Les étincelles

SANDREL_les_etincelles
  RL2020

En deux mots:
La Découverte d’un message crypté va lancer Phoenix sur la piste de son père décédé en Colombie trois ans plus tôt. De découvertes en découvertes elle va – au-delà d’un secret de famille – mette à jour un scandale retentissant.

Ma note:
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique:

Sur la piste du père disparu

Après La Chambre des merveilles et La vie qui m’attendait, Julien Sandrel nous propose de suivre une narratrice de 23 ans qui s’interroge sur la disparition de son père en Colombie et fait une nouvelle démonstration de son talent à construire des intrigues addictives.

On sait le potentiel des secrets de famille à donner une matière romanesque passionnante. Julien Sandrel, dont La chambre des merveilles nous avait ravi en 2018 et qui avait confirmé l’an passé avec La vie qui m’attendait en fait une nouvelle fois une démonstration éclatante. Il faut dire qu’en trois romans il est quasiment devenu un maître de la construction d’histoires aux vertus addictives.
Il a cette fois imaginé une narratrice de 23 ans qui, aux côtés de sa mère, tente de se reconstruire trois ans après la disparition de son père. Un accident de voiture sur les routes colombiennes avait brutalement fait exploser la famille car, au-delà du décès en lui-même, tout porte à croire qu’il avait pris la route de l’Amérique latine pour y retrouver Serena, sa maîtresse. Du coup, le sujet était devenu tabou dans la famille.
À l’initiative de sa grand-mère, Phoenix décide d’ouvrir le carton où les derniers souvenirs avaient été enfouis et y retrouve un walkman et, coincé entre la cassette audio et le corps de l’appareil, un bout de papier, légèrement déchiré.
Le message dit Suntem uciși în tăcere. Ajută-ne. Comme le fait la narratrice dans le roman, je l’ai recopié dans la barre de recherche de Google et j’ai obtenu cette traduction: «nous sommes tués en silence. Aidez-nous». En revanche, pour l’autre côté du papier et cette formule: (6×6)BR.IERNIPX.IPAH.2L.NOC08MNEOA9AENDV le moteur de recherche n’a rien pu me dire de plus que la source de cet écrit.
Bien entendu, la sagacité de Phoenix fera le reste quelques dizaines de pages plus loin… Car la jeune femme entend désormais faire toute la lumière sur cette affaire. Elle va remuer le passé, consulter des archives, retrouver des collègues de son père, se pencher sur ses recherches et, peu à peu, voir apparaître une réalité toute autre. Est-ce que le Clear, un produit destiné à l’agriculture, mais dont les effets sur la santé humaine sont désastreux, ne serait pas à l’origine de son départ plutôt qu’une escapade amoureuse? Notre Sherlock Holmes en jupons n’aura de cesse de vouloir faire toute la lumière sur ce dossier, aidé en cela par son frère César. Sans le dire à sa mère, elle prend l’avion pour la Colombie.
Je vous laisse découvrir avec elle ce qui s’est vraiment joué en 2012. J’ajouterai simplement que la trame sur laquelle le roman a été construit pourrait fort bien être réelle, les histoires de défenseurs de l’environnement et lanceurs d’alerte écrasés par le poids des multinationales qu’ils dénoncent étant malheureusement fort nombreuses.
De l’histoire familiale on passe au thriller économique, de la remise en cause d’une vérité établie à la découverte d’une version propre à secouer tous les acteurs. Une fois de plus, Julien Sandrel fait preuve d’une belle dextérité pour rassembler les pièces du puzzle et agencer un roman dans lequel les émotions vont secouer le lecteur. Du grand art!

Les étincelles
Julien Sandrel
Éditions Calmann-Lévy
Roman
324 p., 19,50 €
EAN 9782702166369
Paru le 26/02/2020

Où?
Le roman se déroule en France, puis en Colombie

Quand?
L’action se situe tout au long des dix dernières années.

Ce qu’en dit l’éditeur
LES GRANDS EMBRASEMENTS NAISSENT DE PETITES ÉTINCELLES
La jeune Phoenix, 23 ans, a le goût de la provocation, des rêves bien enfouis, et une faille terrible : il y a trois ans, son père, un scientifique, s’est tué dans un accident de voiture en allant rejoindre une autre femme que sa mère.
Depuis, Phoenix le déteste. À cause de lui, elle a abandonné études et passions et enchaîne les petits boulots. Mais un jour, dans un carton qui dort à la cave, elle découvre la preuve que son père se sentait en danger. Ainsi qu’un appel à l’aide énigmatique, écrit dans une langue étrangère.
Et si elle s’était trompée? Et si… la mort de son père n’avait pas été un accident?
Aidée de son jeune frère, un surdoué à l’humour bien ancré, Phoenix se lance à la recherche de la vérité. Mais que pourront-ils, tout seuls, face à un mensonge qui empoisonne le monde?

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Bande-annonce du roman Les étincelles de Julien Sandrel © Production Calmann-Lévy

INCIPIT (Les premières pages du livre)
« La lumière est tellement forte. Charlie a tellement chaud. Le paysage en devient presque flou. Ou bien est-ce la vitesse de la voiture qui brouille ses sens ?
C’est étrange, cette sensation qui l’envahit, au moment où le véhicule quitte la route. La terreur sourde se mêle à une forme de beauté. Oui, c’est cela, il y a quelque chose d’infiniment gracieux dans ce temps suspendu, ces secondes de chute.
Sept, six, cinq.
La voiture pique du nez.
Dans quelques instants, ce sera le choc. Charlie le sait.
Ses muscles se crispent.
L’ensemble de son corps se tend.
Il n’avait pas imaginé que sa vie finirait ici.
Quatre, trois.
Charlie pense à sa femme, à ses enfants, à sa mère aussi. Il voudrait leur dire qu’il les aime. Leur donner la force d’avancer sans lui.
Mon Dieu, c’est tellement injuste.
Charlie se met à pleurer. De peur. De rage. De tristesse.
Deux, un.
Charlie regarde le ciel. Sa pureté, curieusement, l’apaise.
Il prend une grande inspiration.
Puis il ferme les yeux.
La voiture heurte le sol une première fois.
Le fracas de la tôle réveille les quelques oiseaux qui sommeillaient alentour, étourdis par la chaleur de cette fin d’été.
Certains auront le temps de s’envoler.
Le souffle de l’explosion aura raison des autres.

OUVRIR AVEC PRÉCAUTION
— Tu sais, Phoenix, quand je joue ce morceau, j’entends la mer, la pluie qui tombe. Ça me fait un bien fou.
Ma grand-mère me sourit et range ses partitions dans une chemise cartonnée. C’est aussi pour ses fulgurances poétiques que j’aime venir ici.
— Si Chopin t’entendait, je suis sûre qu’il aimerait beaucoup ce que tu viens de dire. Pour la semaine prochaine, tu peux te concentrer sur la seconde partie.
— D’accord, ma chérie.
Je la connais par cœur, je sais exactement ce qu’elle s’apprête à dire.
— Et si nous allions boire un café, maintenant ?
Dans le mille.
— Le cinquième de la journée ?
— Tu me sous-estimes. Ce sera le septième.
Ma grand-mère adore le café, elle en boit des litres, et j’ai hérité ça d’elle.
Elle s’appelle Sandra, et je trouve ça hyper moderne, presque décalé pour une femme de quatre-vingts ans. Elle est un peu atypique et ne fait pas son âge. Lorsque quelqu’un lui propose sa place dans un bus, elle rétorque systématiquement : « Vous ne voulez pas dire que je suis vieille, tout de même ? »
Deux fois par semaine, je donne des cours de piano aux Gais-Lurons, une sorte de centre aéré pour dames respectables. J’ai une dizaine d’élèves, dont Sandra, qui insiste pour me régler ses cours « comme les autres, il n’y a pas de raison ». J’ai protesté, au début. J’ai laissé tomber depuis.
Bref.
Je ferme la porte de la salle de musique, nous descendons dans l’espace commun du rez-de-chaussée, et je vais nous chercher deux cafés allongés sans sucre.
En ma présence, les animatrices évitent les « Vous n’allez pas réussir à dormir, Sandra, tout ce café ça vous tuera ! » et autres « Vous devriez manger moins de bonbons, vos artères se bouchent ! ». Elles savent que je déteste ce type d’intervention, et puis elles ont sûrement un peu peur de moi depuis que j’ai rajouté deux piercings à mon arcade sourcilière gauche. Comme j’ai bien compris leur gêne, j’accentue mon côté badass quand je viens ici : je force sur le khôl, enfile un débardeur serré sur un pantalon large, et tout ça me donnerait presque des allures de Lara Croft, si seulement j’avais des seins, des flingues, et le temps de chercher des putains de trésors dans des tombes peuplées de tarés démoniaques.
Bref (oui, je dis souvent bref).
Lorsque je reviens les mains chargées de liquide brûlant, mamie est installée à sa place habituelle. Un peu à l’écart des autres, dans son fauteuil Chesterfield fétiche, un plaid blanc sur les jambes, un roman de Stephen King entre les mains.
Je l’embrasse par surprise, elle sursaute, et son visage s’éclaire.
Je lui tends sa tasse.
— Merci, ma princesse. Dis-moi, tu n’as pas école aujourd’hui ?
Mamie dit toujours « école », comme si j’étais en maternelle alors que je viens de finir ma troisième année de fac.
— Je n’avais cours que le matin. Je commence le boulot à dix-huit heures, et entre-temps… c’est piano !
Elle sait tout ça, mais quelquefois, elle oublie.
— Ça me fait plaisir que tu viennes me voir, tu sais.
— Ça me fait plaisir de venir te voir, tu sais.
Mamie esquisse un sourire, mais je vois un léger voile passer devant ses yeux. Un tremblement de la rétine. Imperceptible, sauf pour moi.
Je sais ce qu’elle pense, car je pense la même chose.
Lorsqu’elle me regarde, elle voit son fils. Et lorsque je la vois, elle me rappelle mon père. On se ressemble tellement, tous les trois. Trois générations. Ça n’est pas normal que ce soit lui qui soit mort. Ça n’est pas dans l’ordre des choses. Ça aurait dû être elle. Voilà ce qu’il y a dans cette microseconde, ce nuage dans son regard. C’était bien trop tôt pour lui, bien trop tôt pour nous tous. Et tellement soudain. Trois ans plus tard, nous n’arrivons toujours pas à en parler.
Je ne suis pas certaine de me souvenir de la voix de mon père. Je donnerais tout ce que j’ai pour entendre ce son, sa voix grave, douce et chaude à la fois. Sa voix qui me disait que j’étais faite pour la musique, qui m’encourageait, me rassurait, m’insufflait une dose de force lorsque je pensais ne plus en avoir. C’est mon père qui m’avait inscrite au conservatoire, lorsque j’avais tout juste six ans. Le piano, c’était lui, définitivement.
Il est mort en 2012, la veille de mon entrée en deuxième année de fac de musique. Depuis son décès, je ne peux plus toucher un clavier. Lorsque mes mains s’en approchent, elles se mettent à trembler. Je ne parviens pas à les contrôler, c’est irrationnel. Ici, je conseille, je guide les mains hésitantes, mais il m’est impossible de jouer.
Je voulais pourtant devenir pianiste concertiste. Exercer comme professeure de musique en collège et faire semblant de m’émerveiller devant des reprises des « Lacs du Connemara » à la flûte à bec n’a jamais été dans mes aspirations profondes. Ce qui était là, bien ancré, ce qui me dévorait, c’était le piano. Je respirais piano, je pleurais piano, je me lavais les dents piano, je pissais piano.
Mon père avait poussé le raffinement jusqu’à m’enregistrer avec un micro et conserver mes exploits sur une cassette audio, qu’il écoutait sur son walkman vintage, le genre d’objet tellement désuet qu’il en devient touchant. Surtout la sonate « Au clair de lune » de Beethoven. Son morceau préféré. Je le surprenais parfois, allongé dans la pénombre, les écouteurs vissés sur les oreilles. J’ai cette image très nette gravée dans un recoin de ma mémoire. C’est curieux, les souvenirs. J’ai oublié le son de sa voix, mais je suis capable de décrire dans les moindres détails cet instant-là. Le coin de ses lèvres, ses yeux clos aux paupières frémissantes, sa tête qui se tourne, puis son œil qui s’anime en me sentant approcher, son sourire, ses bras confortables, et sa peau parfumée aux chewing-gums à la fraise qu’il mâchouillait à longueur de journée. C’est trop douloureux de penser à lui désormais. Alors j’évite, le plus possible. Je prétends avoir oublié. Je dissimule. J’enfouis celle que j’étais, celle que je désirais être, sous des couches d’autres versions possibles de moi-même.
Au fond, depuis que le piano et mon père m’ont abandonnée, je ne sais plus qui je suis vraiment.
Je n’ai jamais parlé de ce problème à ma mère. L’histoire que je lui ai servie, c’est qu’avec la mort de papa, je n’étais plus obligée de faire semblant. Je lui ai dit avoir pris conscience que mon avenir n’était pas dans le piano et vouloir tout arrêter. Alors j’ai renoncé aux études de musique et j’ai emprunté le chemin de la fac de sciences. Soulagée que « j’assure mes arrières » en devenant prof de SVT plutôt qu’intermittente du spectacle, ma mère n’a pas cherché plus loin et a vendu le piano.
Le seul contact que j’ai gardé avec l’instrument, ce sont ces cours que je donne aux Gais-Lurons. En plus d’un petit complément de revenus, ils me permettent de conserver un lien avec ces vibrations viscérales qui me bouleversent toujours autant.
J’aime ces parenthèses. Les vieux, c’est rassurant, c’est stable. Ça respire la vie passée, le présent qui seul détermine l’humeur, la simplicité. Ici, je m’extrais quelques instants de l’appartement décrépit dans lequel je vis avec ma mère et mon frère, dans une ville de la « grande banlieue parisienne » – astuce linguistique pour éviter de dire qu’un cimetière au fin fond du Larzac serait plus vivant que ce bled.
Aux Gais-Lurons, je m’occupe aussi de ce que j’appelle les « petites injustices du quotidien ». Rien ne me révolte plus que de constater que l’on refuse quelques derniers plaisirs à des gens qui ont dépassé la date limite pour se préoccuper de ce qui rallonge statistiquement l’existence. Alors j’essaie de réparer, et d’amuser la galerie au passage. Celle qui se marre le plus étant quand même ma grand-mère, qui ne loupe rien de mes exploits. Aujourd’hui par exemple, j’ai amené quelques douceurs à Mme Martinez – quatre-vingt-neuf ans au compteur, à qui sa fille fait vivre un enfer nutritionnel. Mme Martinez a rigolé la semaine dernière quand je lui ai appris à dire « fuck le diabète », et m’a demandé de lui apporter en cachette un peu de chocolat.
Je partage toutes mes aventures secrètes avec Sandra. Elle me dit souvent que j’exagère, mais en réalité je sais qu’elle s’amuse comme une folle de l’audace de sa petite-fille.
Une fille forte-et-sûre-d’elle-qui-ne-doit-rien-à-personne-allez-vous-faire-foutre : voilà comment les autres me voient. C’est ce que j’essaie d’être. C’est ce que je prétends être. Ce n’est pas ce que je suis. Ce que je suis, c’est une fille qui-se-demande-à-quoi-va-ressembler-son-avenir-tout-en-se-disant-qu’elle-pourrait-bien-avoir-une-vie-de-merde.
Bref.
Revenons à mamie. Et à ce voile devant ses yeux. Aujourd’hui, il prend une teinte particulière. Car aujourd’hui, c’est l’anniversaire de la mort de mon père.
Trois ans, déjà.
Des larmes, j’en ai versé beaucoup, au début. Et puis je me suis asséchée. Je me suis construit une carapace d’indifférence. L’indifférence, c’est la seule réaction possible quand on aime et déteste une personne aussi fort à la fois. J’aime mon père pour tout ce qu’il était – ou tout ce que j’imaginais qu’il était. Mais je le déteste pour cette image définitivement ternie par la trahison. Après la mort de papa, maman m’a parlé. Elle avait découvert qu’il lui mentait. Il y avait d’abord eu ces numéros masqués qui raccrochaient lorsque c’était elle qui répondait, puis ces appels chuchotés qu’il passait depuis la salle de bains, ces voyages lointains dont la fréquence avait augmenté, ces chemises déjà lavées lorsqu’il en revenait, et ce prénom féminin qu’elle avait surpris – et qui lui avait déchiré le cœur. Mon père avait une maîtresse en Colombie, elle se prénommait Serena, il est mort en allant la retrouver, sous couvert de voyage professionnel. Voilà ce que m’a expliqué maman, deux semaines après son décès. Elle avait réuni tout un faisceau de preuves, mais papa a perdu la vie avant qu’elle ait eu l’occasion de le confronter à ses mensonges.
Tromper maman, c’était tromper notre famille tout entière. Même si mon frère César ne l’exprime pas de la même façon, je sais que la plaie, le coup de couteau dans la photo trop parfaite, ne cicatrise pas pour lui non plus.
Tout au long de notre pause-café, ma grand-mère, d’ordinaire si volubile, reste silencieuse. Cela ne lui ressemble pas. Je décèle une tristesse lointaine, une mélancolie, dans ses yeux couleur de prairie. Mais je vois bien qu’il y a autre chose. Depuis quelques minutes, elle ne cesse de mordre sa lèvre inférieure. Signe d’anxiété, d’impatience, de douleur aussi.
Quand vient l’heure du départ, je me penche pour l’étreindre, mais elle se dérobe d’un geste brusque. Et me regarde étrangement.
— Qu’est-ce qui t’arrive ? Tu ne veux pas m’embrasser ?
Je remarque ses mains, crispées sur les accoudoirs.
Elle continue de me fixer, sans dire un mot. Puis elle se lance.
— Aujourd’hui, Phoenix, ça fait trois ans que tu détestes ton père. C’est long. Trop long. Je suis désolée… mais je ne peux plus faire semblant.
Je tressaille. Elle n’a pas évoqué papa depuis des mois. Ses yeux brillent. Ses mâchoires sont serrées. Quelque chose est en train de se craqueler, à l’intérieur de ma grand-mère.»

Extraits
« Au fond, depuis que le piano et mon père m’ont abandonnée, je ne sais plus qui je suis vraiment.
Je n’ai jamais parlé de ce problème à ma mère. L’histoire que je lui ai servie, c’est qu’avec la mort de papa, je n’étais plus obligée de faire semblant. Je lui ai dit avoir pris conscience que mon avenir n’était pas dans le piano et vouloir tout arrêter. Alors j’ai renoncé aux études de musique et j’ai emprunté le chemin de la fac de sciences. Soulagée que « j’assure mes arrières » en devenant prof de SVT plutôt qu’intermittente du spectacle, ma mère n’a pas cherché plus loin et a vendu le piano.
Le seul contact que j’ai gardé avec l’instrument, ce sont ces cours que je donne aux Gais-Lurons. En plus d’un petit complément de revenus, ils me permettent de conserver un lien avec ces vibrations viscérales qui me bouleversent toujours autant. » p. 21-22

« Mamie est très maligne : si elle m’a tendu cette perche, c’est parce qu’elle a senti que j’avais besoin de cette reconnexion à mon père sans parvenir à me l’autoriser. Alors elle a donné un petit coup de pouce au destin. Et j’ai sauté dessus avec l’avidité d’une affamée. » p. 32

« J’ouvre le clapet et découvre, coincé entre la cassette audio et le corps de l’appareil, un bout de papier, légèrement déchiré.
Je déplie ma fragile trouvaille avec délicatesse. Il y a quelque chose dessus.
Ça ressemble à une phrase, griffonnée à l’encre bleue sur un cahier d’écolier, dans une langue que je ne sais pas identifier, d’une écriture que je ne connais pas :
Suntem uciși în tăcere. Ajută-ne.
Je ne comprends rien de ce qui est écrit, mais je sens monter en moi un malaise indéfinissable. En repliant le petit morceau de mystère, je constate que le verso est, lui aussi, couvert de caractères.
Je frémis.
De ce côté-ci, l’écriture est nette, précise.
Et c’est surtout celle de mon père.
Ce que je vois apparaître n’a aucun sens. D’abord, il y a une suite de caractères, incompréhensible :
(6×6) BR.IERNIPX.IPAH.2L.NOC08MNEOA9AENDV.
Ce qui est écrit juste en dessous est en revanche parfaitement limpide. Il y a un numéro de téléphone, avec l’indicatif d’un pays étranger. Et un prénom, qui me dévore les entrailles : Serena. Le prénom de la maîtresse de mon père. » p. 35-36

À propos de l’auteur
Julien Sandrel a 39 ans. La Chambre des Merveilles (Prix Méditerranée des lycéens 2019, Prix 2019 des lecteurs U), son premier roman, a connu un succès phénoménal en librairie. Vendu dans vingt-cinq pays, il est en cours d’adaptation au cinéma. Il a publié La vie qui m’attendait en 2019. (Source: Éditions Calmann-Lévy)

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