Petit pays

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Petit Pays
Gaël Faye
Grasset
Roman
224 p., 18 €
EAN: 9782246857334
Paru en août 2016

Où?
Le roman se déroule en France, à Paris, Saint-Quentin-en-Yvelines ainsi qu’en Afrique, au Burundi, au Rwanda, au Zaïre, notamment dans des localités telles qu’Uvira, Bukavu, Resha, Bujumbura, Rumonge, Citiboke mais également en Belgique, à Bruxelles et Ixelles.

Quand?
L’action se situe des années 1990 à nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
En 1992, Gabriel, dix ans, vit au Burundi avec son père français, entrepreneur, sa mère rwandaise et sa petite sœur, Ana, dans un confortable quartier d’expatriés. Gabriel passe le plus clair de son temps avec ses copains, une joyeuse bande occupée à faire les quatre cents coups. Un quotidien paisible, une enfance douce qui vont se disloquer en même temps que ce « petit pays » d’Afrique brutalement malmené par l’Histoire. Gabriel voit avec inquiétude ses parents se séparer, puis la guerre civile se profiler, suivie du drame rwandais. Le quartier est bouleversé. Par vagues successives, la violence l’envahit, l’imprègne, et tout bascule. Gabriel se croyait un enfant, il va se découvrir métis, Tutsi, Français…
« J’ai écrit ce roman pour faire surgir un monde oublié, pour dire nos instants joyeux, discrets comme des filles de bonnes familles: le parfum de citronnelle dans les rues, les promenades le soir le long des bougainvilliers, les siestes l’après-midi derrière les moustiquaires trouées, les conversations futiles, assis sur un casier de bières, les termites les jours d’orages… J’ai écrit ce roman pour crier à l’univers que nous avons existé, avec nos vies simples, notre train-train, notre ennui, que nous avions des bonheurs qui ne cherchaient qu’à le rester avant d’être expédiés aux quatre coins du monde et de devenir une bande d’exilés, de réfugiés, d’immigrés, de migrants. »
Avec un rare sens du romanesque, Gaël Faye évoque les tourments et les interrogations d’un enfant pris dans une Histoire qui le fait grandir plus vite que prévu. Nourri d’un drame que l’auteur connaît bien, un premier roman d’une ampleur exceptionnelle, parcouru d’ombres et de lumière, de tragique et d’humour, de personnages qui tentent de survivre à la tragédie.

Ce que j’en pense
****
« Je tangue entre deux rives, mon âme a cette maladie-là. Des milliers de kilomètres me séparent de ma vie d’autrefois. Ce n’est pas la distance terrestre qui rend le voyage long, mais le temps qui s’est écoulé. J’étais d’un lieu, entouré de famille, d’amis, de connaissances et de chaleur. J’ai retrouvé l’endroit, mais il est vide de ceux qui le peuplaient, qui lui donnaient vie, corps et chair (…) Je pensais être exilé de mon pays. En revenant sur les traces de mon passé, j’ai compris que je l’étais de mon enfance. Ce qui me paraît bien plus cruel encore. »
C’est sans doute ce constat qui a poussé Gaël Faye à nous proposer ce premier roman sensible. L’occasion pour lui de redonner vie, corps et chair à son enfance et à nous, lecteurs, de découvrir un pays et une histoire aussi joyeuse que dramatique, aussi lumineuse que troublante.
Gabriel a 10 ans, il est le fils d’un entrepreneur français et d’une mère rwandaise et se retrouve au Burundi où la ville est belle. Bien sûr, la famille est éclatée, mais les tracas du quotidien se limitent au vol d’un vélo, l’épisode le plus terrifiant qu’on lui raconte est celui de la circoncision des cousins. Mais quand on vit sur une faille sismique, il ne faut pas s’étonner des secousses. Qui ne vont pas tarder. D’abord au sein même de la cellule familiale : « Oui, ce fut notre dernier dimanche tous les quatre en famille. Cette nuit-là, Maman a quitté la maison, Papa a étouffé ses sanglots, et pendant qu’Ana dormait à poings fermés, mon petit doigt déchirait le voile qui me protégeait depuis toujours des piqûres de moustique. »
Petit à petit, il va voir s’éloigner le petit bonheur dans le petit pays. Déjà on évoque la guerre civile, les risques de coup d’Etat. Quand on jour deux élèves se bagarrent dans la cour d’école, Gabriel comprend la réalité du pays : « J’ai découvert l’antagonisme hutu et tutsi, infranchissable ligne de démarcation qui obligeait chacun à être d’un camp ou d’un autre. (…) La guerre, sans qu’on lui demande, se charge toujours de nous trouver un ennemi. Moi qui souhaitais rester neutre, je n’ai pas pu, J’étais né avec cette histoire. Elle coulait en moi. Je lui appartenais. »
Sans vouloir se départir du ton léger propre au narrateur de 10 ans, l’auteur pressent que les exactions qui lui sont relatées, la façon dont son père s’isole pour écouter la radio ou encore la manière dont les policiers rançonnent les chauffeurs des véhicules qu’ils contrôlent ne laisse présager rien de bon : « Un spectre lugubre s’invitait à intervalle régulier pour rappeler aux hommes que la paix n’est qu’un court intervalle entre deux guerres. »
Alors que les bruits de bottes et celui des tirs d’armes automatiques se rapprochent, il trouve refuge dans les livres, grâce à une voisine aussi généreuse que visionnaire, et dans l’écriture, en envoyant des lettres magnifiques à sa correspondante française.
Gaël Faye signe ici un premier roman épatant dont la musique est bien plus enlevée que ces symphonies classiques qui marquent chaque coup d’Etat. C’est son cœur qui parle plus que sa raison. Et ce par là qu’il nous émeut, nous touche, nous emporte. Que ses réflexions qui semblent à priori empreintes de naïveté nous donnent la clé d’un conflit aussi sanglant : «Je n’avais pas d’explications sur la mort des uns et la haine des autres. La guerre, c’était peut-être ça, ne rien comprendre.»

68 premières fois
Blog Entre les lignes (Benedicte Junger)
Blog A l’ombre du noyer

Autres critiques
Babelio 
L’Express 
Le Point (Valérie Marin la Meslée)
Jeune Afrique (Megdi Ba)
Libération (Maria Malagardis)
Blog L’or des livres
Blog La règle du jeu (Christine Bini)
Blog Moka – Au milieu des livres 
Blog Que lire ?
Blog Cultur’Elle (Caroline Doudet)

Les premières pages du livre 

Extrait
« Il m’obsède, ce retour, je le repousse, indéfiniment, toujours plus loin. Une peur de retrouver des vérités enfouies, des cauchemars laissés sur le seuil de mon pays natal. Depuis vingt ans je reviens ; la nuit en rêve, le jour en songe ; dans mon quartier, dans cette impasse où je vivais heureux avec ma famille et mes amis. L’enfance m’a laissé des marques dont je ne sais que faire. Dans les bons jours, je me dis que c’est là que je puise ma force et ma sensibilité. Quand je suis au fond de ma bouteille vide, j’y vois la cause de mon inadaptation au monde.
Ma vie ressemble à une longue divagation. Tout m’intéresse. Rien ne me passionne. Il me manque le sel des obsessions. Je suis de la race des vautrés, de la moyenne molle. Je me pince, parfois. Je m’observe en société, au travail, avec mes collègues de bureau. Est-ce bien moi, ce type dans le miroir de l’ascenseur? Ce garçon près de la machine à café qui se force à rire? Je ne me reconnais pas. Je viens de si loin que je suis encore étonné d’être là. » (p. 75)

A propos de l’auteur
Franco-Rwandais né au Burundi en 1982 et exilé en France en 1995 après le début de la guerre civile dans son pays natal, Gaël Faye est auteur-compositeur et interprète de rap. Aussi influencé par les littératures créoles que par la culture hip hop, il sort un album en 2010 avec le groupe Milk Coffee & Sugar (révélation Printemps de Bourges). En 2013 paraît son premier album solo, Pili Pili sur un Croissant au Beurre. Enregistré entre Bujumbura et Paris, il se nourrit d’influences musicales plurielles : du rap teinté de soul et de jazz, du semba, de rumba congolaise, du sébène. Petit Pays est en lice pour le 1er prix Stanislas du meilleur premier roman et parmi les six « Talents à découvrir » choisis dans la rentrée littéraire par la chaîne Cultura. (Source : Livres Hebdo)

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