelle au jour d’après.
*
Hier soir, il y a eu un énorme fracas qui venait de derrière les montagnes et les voiles du jour. C’était le tonnerre comme rarement je l’ai entendu. Un ébranlement du monde en son entier : la forêt de tous ses troncs et de toutes ses feuilles a vacillé ainsi que tous les animaux qui la peuplent. L’énorme secousse s’est prolongée dans mon corps et s’en est suivie une pluie torrentielle. Enroulée dans ma cape de feutre, je suis restée des heures lovées sous un gros talus. Je vibre de me sentir en vie au cœur des éléments tout en sentant monter en moi l’intuition du désastre qui se prépare à la surface du monde. Plus rien ne peut désormais m’arrêter et c’est heureux que le pays que je parcours soit vaste. Depuis, plusieurs jours, je progresse sur le dos de volcans endormis. La vallée de terre ocre est un jardin de noisetiers sauvages et de noyers.
*
J’ai toujours aimé marcher. Cela remonte à l’enfance et à l’été de mes onze ans. Mes parents m’avaient inscrite en colonie de vacances. Pour la première fois, j’allais découvrir les contreforts des Alpes. Je me revois au pied d’un car scolaire garé sur un parking chauffé à blanc. Mes cheveux sont coupés au bol, j’ai un sac à dos rouge et mon petit air d’enfant sage comme une image. Une photo en témoigne ! Depuis Rennes, le temps d’une nuit et d’un voyage par la route, j’étais de ce groupe de gamins propulsés dans le massif du Vercors. Là, en l’espace de trois semaines, je suis devenue en partie la voyageuse que je suis restée. Ce fut une expérience fondatrice où j’ai découvert le bivouac et la marche dans les montagnes à vaches. La fatigue, l’endurance aussi, la lenteur : poser un pied après l’autre. Avant je ne savais pas me déplacer autrement qu’en courant et, là, j’ai appris à ralentir et à respirer en silence, à mesurer mon effort. Apprendre à boire lentement quand on a très soif est une chose étonnante. Je ne l’ai jamais oublié. Tout s’est joué, cet été-là, sur les chemins d’altitude, dans l’itinérance et le passage des vallées, à travers les pâturages fleuris, les chemins creux tapissés de fraises sauvages et de prêles : ces petits bambous verts des temps préhistoriques. Le bonheur, c’était l’aventure à hauteur d’enfant, l’eau fraîche des fontaines qui dévalait et tintait comme les cloches des troupeaux, le grand air et la liberté des bivouacs loin du cadre familial, les soirées allongées près du feu à guetter les étoiles filantes ou encore à l’abri des tentes à écouter la pluie et le grondement des orages. Le lendemain, on repartait vers l’inconnu. Depuis, je ne cesse de vouloir revivre ces premières émotions, comme un éternel recommencement, …

Extraits
« La marche nous augmente intérieurement d’un espace qui fait que nous devenons plus grands que nous-mêmes. Quelque chose en nous s’ouvre et s’étire, en même temps que notre conscience se déploie. On s’enrichit d’une présence au monde, d’un regard plus large et plus précis, d’une empathie envers les autres. Tout autour de nous se met à exister. C’est cette même émotion que j’ai recherchée et prolongée en traversant les Pyrénées, de l’Atlantique à la Méditerranée, dans la solitude des sommets et la joie d’un amour naissant, ou encore en faisant le tour du massif du Queyras dans les Alpes. » p. 13

« Je pense à Stevenson et à l’appel du sauvage qu’il ressentira lui aussi en parcourant les Cévennes puis l’Amérique du Nord. À y regarder de près, il y a plusieurs points de convergence entre John Muir et Robert Louis Stevenson. Tous deux furent contemporains et originaires de la côte est de l’Écosse. Ils ont reçu la même éducation presbytérienne: rigide, brutale, où l’instruction et la religion étaient centrales. L’apprentissage de John Muir fut encore plus strict. Il a grandi dans une famille nombreuse avec un père vraiment dur qui menait son petit monde d’une main de fer. John raconte comment enfant son père lui faisait apprendre un si grand nombre de versets de la Bible qu’à l’âge de onze ans il connaissait par cœur quasiment l’Ancien Testament et la totalité du Nouveau. Au moindre faux pas, il recevait de sévères raclées. Robert Louis, quant à lui, était un enfant unique, à la santé très fragile, élevé dans une famille aisée d’Édimbourg. Il fut choyé entre autres par Cummy, sa nurse qu’il adorait et qu’il considérait comme sa deuxième mère. C’est elle qui lui apprit des cantiques et certains versets de la bible. John Muir et Robert Louis Stevenson auront, tous deux, la chance de découvrir des forêts et des grands espaces naturels non encore défoliés. » p. 70-71

À propos de l’auteur
ABOLIVIER_Gwenaelle_©Dany_GuebleGwenaëlle Abolivier © Photo Ouest-France – Dany Guèble

Journaliste et auteure, Gwenaëlle Abolivier est une voix de France Inter. Elle a présenté pendant plus de vingt ans des émissions de grands reportages. Aujourd’hui, elle se tourne vers l’écriture tout en continuant d’intervenir sur les ondes et dans des revues. Elle a notamment écrit Vertige du Transsibérien publié chez Naïve. Depuis février 2022, elle assure la direction artistique de la Maison Julien-Gracq à Saint-Florent-le-Vieil (Mauges-sur-Loire). (Source: Éditions Le Mot et le Reste / Ouest-France)

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Saint Jacques

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En deux mots
Au décès de sa mère, Paloma hérite d’une maison dans les Cévennes et d’un cahier qui va faire le lumière sur un secret de famille. Arrivée sur place, elle revoit ses plans et décide de ne pas vendre, mais de rénover la bâtisse. Les rencontres qu’elle va alors faire vont bousculer sa vie.

Ma note
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique

Paloma dans les Cévennes

Avec Saint Jacques on retrouve l’ouverture aux autres et l’humanité dont Bénédicte Belpois avait fait montre avec Suiza. Ce portrait de femme, qui part s’installer dans les Cévennes après un héritage, est bouleversant.

Ce n’est pas de gaîté de cœur que Paloma prend la direction de Sète. Elle se rend aux obsèques de sa mère et va retrouver sa sœur avec laquelle est n’entretient plus guère de relations, sinon conflictuelles. Elle fait contre mauvaise fortune bon cœur et n’a qu’une hâte, retourner à Paris où l’attend sa fille Pimpon et son travail. Elle est donc très surprise lorsque le notaire lui annonce qu’elle hérite d’une maison dans les Cévennes, sa sœur conservant pour sa part l’appartement de Sète.
Mais Paloma n’est pas au bout de ses surprises. Un cahier – à n’ouvrir qu’une fois sur place – accompagne cette première annonce. Ce qu’elle y découvre va la laisser pantoise: cette maison appartenait à son père biologique. Michel, le père qui l’a élevée, ayant juré de garder le secret sur ses origines.
Dans cette montagne délaissée où ne vivent plus qu’une poignée d’habitants, elle s’imagine vendre au plus vite son bien, avant de revenir sur son choix initial et la garder. «J’avais pris mes décisions dans l’urgence, je me doutais que si je gardais un peu de raison, j’aurais fait marche arrière. Je m’étais jetée dans un tourbillon de démarches administratives pour pouvoir oublier la petite voix en moi qui me susurrait que j’étais folle.» Elle se met alors en disponibilité de l’hôpital où elle travaille et décide de s’installer en tant qu’infirmière libérale, achète une voiture et vend son appartement. «Pimpon avait été d’accord sur tout. Elle resterait à Paris pour ses études, je ne pouvais pas l’embarquer totalement dans ma folie, elle viendrait seulement aux vacances.»
La seconde partie du roman nous raconte la nouvelle vie de Paloma dans un environnement peu accueillant. Pourtant, à l’image de Rose sa voisine, la distance et la méfiance vont faire place à l’entraide et à la solidarité. Même Jacques, l’entrepreneur appelé sur place pour établir un devis de réfection de la toiture, va finir par trouver du charme à cette femme aussi courageuse qu’inconsciente. Car jamais, avec ses maigres revenus, elle ne pourra payer les travaux. Car il faut tout refaire, déposer les lauzes, une partie de la charpente, et refaire toute la toiture. Après un repas arrosé, il accepte toutefois de sa lancer dans cette réfection avec Jo, le jeune employé qui va ainsi pouvoir montrer son savoir-faire.
Comme dans Suiza, Bénédicte Belpois raconte avec talent cette histoire simple mais touchante, faisant de ce microcosme un concentré d’humanité. Les liens se créent et se renforcent au fil des pages. Et même si le drame n’est jamais loin, ces moments de bonheurs simples, cette envie de partage fait un bien fou.

(Signalons que ce beau roman paraît en mai dans sa version poche chez Folio)

Saint Jacques
Bénédicte Belpois
Éditions Gallimard
Roman
160 p., 14 €
EAN 9782072932304
Paru le 8/04/2021

Où?
Le roman est situé en France, à Paris, puis à Sète, Alès et dans les Cévennes.

Quand?
L’action se déroule de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
À la mort de sa mère, Paloma hérite d’une maison abandonnée, chargée de secrets au pied des montagnes cévenoles. Tout d’abord décidée à s’en débarrasser, elle choisit sur un coup de tête de s’installer dans la vieille demeure et de la restaurer. La rencontre de Jacques, un entrepreneur de la région, son attachement naissant pour lui, réveillent chez cette femme qui n’attendait pourtant plus rien de l’existence bien des fragilités et des espoirs.
Ode à la nature et à l’amour, Saint Jacques s’inscrit dans la lignée de Suiza, le premier roman de Bénédicte Belpois, paru en 2019 aux Éditions Gallimard. Avec une simplicité et une sincérité à nulles autres pareilles, l’auteure nous offre une galerie de personnages abîmés par la vie mais terriblement touchants.

Les critiques
Babelio
Lecteurs.com
goodbook.fr
RTS (Jean-Marie Félix – entretien avec Bénédicte Belpois)
Maze (Emma Poesy)
L’Est Républicain (Catherine Chaillet)
Blog Les lectures de Cannetille
Blog Loupbouquin
Blog Le domaine de Squirelito
Blog Les livres de Joëlle

Les premières pages du livre
« Françoise m’a appelée, je ne me souvenais plus qu’elle avait mon numéro. Elle a dit simplement: «Maman est morte.» Elle voulait que je vienne, au moins ça. Elle s’occupait de tout, mais il y avait le notaire, je ne pouvais pas y échapper. J’ai raccroché. Je me suis répété : « Camille est morte » plusieurs fois. Cela ne changeait rien, ça ne me faisait pas mal comme cela aurait dû. Elle était morte depuis longtemps pour moi.
J’ai réveillé Pimpon, je me suis assise sur le bord de son lit et j’ai annoncé abruptement comme Françoise : « Camille est morte », sans même lui dire bonjour. Elle m’a pris la main, encore à moitié endormie et m’a juste demandé : « Qu’est-ce que tu vas faire ? »
Je ne savais pas vraiment. Il fallait que j’y aille, bien sûr, pas moyen de déroger. Je devais prendre quelques jours de congé et descendre m’occuper de tout ça, nous le savions toutes les deux.
«Je ne peux pas venir, maman, mes partiels commencent demain.
— Ça ira, ne t’inquiète pas, chérie.»
J’ai appelé ma surveillante. Pour une fois, elle a été compréhensive, le décès d’une mère tout de même, c’était un motif sérieux d’absence, pas une gastro-entérite. En reposant le combiné je me suis demandé qui allait s’y coller à ma place : le service était plein et nous étions en sous-effectif chronique.

J’ai choisi un train pour le lendemain. Celui qui arrivait juste avant la cérémonie, pour ne pas perdre trop de temps. Le voyage a été rapide, mon voisin monté à Valence étant plutôt bavard, à la manière des gens du Sud avec cette façon enfantine de réfléchir tout haut et d’en faire profiter l’entourage. Au début, on s’agace, puis on écoute malgré soi. Impossible de ne pas prendre part, un tant soit peu, au monologue théâtral. J’ai donc ri comme mes voisins, de son accent et de ses reparties, j’ai remis à plus tard l’introspection.
Françoise m’attendait à la gare. L’enterrement était pour l’après-midi, elle m’a proposé d’aller manger vite fait quelque part, « entre sœurs ». Elle n’avait pas changé, elle affichait toujours ce regard supérieur et cet air méprisant quand elle posait les yeux sur moi. Je me sentais sa cadette, alors que j’étais son aînée de dix ans. J’ai décliné l’invitation, je ne voulais pas me retrouver en face d’elle, je n’avais rien à lui dire. Je préférais aller à mon hôtel, me reposer un peu. J’avais négocié de tout faire dans le même après-midi, pour pouvoir remonter dès le lendemain à Paris, je ne voulais pas moisir ici. Françoise a eu une moue agacée. « Tu pourrais faire un effort, maman n’est plus là maintenant. »
Juste un sandwich alors, et un verre de vin rouge pour m’anesthésier. Il m’aurait fallu un whisky, ou plutôt deux, pour que Françoise m’apparaisse inoffensive.
Il y avait un bar pas loin du funérarium, le patron faisait des croque-monsieur, j’en ai commandé un, puis un autre. Ce n’est pas que j’avais tellement faim, c’était pour avoir un alibi : mâcher m’empêchait de parler. J’ai lu dans les yeux de Françoise : tu ne vas pas en bouffer deux, tout de même ? Ça ne te coupe pas un peu l’appétit, la mort de maman ? Mais je savais aussi que je n’étais pas tout à fait objective, que je réglais des comptes dont elle n’était pas ma débitrice. J’ai eu, une fraction de seconde, une culpabilité immense de ne pas pouvoir poser ma main sur la sienne, de ne pas lui sourire. Elle a tenté de remuer l’enfance, quand nous jouions ensemble, je l’ai arrêtée net. Nous étions là pour enterrer notre mère, pas pour exhumer le passé. Elle a baissé la tête dans sa salade light et ne l’a plus relevée.
Au café, j’ai quand même eu droit au « Tu es dure, Palo ». Elle avait raison, j’étais dure avant de te connaître, Jacques, je n’avais de douceur que pour ma fille. Mon cœur était aride comme le désert de Gobi.

Au funérarium, je n’ai pas voulu voir ma mère. Je gardais d’elle un souvenir précis, une photo où elle posait avec mon père, dans sa jeunesse. Elle y était magnifique, blonde, mince, des yeux clairs, la coiffure un peu gaufrée de l’époque, une robe simple, blanche, très classe, une broche en or qui ressemblait à un scorpion. Elle avait ce sourire énigmatique, un peu triste, à la Mona Lisa. Je ne voulais pas sortir de cette image immobile où le temps s’était arrêté sur sa beauté, je ne voulais pas la voir vieille et morte.
Pour la cérémonie, il y avait quelques amis à elle, que je ne connaissais pas, j’ai été soulagée. Une femme est venue lire un petit texte sur « sa vie, son œuvre », et je me suis étonnée d’apprendre des choses. Elle avait eu une existence, bien sûr, en dehors de moi, et c’était comme si, naïvement, je le découvrais. Françoise a lu, elle aussi, son éloge funéraire. J’ai été surprise. C’était un beau texte, loin d’être cucul la praline. Elle décrivait toute la tendresse qu’elle avait eue pour Camille malgré sa dureté et la constance de son amour filial au-delà des difficultés. Elle avait résisté, alors que j’avais déserté. Quand elle est revenue s’asseoir, je me suis fendue d’un « tu as été parfaite ». J’ai même réussi à éviter le « comme toujours ». Moi aussi, j’ai dû la surprendre. Ses joues se sont teintées de rose.
À peine le temps de serrer quelques mains racornies, de boire le verre de l’amitié, et Françoise m’a embarquée dans sa belle Volvo pour aller chez le notaire.
Je m’attendais à voir un vieux croûton, avec des lunettes demi-lune. Mais c’était un homme plutôt jeune, dynamique, sérieux. On avait envie de lui faire confiance et il n’avait pas de problèmes de vue.
Camille m’avait laissé une lettre. Mes orteils se sont recroquevillés dans mes sandales, j’avais supposé qu’elle écrirait quelque chose, un truc terrible comme à son habitude où j’en prendrais plein la figure. Elle savait écrire, surtout pour me démonter : un mélange raffiné de douceur et de méchanceté. De quoi rendre schizophrène n’importe qui. À la fin, ses lettres, je ne les lisais plus, je mettais trop de temps pour m’en remettre. Je les rangeais dans une boîte en haut de mon armoire.
Pendant que le notaire parlait, je me demandais ce que j’allais en faire, maintenant, si j’allais avoir le courage de les lire un jour.

« Pour être tout à fait exact, plutôt qu’une lettre, votre mère vous a laissé un cahier. Elle a souhaité que vous l’ayez. Mais elle a demandé une faveur, une sorte de condition si vous voulez : que vous lisiez ce cahier dans les Cévennes, quand vous irez voir la maison qu’elle vous lègue.
— Une maison ? Dans les Cévennes ?… »
J’ai éclaté de rire.
« C’est une blague ? » J’ai tourné la tête vers Françoise : « Qu’est-ce que c’est que ces conneries ?! »
Françoise était aussi incrédule que moi, et plutôt vexée : depuis le temps qu’elle vivait avec Camille, celle-ci ne lui avait jamais parlé de cette maison. Le notaire m’a tendu une enveloppe, un gros trousseau de clefs, et une photo, celle d’une maison noire, avec des fenêtres fermées de lourds volets de bois.
« Votre mère avait prévu votre surprise, mais elle m’a dit que vous trouveriez les réponses à vos questions dans ce cahier.
— Et pour moi ? a demandé Françoise, a-t-elle laissé quelque chose ?
— Elle vous a laissé l’appartement dans lequel vous viviez avec elle, c’est un bel héritage. »
Françoise a baissé la tête. Elle était jalouse. Elle aurait voulu son cahier, elle imaginait qu’elle y aurait trouvé notre mère, tendre et gorgée de cette reconnaissance après laquelle elle courait en vain depuis tant d’années.
« Pourquoi veux-tu qu’elle t’en laisse un ? C’est à moi qu’elle doit expliquer les choses. C’est devant moi qu’elle doit se justifier de te léguer son immense appartement de Sète, alors que je n’ai que cette baraque au milieu de nulle part. »
Le notaire a continué pour apaiser la tension qui devenait palpable : la maison cévenole n’avait que très peu de valeur en l’état, certes, mais avec un peu de travaux de rénovation, je pouvais espérer la vendre un bon prix : la région avait un fort pouvoir touristique, les Anglais et les Néerlandais raffolaient de ce genre de bien, authentique, au sein d’un des rares parcs naturels habités. Je pouvais en tirer trois cent mille euros facilement, grâce aux nombreuses pièces, à la multitude de dépendances, aux trois hectares de châtaigniers en terrasse, adossés à la grosse bâtisse.
Il y avait aussi de l’argent sur des assurances-vie à mon nom, elle me laissait un certain pécule, consciente de la différence entre la valeur mobilière de ses biens.
« Et pour les meubles, la vaisselle ? a demandé Françoise.
— Tu prends tout. Je ne veux rien. Que des photos, et encore, seulement celles où je suis dessus. Tu peux les scanner ? Je te laisse les originaux.
— Tu ne veux pas un petit quelque chose d’elle ? Je ne sais pas, un meuble, un tableau…
— Je ne veux rien. Tu t’es occupée d’elle, c’est normal que cela te revienne. »
J’ai signé les papiers, je me moquais de tout, je voulais juste en finir. Je voulais partir, rentrer chez moi, aller me rouler en boule dans mon lit.
Françoise a proposé d’aller boire un café. Elle faisait durer, elle savait bien que c’était sûrement la dernière fois que je lui parlais. Camille morte, je ne voyais pas vraiment ce qui allait nous obliger à nous revoir, à l’avenir.
J’ai dit oui pour le café. J’aurais dû décliner.
« Tu ne veux pas essayer de l’appeler maman à présent ? Chaque fois que tu l’appelles Camille, j’ai l’impression que tu parles d’une étrangère. C’est ta mère, tout de même.
— C’est elle qui a toujours voulu que je l’appelle Camille et pas Maman, tu le sais bien. Elle trouvait que c’était plus flatteur, qu’elle avait un joli prénom qui valait la peine qu’on le prononce. Elle disait aussi que vu notre peu de différence d’âge nous pouvions passer pour deux sœurs. »
Françoise a tenté à nouveau de convoquer le passé et de me faire la morale, je lui ai demandé de se taire. Elle a explosé d’une fureur contenue depuis mon arrivée : Camille avait raison, j’étais mauvaise, je ne me préoccupais que de ma petite personne, j’étais insensible, perverse. Elle pleurait des larmes de crocodile, et reniflait après chaque phrase.
« Françoise, c’est exactement ce que je voulais éviter. Les reproches et les pleurs. Je paye les cafés et je m’en vais. Je te remercie pour tout ce que tu as fait pour Camille. »
Je l’ai laissée là, j’ai jeté un billet sur le comptoir et je suis sortie sans me retourner. J’ai marché vite, couru presque, de peur qu’elle ne me poursuive, en m’agonissant d’injures. J’ai marché sans voir la ville, jusqu’à la mer. Une femme se promenait sur la plage avec une petite fille, toutes deux habillées d’une robe légère qui frissonnait au vent. Un jeune chien jappait devant elles. À distance respectueuse se promenaient des goélands au cou immaculé, aux pattes palmées jaune d’or. Je me suis surprise à rester rêveuse et émerveillée, à songer à Sorolla au lieu de penser à ma mère. Le ressac avait chassé en partie mes sombres pensées, alors je me suis rassurée avec des phrases convenues du genre : la vie continue, c’est normal de perdre ses parents, etc. J’avais peur d’être réellement méchante, au fond. Aussi méchante que ma mère.
Sur le chemin de l’hôtel je me suis acheté à manger, des gâteaux, du saucisson, du pâté, du pain et deux bouteilles de vin rouge, du Languedoc premier prix. Des courses pour trois personnes, de gras et de sucre pour apaiser mon âme malmenée et résister à une soirée en solitaire dans une chambre minable, à converser avec les morts et les souvenirs.
J’ai appelé Pimpon, pour savoir comment s’étaient passés ses examens.
«Formidablement bien. J’ai cartonné, je crois.
— Je n’étais pas inquiète, ma chérie, tu réussis toujours tout.
— Et toi, m’man?»
J’ai expliqué mon soulagement, proportionnel à mon incrédulité devant le don de cette maison que je ne connaissais pas, dans cet endroit perdu qui ne me rappelait aucun souvenir.
«Camille m’a laissé un cahier, que je dois lire là-bas.
— Vas-y, mais tu vas résister? Tu ne vas pas l’ouvrir avant? Heureusement que c’est pas moi, j’aurais commencé à le lire dans les escaliers du notaire.
— Je crois que j’ai peur de ce que je vais y trouver.
— Tu es sûre que tu veux la vendre cette maison? Elle est peut-être bien.
— Mais qu’est-ce que tu veux que je fasse d’une maison dans les Cévennes, Pimpon? Je n’ai même pas fini de payer l’appartement, tu me vois entretenir une maison de campagne? Il y a trois hectares autour, tu m’imagines en paysanne à sarcler mes tomates?
— Cool, m’man. Tu dis toujours que tu n’as pas le temps de prendre des vacances. Je suis en plein partiels, j’en ai encore pour toute la semaine, je n’ai pas besoin de toi. Prends un bus, va voir cette baraque, passe deux jours là-bas et après tu décides. Là-bas, ce n’est pas Sète et ce n’est pas vraiment ta mère.»

Si j’avais su à ce moment-là, Jacques, que c’était toi, au fond, qui m’attendait là-haut, j’y serais montée le soir même dans cette montagne lointaine, pour gagner un peu de temps, puisque chaque minute nous était comptée. Je t’en prie, mon amour, ouvre les yeux, parle-moi, ne me laisse pas avec la pendule d’argent, celle de l’autre Jacques, qui ronronne au salon et qui nous attend.

J’ai bu mon languedoc devant les informations régionales, en noir et blanc : la télé datait du Neandertal. J’avais fait des économies drastiques sur le prix de la chambre, et je crois que j’avais choisi sans le savoir un hôtel de passe. J’entendais des allées et venues régulières, des râles suggestifs, dignes de films pornos, mais exclusivement masculins, me semblait-il. Les prostituées ne faisaient plus semblant.
Moi, si j’avais été à leur place, j’aurais poussé des cris de plaisir magnifiques pour que le client soit content. Sans rire, j’aurais dû faire prostituée, je suis sûre que j’aurais été à la hauteur. Je savais aussi que c’était l’effet du vin cette idée saugrenue : les clients en question, je les fantasmais toujours beaux, pleins de charme. Je leur aurais arraché du plaisir. Il aurait suffi de les caresser un peu, à travers leur pantalon, de les rassurer, de leur sourire. Leur laver le sexe, doucement, dans le petit lavabo minable de la chambre.
Puis je réalisais que les vrais clients, ils devaient être bedonnants, avec des poils sur les épaules, des ongles de pied mycosiques et des petites jambes d’alcooliques. Je pensais à mes patients de chirurgie digestive et vasculaire et tout à coup j’avais nettement moins envie de leur caresser le sexe. Je m’en suis voulu de penser à des idioties pareilles, alors que j’aurais dû penser à ma mère. Elle est apparue enfin, lorsque le soir est tombé, à cause des martinets qui trissaient dans la rue, du calme relatif de la ville, de la solitude et de la première bouteille de vin. Son poème préféré, le songe d’Athalie, me revenait en mémoire, chaque fois que je pensais à elle : Tremble, fille digne de moi, le cruel Dieu des Juifs l’emporte aussi sur toi.
J’ai été infiniment triste, d’un seul coup. Elle n’était plus là, nous ne pourrions plus jamais nous haïr, ni nous aimer. Mais ma tristesse n’avait d’égal que mon soulagement. Je ne me sentais pas coupable. Simplement délivrée d’une part d’angoisse, comme si, enfin, l’œil de Sauron avait détourné son regard destructeur de moi. Je pleurais gentiment le nez dans mon languedoc, dans une chambre au papier peint jauni, je me sentais seule au monde. Je croyais l’être.
Et puis j’ai pensé à ma fille. La météo régionale annonçait pour le lendemain un soleil radieux sur toute la côte. Pimpon avait raison, il fallait quand même que j’aille la voir avant de la vendre, cette maison que me laissait Camille comme une punition.
Je me demandais pourquoi les Cévennes. J’aurais été moins étonnée si elle m’avait laissé un bien en Espagne : j’avais quelque chose à voir avec ce pays. Je me souvenais de la volonté de Camille que j’apprenne l’espagnol. Elle avait remué ciel et terre pour que je puisse prendre cette langue en sixième, en lieu et place du traditionnel anglais. Elle s’était enfermée avec le proviseur plus d’une demi-heure dans son bureau, j’attendais dehors assise sur une chaise, les jambes battant dans le vide. Elle était ressortie victorieuse, fière et droite.
« Tu feras espagnol première langue. Ne me déçois pas, sois bonne, que je ne me sois pas donné tout ce mal pour rien. »
Il y avait aussi mon prénom. Paloma. J’avais demandé plusieurs fois à Camille pourquoi ce prénom original, elle m’avait dit que c’était en référence à une chanson de Mireille Mathieu, un truc sirupeux qu’elle avait beaucoup aimé. Je savais que ce n’était pas la vérité : Camille détestait la musique quand elle n’était pas classique, et je ne l’avais jamais entendue ne serait-ce que siffloter un air à la mode.
On m’a toujours appelée Palo. Sauf toi, Jacques. Tu as dit que tu voulais prendre le temps de m’appeler en entier, parce que Paloma c’était un nom de vierge, de colombe, alors que Palo ça faisait tenancière de bar crasseux. Grâce à toi, j’ai retrouvé une certaine virginité.

Mais j’avais beau fouiller le passé, les Cévennes, de près ou de loin, cela ne me disait absolument rien.
J’ai tâté le cahier à travers la grosse enveloppe de papier kraft. Je voulais savoir, mais j’avais peur. Alors que sa dépouille reposait sagement au fond de son caveau, cette crainte sournoise et insidieuse que j’avais toujours ressentie aux côtés de Camille m’empêchait d’ouvrir l’enveloppe. Je supposais que cette lecture interdite me porterait malheur.
J’ai eu l’envie subite d’aller voir cette maison, pour en finir une bonne fois pour toutes, lire ce que me réservait de cruauté ce cahier. J’ai regardé le trajet sur Internet. Il y avait bien un bus pour Alès, mais ensuite je ne trouvais rien pour monter au village. Bien sûr, j’aurais pu faire du stop, mais je n’avais pas envie de poireauter sur le bord d’une départementale déserte avec ma pauvre valise. Bagdad Café n’était qu’un film, ces choses-là n’arrivent pas dans la vraie vie.
Sur un coup de tête, j’ai enfilé mon jean, et je suis allée à la gare pour louer une voiture et annuler mes billets de retour.

La soirée loin de ma fille a été longue, j’ai continué de pleurer sur mon malheur comme une pauvre petite Cosette alcoolique. Le sommeil ne m’a surprise que tard dans la nuit.
Je me suis réveillée à cinq heures, comme d’habitude. Mon corps ne savait pas que je ne travaillais pas. J’ai bu un café à la machine de l’accueil, atrocement mauvais, trop noir, trop fort, trop court. J’ai fumé une cigarette sur le devant de la porte, dans le petit matin. L’aube venait doucement, j’entendais les cris des goélands, et vu le raffut qu’ils faisaient, il devait y avoir un retour de pêche sur le port. Les éboueurs entrechoquaient les conteneurs en un vacarme du diable, j’ai eu droit à un bref signe de main sympathique au passage du camion. Ils avaient dû me prendre pour la femme de ménage et c’était sûrement une marque de fraternité, entre gens qui travaillent quand les autres dorment encore, et qui sont payés une misère. La solidarité de l’infortune.
J’ai pris une douche qui m’a rendue à la vie, j’ai jeté mes affaires dans mon sac et j’ai fui Sète, cette ville félonne qui n’avait même pas été capable d’enterrer son Brassens sur la plage, alors qu’il l’en avait si bien suppliée.

Je n’avais pas à réfléchir, la voix synthétique du GPS me disait où aller. L’A9, la sortie de Lunel, puis des départementales désertes. Sommières qui sommeillait. J’aurais aimé que la voix désincarnée, de temps à autre, me dise : tu roules bien, ou bravo, ou quelque chose dans le genre, pour m’encourager.
Tout à coup, le soleil s’est levé. J’ai ouvert la fenêtre, et une bouffée d’odeurs méditerranéennes est entrée dans l’habitacle : toutes les herbes de Provence sont venues parfumer ma voiture. Tu vois, Jacques, à force de les acheter en pot, sèches et broyées, on finit par oublier que ce sont de vraies plantes qui doivent bien pousser quelque part. C’était une bonne odeur de vacances, qui m’a mise en joie, tout à coup. Je me suis souvenue de papa qui conduisait en bras de chemise, le coude à la portière. De l’arrêt dans cette bourgade au bord du Rhône, où nous avions pu prendre le petit déjeuner après avoir roulé toute la nuit. Quand j’avais ouvert les yeux, nous étions sur un parking, papa m’avait caressé l’épaule et il m’avait dit : « Viens, ma chérie, on va se payer un vrai petit déjeuner. » Il y avait les coteaux couverts de vignes, roses dans l’aube naissante et un immense panneau Chapoutier. Le Rhône était grand comme la mer, presque à hauteur de la route, un long fleuve étale, d’un beau bleu pâle. Nous nous étions assis en terrasse, comme des habitués, et le serveur avait demandé ce que voulait la petite famille. Les parents avaient commandé des cafés noirs et Françoise et moi des chocolats onctueux, dans lesquels nous avions trempé des croissants, croustillants et brillants de beurre. Les meilleurs de ma vie et un des rares souvenirs heureux de mon enfance.
Là, c’était la même joie. L’air s’engouffrait dans la voiture, c’était à nouveau les vacances, je me moquais de Paris, du boulot, du testament, soudain je me sentais libre. Camille aurait été surprise de me voir si heureuse, j’étais sûre qu’elle avait pensé me punir avec cet héritage. J’ai hurlé : « Merci, Maman » par la fenêtre. Maman.
J’ai roulé doucement, traversé Anduze endormie, Saint-Jean qui s’éveillait, et je suis entrée dans la Vallée-Française. Le Gardon coulait limpide au fond de sa gorge, je l’apercevais par endroits. Au bord de la rivière, j’ai appelé Pimpon pour lui expliquer ma folie. Elle m’a comprise. »

Extrait
« J’avais pris mes décisions dans l’urgence, je me doutais que si je gardais un peu de raison, j’aurais fait marche arrière. Je m’étais jetée dans un tourbillon de démarches administratives pour pouvoir oublier la petite voix en moi qui me susurrait que j’étais folle. Disponibilité de l’hôpital, installation en tant qu’infirmière libérale, achat d’une voiture, vente de l’appartement. Pimpon avait été d’accord sur tout. Elle resterait à Paris pour ses études, je ne pouvais pas l’embarquer totalement dans ma folie, elle viendrait seulement aux vacances. Sans le savoir, elle était le cœur de la plus forte de mes angoisses: comment allais-je vivre sans elle? Mon Olympe, que je continuais à appeler du Pimpon de l’enfance, alors qu’elle était déjà une jeune femme. Bien sûr, je savais qu’un jour elle partirait, qu’il me faudrait trouver une solution pour combler le vide affectif qu’elle laisserait, mais je repoussais toujours cette éventualité. » p. 42-43

À propos de l’auteur
BELPOIS_Benedicte_©DR_RTSBénédicte Belpois © Photo DR – RTS

Bénédicte Belpois vit à Besançon où elle exerce la profession de sage-femme. Elle a passé son enfance en Algérie. C’est lors d’un long séjour en Espagne qu’elle a commencé à écrire Suiza, son premier roman paru en 2019. En 2021, elle récidive avec Saint Jacques. (Source: Babelio)

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La fissure

DIDIERLAURENT_la_fissure

En deux mots:
Une fissure dans sa résidence secondaire va entraîner un total bouleversement dans la vie de Xavier. Fini son boulot, fini son mariage, finie sa vie paisible en France. Son obsession va le mener jusqu’aux Antipodes où il n’en a pas fini avec les surprises!

Ma note:
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique:

La tête à l’envers

Jean-Paul Didierlaurent, l’auteur du liseur du 6h 27, nous revient avec un joli conte mâtiné de fantastique construit à partir d’un homme ordinaire qui, en découvrant une fissure, va changer totalement son existence.

Quel plaisir de retrouver l’auteur du liseur du 6h 27, un premier roman qui avait d’emblée su conquérir un large public. Et cette fois encore le personnage principal est un homme qui mène une vie tout ce qu’il y a de plus ordinaire. Xavier Barthoux est marié, travaille depuis de nombreuses années comme représentant d’une fabrique de nains de jardin et possède un chien et une résidence secondaire dans les Cévennes.
C’est là qu’on le retrouve au moment de prendre un petit-déjeuner en plein-air. Derrière le feuillage qui grimpe au mur, il découvre «une saloperie de fissure». Si pour son épouse la chose est loin d’être dramatique – après tout la végétation cache cette lézarde – il en va tout autrement pour Xavier qui sait qu’il faut traiter ce type d’incident avant qu’il ne s’étende et prenne d’autres proportions.
Jean-Paul Didierlaurent a l’art de construire de formidables histoires à partir de ces petits riens. Mais, si on n’y regarde de plus près, ce sont souvent ces petits riens qui provoquent de grands drames. Combien de divorces ont été prononcés parce qu’une brosse à dent n’était pas à sa «juste place» dans la salle de bains, parce qu’une cuvette de WC n’était pas baissée, parce que les chaussettes n’étaient pas systématiquement déposées dans le panier à linge… Le sociologue du couple Jean-Claude Kaufmann a écrit quelques ouvrages fort intéressants sur le sujet.
Pour Xavier, ce processus s’enclenche dès les premières minutes, car Angèle ne voit pas ou ne veut pas voir la gravité de cette fissure, et va finir par une obsession. S’il ne parvient pas à colmater cette brèche, il en est persuadé, c’est toute sa vie qui risque de dispraître dans l’anfractuosité.
Je vous laisse découvrir comment cette fissure aura raison de son couple, de sa profession et même de sa petite vie tranquille en France. Avec une dose de fantastique, notamment un nain de jardin facétieux qui répond au doux patronyme de «Numéro 8», voici Xavier débarquant aux antipodes, sur une île perdue au large de la Nouvelle-Zélande.
Que vient-il faire là? Quel rapport avec «sa» fissure? Et pourquoi les personnes qu’il croise semblent-elles avoir un lien avec lui? Autant d’énigmes et de mystères qui vont peu à peu se dévoiler et régaler le lecteur.
Dans la droite ligne de Marcel Aymé ou, pour prendre un contemporain, de Didier van Cauwelaert, ce nouvel opus de Jean-Paul Didierlaurent ravira tous ceux qui voient dans la littérature un formidable moyen d’évasion, ne dédaignant pas parler de questions existentielles le sourire aux lèvres.

La Fissure
Jean-Paul Didierlaurent
Éditions Au Diable Vauvert
Roman
traduit de l’anglais (États-Unis) par
336 p., 18 €
EAN : 9791030701722
Paru le 18 janvier 2018

Où?
Le roman se déroule en France, à Alzon ainsi qu’à Clermont-Ferrand, Brive-la-Gaillarde et à Cassis, ainsi qu’aux îles Chatham, administrées par la Nouvelle-Zélande.

Quand?
L’action se situe de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
Dernier représentant d’une entreprise de nains de jardin rachetée par une holding américaine, Xavier Barthoux mène une vie bien rangée entre la tournée de ses clients, son épouse, son chien et sa résidence secondaire des Cévennes. Mais quand il découvre une fissure dans le mur de sa maison, c’est tout son univers qui se lézarde… Animé par une unique obsession, réparer la fissure, il entreprend un périple extrême et merveilleux jusqu’à l’autre bout du monde.

Les critiques
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Dans son nouveau roman La Fissure, Jean-Paul Didierlaurent emmène ses lecteurs de surprise en surprise, jusqu’à la chute finale. © Production TV5 Monde

Les premières pages du livre
« Depuis près d’une heure, le tatoueur répétait les mêmes gestes avec la précision d’un métronome. Tremper le peigne dans l’encre noire, appliquer les dents sur l’avant-bras de l’homme, frapper à l’aide du bâton une série de coups secs, bois contre ivoire, de manière à faire pénétrer le liquide d’ombre sous la peau claire. À intervalles réguliers, l’assistant tamponnait l’épiderme avec son chiffon. Sang et encre mêlés constellaient l’étoffe de taches sombres. Allongé torse nu sur la natte, l’homme suait à grosses gouttes. Le feu invisible dévorait son bras, le consumait au cœur de l’os. Malgré la douleur, il trouva la force de sourire à la jeune femme agenouillée à sa gauche. Elle lui rendit son sourire et saisit sa main. Pendant un court moment, sa paume aspira les morsures du peigne. L’homme releva la tête et contempla l’avancée du tatouage. Un premier entrelacs de lignes sombres serpentait sur sa peau du coude au biceps. Il lui semblait que les souvenirs s’estompaient alors que le dessin prenait forme. Il ferma les yeux. Les dernières images de sa vie d’avant s’échappaient sans qu’il cherche à les retenir.

Dans l’art du bûcheronnage, le cran de chute est l’entaille en V pratiquée sur le fût d’un arbre pour définir la trajectoire de son abattage. Même infime, ce cran oriente l’effondrement du tronc en déséquilibrant l’ensemble du côté souhaité. Mettre à bas un géant vert sans effectuer cet acte préliminaire peut s’avérer des plus périlleux. Régulièrement, des bûcherons du dimanche dont l’ignorance égale la bêtise s’y essaient, avec les risques que cela comporte et des résultats à l’opposé de leur ambition première. Ainsi tronçonné, l’arbre, lorsqu’il ne se contente pas de rester cramponné de toutes ses branches à ses compagnons, peut osciller longtemps avant de choisir de son propre gré l’endroit de son effondrement qui peut se solder par l’aplatissement d’un véhicule, l’écrasement d’un hangar ou la pulvérisation de la véranda du voisin avec pour seule compensation un passage éclair dans Vidéo Gag à condition que le beau-frère chargé de la caméra n’ait pas oublié d’appuyer sur le bouton marche au moment de l’accident, quand l’entreprise ne s’achève pas tout simplement par l’écrabouillement du tronçonneur novice et de son engin pétaradant. »

Extrait
« Xavier s’étouffa et toussa pendant près d’une minute à pleins poumons pour déloger la miette de biscotte que la surprise avait coincée dans le fond de sa
gorge. Écarlate, il avala une rasade de jus d’orange pour éteindre l’incendie dans son gosier avant de reporter son attention sur la façade.
— C’est quoi ça? bredouilla-t-il pour lui-même plus que pour sa femme.
— C’est quoi ça quoi?
Xavier essuya sa moustache à l’aide de sa serviette, se leva sans quitter la chose des yeux et s’avança jusqu’au mur de verdure, emportant sa chaise sous le regard incrédule de son épouse, suivi comme son ombre par la chienne dont l’arrière-train frétillait d’excitation à la perspective d’une promenade matinale. Il monta sur le siège,
écarta le feuillage et colla son nez contre le crépi pour se livrer à un examen méticuleux. Ce qu’il avait aperçu quelques secondes plus tôt n’était peut-être qu’une illusion d’optique, le résultat malencontreux d’un jeu d’ombre et de lumière sur le relief irrégulier du crépi, mais il voulait en avoir le cœur net. Intriguée, Angèle Barthoux née Lacheneuil s’était levée à son tour pour rejoindre
son mari.
— Qu’est-ce qu’il y a?
Ignorant la question de son épouse, il caressa du bout de l’index la surface rugueuse du mur. La pulpe de son doigt vint confirmer ses craintes. Xavier grimaça.
— Eh merde.
Jeté dans un souffle, le mot exprimait tout son désappointement. À la vue de son maître perché sur sa chaise, la chienne sautait sur place en aboyant nerveusement. Face au désarroi soudain de son mari, Angèle répéta sa question.
— Qu’est-ce qu’il y a?
— Regarde, l’invita-t-il en écartant le feuillage.
— Quoi?
— Le mur. Qu’est-ce que tu vois sur le mur?
— Ben, la vigne.
— Oui, la vigne, d’accord tu vois la vigne, concéda-t-il avec indulgence, mais oublie la vigne. Sous la vigne, là, tu vois quoi sous la vigne?
— Ben le crépi, je vois le crépi.
— Okay, tu vois le crépi, d’accord mais encore?
Qu’est-ce que tu vois sur le crépi? insista Xavier en posant le doigt sur la lézarde.
Il commençait à perdre patience.
— Fais un effort, Angie.
— Un trait, je vois comme un trait, avança-t-elle en fixant son mari avec anxiété.
— Exact. Sauf que ce n’est pas un trait, chérie. Oh non, ce n’est pas un trait mais une fissure, une saloperie de fissure, rien que ça. Putain, j’le crois pas. »

À propos de l’auteur
Jean-Paul Didierlaurent vit dans les Vosges. Nouvelliste lauréat de nombreux concours de nouvelles, deux fois lauréat du Prix Hemingway, son premier roman, Le Liseur du 6h27, connaît un immenses succès au Diable vauvert puis chez Folio (370.000 ex vendus), reçoit les prix du Roman d’Entreprise et du Travail, Michel Tournier, du Festival du Premier Roman de Chambéry, du CEZAM Inter CE, du Livre Pourpre, Complètement livres et de nombreux prix de lecteurs en médiathèques, et est traduit dans 31 pays. Il est en cours d’adaptation au cinéma. Jean-Paul Didierlaurent a depuis publié au Diable vauvert un premier recueil de ses nouvelles, Macadam, Le Reste de leur vie, roman réédité chez Folio, et La Fissure. (Source : Éditions Au Diable Vauvert)

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